Le nouveau gouvernement grec a réussi à contenir les charges répétées des ses homologues européens en les amenant à un compromis financier et à réfléchir sur l'absurdité du choix de l'austérité comme seule voie de sortie de crise. Ainsi, la volonté politique peut faire infléchir la puissance et domination « supposées » du « pouvoir de la finance internationale ». C'est la principale leçon que nous apprend le nouveau gouvernement de gauche grec d'Alexis Tsipras dans son combat pour se dégager du plan d'austérité exceptionnel que lui a imposé la Troïka européenne (FMI, BCE, UE). Vendredi soir, après 15 jours de négociations à Bruxelles, la Grèce et l'UE, particulièrement les pays de l'euro groupe, sont arrivés à un compromis sur le plan d'aide à la Grèce : la menace d'un défaut de paiement d'Athènes, sa sortie éventuelle de la zone euro, le gel des prêts financiers etc. tout cela a été évité et un délai de quatre mois supplémentaire (juin) a été accordé à la Grèce pour présenter à l'Europe son programme de réformes et plan d'assainissement de ses finances publiques. Un premier succès pour le nouveau gouvernement grec, tant la pression exercée par l'Allemagne, les Pays-Bas, La Finlande et l'Estonie principalement ne voulaient faire aucune concession aux Grecs et menaçaient de ne pas verser les 7 milliards d'euros promis avant la fin de ce mois de février. Athènes recevra ces 7 milliards d'euros et 17 autres milliards d'ici juin. Pendant ce temps, le gouvernement grec affinera sa stratégie de réformes structurelles qu'il présentera, après une première mouture prévue pour le 23 février, la fin du mois de juin prochain. Il s'agira pour le gouvernement grec de garantir à ses « frères » européens d'honorer sa dette sans pour autant « clochardiser » ou imposer l'austérité au peuple grec. C'est tout le pari d'Alexis Tsipras et de son gouvernement. C'est donc au plan interne qu'il va corriger les absurdités, injustices et autres miasmes qui gangrènent l'économie et la société grecques : réajuster la collecte de l'impôt, notamment chez les gros armateurs, soumettre l'église orthodoxe au paiement de l'impôt (elle dispose d'un véritable trésor accumulé depuis des siècles), mettre en place et actualiser le cadastre national (paiement des taxes d'habitations) etc. C'est-à-dire chercher l'argent chez ceux qui en disposent le plus et ne paient jamais pour financer la vie sociale et économique du pays et soutenir le secteur public (santé, éducation, emploi). En fait, sortir de la spirale de l'austérité qui frappe les pauvres et les classes moyennes pour permettre un début de croissance qui favorisera l'emploi. Face à cette logique pragmatique du gouvernement grec, l'Europe ne pouvait opposer sa seule logique à elle, celle de l'austérité et de l'endettement, qui s'est montrée plus dévastatrice et ruineuse pour le peuple grec. Les pays de l'euro groupe, en particulier l'Allemagne, avaient laissé entendre tout au long de ces négociations que la Grèce risquait d'être exclue de la zone euro si elle ne respectait pas le plan de la Troïka. Qu'à cela ne tienne, Alexis Tsipras et son ministre des Finances, Yanis Varoufakis, ont saisi la menace comme une opportunité supplémentaire pour avancer leurs pions : un abandon de la Grèce de la monnaie euro entraînerait des conséquences très graves pour le reste de l'Europe : fuite des capitaux étrangers et des investisseurs, désordre et chamboulement dans les échéanciers des prêts entre les différents pays européens, péril d'un crash boursier etc. En excluant la Grèce de la zone euro, c'est toute l'Europe qui en pâtira et pour longtemps. En clair, l'avenir de la Grèce ne peut être sans effet sur le reste de l'Europe. Interprétant la rigidité allemande comme une sorte de chantage, le gouvernement grec ne pouvait reculer sur son engagement à sortir son pays de la pression de la Troïka. Il en a fait un principe de « dignité », terme revenu souvent dans ses discours de campagne électorale. « Si l'Europe nous condamne à la faillite ou à la misère, autant y aller ensemble », semblait répondre le ministre grec des Finances au président de l'euro groupe, Dijselbloem, et à son collègue allemand, Wolfgang Schauble. Ces derniers, meneurs du camp de l'austérité, ont fini par admettre et croire dans la volonté du gouvernement grec à ne pas céder au chantage. Ils sont allés au compromis. Tsipras et son gouvernement ont réussi leur pari de faire « plier » la Troïka et les partisans du choix de l'austérité comme seule moyen de sortie de crise. En somme, lorsque la volonté politique affirme son intransigeance face à la « planète finance», elle peut gagner et ouvrir de nouvelles perspectives face aux dégâts des politiques ultra-libérales et capitalistiques. Peut-être même donner de l'espoir aux autres peules qui en souffrent.