Un juge algérien, enquêtant sur la mort des moines de Tibhrine assassinés en 1996 en Algérie, est arrivé dimanche à Paris, dans le cadre d'une commission rogatoire. Le juge algérien du pôle spécialisé dans les affaires de terrorisme et le crime organisé, était accompagné de deux collaborateurs et doit entamer son travail, aujourd'hui mardi, selon une source proche du dossier, qui n'a pas dévoilé son identité. La mission du juge algérien, qui intervient après celle de son collègue français Marc Trévidic, est simple : entendre deux anciens officiers des services secrets français, Pierre le Doaré, ancien chef d'antenne de la DGSE, à Alger (1994-1996), et Jean-Charles Marchiani, ex-officier du même service et ex-préfet du Var. M. Marchiani avait été chargé d'une mission auprès du Groupe islamique armé (GIA) qui avait revendiqué le massacre. Il a confirmé à M. Trévidic en 2012 que cette mission avait été décidée par le Président Jacques Chirac pour négocier une rançon, mais que le Premier ministre d'alors, Alain Juppé, qui n'en avait pas été informé, y a mis fin, signant « l'arrêt de mort des moines », selon le témoignage de M. Marchiani. Quant à Pierre le Doaré, il avait reçu, dans les locaux de l'ambassade de France, à Alger, un émissaire du GIA qui lui avait remis une preuve de vie des religieux, en captivité, selon plusieurs témoignages et documents. Les moines Christian de Cherge, Luc Dochier, Paul Favre Miville, Michel Fleury, Christophe Lebreton, Bruno Lemarchand et Célestin Ringeard, avaient été enlevés, dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, et emmenés vers une destination inconnue. Les têtes des moines assassinés ont été retrouvées, au bord d'une route de montagne, le 30 mai, plus de 2 mois après leur assassinat, mais leurs corps ne l'ont jamais été. Par ailleurs, et après deux années d'attente et plusieurs reports, le juge français Marc Trevidic, chargé par le parquet de Paris de ce dossier, et sa collègue Nathalie Poux, s'étaient rendus, la semaine dernière, au monastère de Tibhirine, dans le cadre d'une commission rogatoire, demandée en 2011, pour élucider l'assassinat des moines trappistes. Dans sa commission rogatoire internationale, adressée en décembre 2011, à l'Algérie, le juge français a demandé à entendre une vingtaine de témoins de l'affaire, considérés comme des témoins-clés, dont Abderezak El Para, alors un des lieutenants de Zitouni, et d'ex-terroristes repentis, et effectuer, avec l'aide d'experts français, des prélèvements ADN, sur les têtes des sept moines. Marc Trévidic veut, en effet, savoir si les têtes présentent ou non des impacts de balles et si les moines ont été décapités «ante ou post mortem». Sur place, un seul crâne a été, en fait, exhumé, mardi dernier, en fin de journée puis examiné par les experts. Ces derniers sont « chargés d'effectuer des prélèvements ADN et des examens radiologiques », selon des sources proches du dossier, qui ont précisé que ces opérations ont été conduites, sous la supervision d'un magistrat algérien et se sont tenues, mardi et mercredi derniers. Le ministre de la Justice Tayeb Louh avait, en annonçant la venue du juge français, clarifié les choses: « la procédure d'expertise et d'autopsie sera assurée par des experts algériens ». Il avait, également, indiqué que le juge algérien, en charge de ce dossier, doit, quant à lui, se rendre en France, le 21 octobre prochain, pour mener des auditions. L'assassinat des sept moines trappistes a été revendiqué par le GIA, alors dirigé par Djamel Zitouni.