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Pour en finir avec la troïka : Athènes se dit prête à renoncer à 7 milliards d'euros
Publié dans Le Maghreb le 01 - 02 - 2015

Bluff, inconscience ou vraie détermination, le gouvernement grec s'est montré prêt vendredi, pour en finir avec la troïka, à renoncer à 7 milliards d'euros attendus de l'UE fin février, alors que les caisses de l'Etat sont déjà fragilisées, ramenant les craintes d'une sortie de la Grèce de la zone euro.
Le ministre grec des Finances Yanis Varoufakis a réitéré en effet officiellement devant le patron de la zone euro Jeroen Dijsselbloem des propos tenus par le Premier ministre Alexis Tsipras et par lui-même depuis quelques jours.
La Grèce veut bien avoir "la plus grande coopération avec les institutions", comme l'UE, la BCE ou le FMI, mais elle n'a plus "l'intention de collaborer" avec ce qu'il a appelé "une délégation tripartite, anti-européenne, construite sur une base branlante", la troïka.
Depuis 2010, ces experts, issus des trois grandes institutions, se rendent régulièrement à Athènes pour dicter au gouvernement les réformes qu'il doit entreprendre, en échange des 240 milliards d'euros qui lui ont été en grande partie versés pour sauver le pays de faillite.
Cette présence régulière, sous haute surveillance policière, était devenue assez intolérable aux Grecs, premières victimes de la crise avec un chômage à plus de 25%, et des salaires divisés par deux. Ils y voyaient une infantilisation de leur pays. Au point que les deux dernières réunions, sous l'ancien gouvernement, se sont déroulées à Paris.
Ces experts devaient décider fin février si la Grèce avait fait suffisamment de réformes pour mériter les sept derniers milliards du plan d'aide de l'UE. Avec les déclarations de vendredi, cette date-butoir parait caduque, et le gouvernement grec ne donne pas de signe qu'il demandera une extension.

Cette date ne signifie rien
M. Varoufakis a observé en effet qu'il n'y aurait pas de logique à "critiquer le programme tout en demandant son extension".
Déjà jeudi, interrogé par le New York Times, M. Varoufakis avait indiqué : "Les sept milliards, nous n'en voulons pas, ce que nous voulons c'est repenser tout le programme".
Déjà la semaine dernière, encore candidat, le Premier ministre Alexis Tsipras avait dit que la date de février "ne signifiait rien et avait juste pour but de créer un sentiment d'urgence pour le prochain gouvernement".
Au cours de cette conférence de presse commune avec M. Varoufakis, M. Dijsselbloem -- qui avait auparavant rencontré M. Tsipras -- est apparu très crispé, ne pouvant que rappeler "qu'ignorer les accords n'est pas le bon chemin à prendre".
C'est que les implications de la position grecque peuvent être énormes : "Je pense que la probabilité d'un Grexit (une sortie de la Grèce de la zone euro) a pris quelques points de pourcentage", observait Alexandre Delaigue, professeur d'économie à Saint-Cyr. "Une solution où tout le monde sauve la face s'éloigne", estimait-il. "Ces gens ne bluffent pas, mais la Grèce ne va pas réussir à arriver jusqu'à fin février", s'alarmait Theodore Pelagidis, du think tank Brookings, à Bloomberg. "La situation va empirer de jour en jour, avec en première ligne les banques du pays", a-t-il estimé.
Selon le journal Kathimerini en effet, il y a actuellement moins de deux milliards d'euros dans les caisses de l'Etat grec, qui auront disparu fin février. Et les finances publiques se portent d'autant plus mal que les Grecs ont pour certains arrêté de payer leurs impôts pendant la campagne électorale, en attendant de voir ce qui sortirait des urnes.

"Plus l'heure des demi-mesures"
Ce que cherche la Grèce est assez clair : "un New deal européen", comme l'a expliqué mercredi M. Varoufakis. C'est-à-dire essayer de trouver une faille dans la zone euro pour essayer de convaincre certains pays de se mettre ensemble contre l'orthodoxie budgétaire défendue notamment par l'Allemagne.
C'est ainsi que M. Tsipras et lui se rendront dès la semaine prochaine voir leurs homologues en France et en Italie, vues comme les grands pays qui pourraient être les plus sensibles à un discours anti-austérité.
L'autre grande revendication de la Grèce est la renégociation de sa dette. M. Dijsselbloem s'est opposé vendredi à la "conférence" souhaitée par Athènes à ce sujet, et que ne repousse pas la directrice générale du FMI Christine Lagarde. Il a sèchement fait observer que "cette conférence existe, et que c'est l'Eurogroupe". Or le banquier français Matthieu Pigasse, dirigeant de la banque Lazard qui conseille le fonds de restructuration bancaire grec, a pour sa part estimé qu'une restructuration "était absolument nécessaire", et qu'il fallait "réduire de moitié la dette détenue par les institutions publiques en Grèce", soit à peu près de 100 milliards d'euros.
Toutes ces annonces ont perturbé la Bourse d'Athènes, qui a rechuté (-1,59%), tandis que l'obligation grecque à 10 ans faisait un bond à plus de 11,5%, signe de grande défiance des marchés.


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