Ce n'est pas encore la polémique, mais on y arrive fatalement. Interrogé sur l'installation des caméras de surveillance dans les villes, lors de sa visite à Constantine, mardi dernier, le Directeur général de la Sûreté nationale (DGSN), le général major Abdelghani Hamel, a sèchement répliqué que ses services ne sont nullement impliqués dans cette procédure. «La Sûreté nationale n'a jamais mis en place, et ne mettra pas, de caméras de surveillance car cela ne rentre pas dans ses prérogatives», devait-il encore indiquer à ce propos. Dès lors, plus pertinente, une autre interrogation s'impose: si ce n'est pas la DGSN qui se charge de l'installation et la gestion de ce système de caméras de surveillance, qui le fait alors ? L'objectif général d'un système de vidéosurveillance étant de contribuer à la sécurité des biens et des personnes, la prévention de la criminalité en somme, une mission essentielle des services de police, pousse à croire que c'est la DGSN qui veille à l'installation des systèmes de télésurveillance, mais la réponse négative du général major Abdelghani Hamel montre clairement que les leviers de commande sont entre les mains d'autres services de sécurité. Plus loin encore, on apprendra dans ce contexte que les Sûretés de wilayas ne sont dotées que de «relais» servant au visionnage direct des vidéos transmises par les caméras de surveillance. Initialement, donc, les images passent par un autre niveau de contrôle. «Ce sont les services de renseignements militaires qui se chargent de la gestion des caméras de surveillance installées dans les milieux urbains», nous ont affirmé des sources crédibles. Une autre explication avancée dans ce cadre réside dans la conception du système de vidéosurveillance, prévu pour anticiper les incidents, terroristes notamment, non pour être massivement utilisé dans les enquêtes. La profusion d'images, la difficulté dans la recherche lors d'enquêtes, et le manque de formation, font que les policiers n'ont pas acquis le réflexe de recourir aux archives des vidéos enregistrées, même si l'on nous assure sur ce registre que les caméras de surveillance ont aidé les enquêteurs de la Police judiciaire à résoudre plusieurs affaires criminelles. «L'Armée est mieux désignée pour gérer cette technologie, possédant en cela des compétences avérées dans ce domaine sensible», admet-on. Sous d'autres cieux, plusieurs associations et groupes politiques ont critiqué le recours à la vidéosurveillance, qualifiée de «liberticide» et de «solution de facilité évitant de s'attaquer aux vrais problèmes». Des spécialistes estiment que «les systèmes de vidéosurveillance, qui peuvent s'avérer efficaces dans les premiers temps de leur utilisation ou installation, voient leur influence sur la criminalité se réduire peu à peu», se référant à des études et statistiques établies dans les pays qui nous ont devancés sur ce registre. Ils rappellent que les délinquants s'adaptent à l'environnement et les caméras de surveillance ne font, ainsi, que déplacer le crime vers les zones non équipées, plutôt que de le réduire. En Algérie, où l'installation des caméras de surveillance dans les grands centres urbains est relativement récente, on s'inquiète pour le moment de l'absence d'un cadre légal et réglementaire pour organiser un décor qui tourne à l'anarchie. Des lieux publics sont mis sous surveillance de caméras installées au fronton des magasins par des particuliers, alors que la télésurveillance est presque généralisée sur les lieux de travail, sans se soumettre à aucune autorisation préalable !