A l'instar des anciens quartiers de Sidi El-Djabbar, derb Sensela, derb Messoufa, Sidi El-Yeddoune, derb El-Hadjamine, derb Sidi Hamed et R'hiba, le quartier historique de Bab Zir, situé au cœur de la médina de Tlemcen, grouillait jadis de monde; il y avait plein de maisons, de petits commerces, de hammams, de fontaines , c'était la vie ! Aujourd'hui, il faut faire preuve d'une certaine imagination pour visionner cette scène citadine d'un autre temps. Jouxtant l'emblématique kissaria, cet espace d'habitat de la ville de Tlemcen, qui abritait des maisons traditionnelles à patios, reflétant parfaitement le mode d'organisation culturelle et sociale de la famille tlemcénienne d'autrefois, est aujourd'hui en état de déliquescence : insalubrité, murs et terrasses en ruine, amas de gravats, air poussiéreux, refuge pour les délinquants, prolifération de rats et insectes Ce quartier, oublié et marginalisé, est une véritable plaie dans la ville. Depuis la délocalisation des familles occupant pendant des décennies ce grand site urbain vers des logements neufs dans la périphérie de la ville, le processus de détérioration de ces maisons de type traditionnel, colonial et postcolonial s'est fortement accéléré durant ces dernières années. Certaines bâtisses présentent même un danger imminent pour les riverains, qui ne comprennent pas l'absence d'actions de démolition pour certaines maisons en état de délabrement, et de protection et sauvegarde pour d'autres. Actuellement, une part importante des constructions du parc immobilier de la médina de Tlemcen dont l'habitat traditionnel compose la plus grande partie, reste en marge de la vie courante. «Cela fait 10 ans qu'on vit au milieu des rats, dans des conditions que vous n'imaginez pas. Nos enfants sont nés dans ce cauchemar. On espère juste que tout ce qui est détruit autour de nous se reconstruit un jour ou s'aménage», se lamente un habitant du quartier de Bab Zir. «Il y a urgence pour les pouvoirs publics de mettre en place des mécanismes de sauvegarde pour cette médina si l'on veut mettre en valeur et protéger ce patrimoine architectural usé par le temps. Les terrains d'assiette des constructions à démolir peuvent servir d'implantation à des projets commerciaux, de parkings à étages qui font crucialement défaut dans la capitale des Zianides, ou ils peuvent être aménagés en espaces verts ou aires de jeux. Le meilleur moyen pour protéger le patrimoine, c'est de l'occuper, de lui attribuer une fonction, de lui accorder un rôle dans la société actuelle, bref de l'habiter. Le ministère de l'Habitat et de l'Urbanisme doit mettre un programme national de réhabilitation des médinas algériennes, de renforcement des infrastructures et d'entretien des édifices. En ce qui concerne les équipements de proximité, les constructions démolies peuvent céder la place à la création de nouveaux équipements socio-administratifs et sportifs et la réalisation de nouveaux établissements de santé et d'enseignement. Il faut aussi penser à l'amélioration du cadre bâti des quartiers périphériques des médinas. La participation citoyenne est déterminante dans la réhabilitation et l'amélioration du cadre de ce bâti », explique un professeur en architecture de l'université de Tlemcen. Selon un autre spécialiste de la médina de Tlemcen, «le schéma d'organisation spatiale de la médina est basé essentiellement sur le rôle déterminant des fonctions économiques et plus particulièrement des fonctions commerciales dans l'organisation spatiale fondée sur une très forte différenciation entre les parties centrales où se concentrent l'activité économique, et les secteurs consacrés à la résidence ». La réhabilitation des maisons traditionnelles de la médina de Tlemcen pourra participer à la revitalisation de son noyau historique et contribuera aussi à accroître son activité touristique et économique.