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Drames de l'immigration : Le petit AYLAN n'est pas une fiction
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 05 - 09 - 2015

Le petit corps d'Aylan, sur le sable d'une plage, n'est pas une fiction, une émotion. C'est celui, bien vrai, d'un bébé tué par l'absurdité de la guerre. Ne détournons pas notre regard et gardons-le en mémoire dans l'espoir que cela ne se reproduira plus jamais.
Cinq années d'une guerre atroce en Syrie. Le petit Aylan Kurdi, trois ans : né sous l'enfer des bombes à Kobané, mort noyé en mer Méditerranée, jeté sur le sable d'une plage en Turquie où se dorent au soleil d'habitude des vacanciers. Aylan a eu de bout en bout une vie de martyre de trois ans. Effroyable destin pour un ange de trois ans. Et cela ne suffit pas puisque des « indignés » crient à l'abus de l'émotion et au chantage humanitaire aux médias qui ont jeté à nos visages cette douleur sur une plage. Ce n'est, justement, plus une image, une fiction. C'est la triste et dramatique réalité que vivent des millions d'autres enfants en Syrie, Libye, Yémen, Irak… Pathétique la réaction des chefs d'Etat et de gouvernements européens : une réunion pour le 14 septembre à Bruxelles pour fixer des quotas de réfugiés à accueillir pour chaque pays. En juin, le chef de l'Etat français et son Premier ministre, Manuel Valls, se sont « indignés » que l'on parle de quotas pour désigner des humains, ont refusé sèchement les « quotas ». Voilà qu'avec la chancelière allemande, Angela Merkel, ils annoncent la « répartition de quotas obligatoires » pour chaque pays. Jusqu'à 200.000 pour toute l'Europe. Encore un chiffre que les responsables politiques brandirons devant le reste du monde pour soulager leur conscience du poids de leur responsabilité dans cet océan de tragédies que vivent les Syriens, Libyens, Irakiens, Yéménites, Palestiniens… Le cadavre d'Aylan, trois ans, sur une plage de Turquie et les peuples européens et du reste du monde en colère : en Allemagne, en Autriche, en Grèce, en Italie, en Belgique des citoyens se mobilisent et ouvrent leurs bras, leurs cœurs et leurs maisons à ces nouveaux damnés de la terre. Il reste de l'espoir en l'humanité. Chaque Syrien, Libyen, Irakien, Palestinien accueilli est une vie sauvée, une victoire sur l'absurdité de la guerre, un espoir pour la foi en l'humanité des hommes. Car les responsables politiques ont déserté le champ de l'humanité pour celui de la politique froide, placide, sans âme. Non, ne détournons pas notre regard du cadavre frêle de cet enfant gisant sur le sable de cette plage réservée d'habitude aux vacanciers. Fixons cette douleur dans nos mémoires et nos consciences pour nous réveiller à la terrible réalité de ce nouveau siècle : guerres, famine, violence, dictature, misère, humiliation, égoïsme, racisme qui frappent les plus fragiles d'entre nous, les plus faibles. Fixons-là bien cette fois-ci pour ne pas oublier comme nous avons oublié l'image de la petite Vietnamienne, nue, brûlée au napalm des Américains dans une rue d'un village vietnamien en 1972. Rappelons aux plus jeunes d'entre nous que c'est le corps et les hurlements de cette fillette qui ont soulevé d'horreur l'opinion mondiale et vaincu la puissante armée américaine. Aujourd'hui, l'Europe s'est inventée à ses frontières ses propres guerres au nom de la liberté, des droits de l'homme et du droit d'ingérence. Quel esprit sensé ne rêve-t-il pas de liberté et de démocratie ? Le Syrien, le Libyen, Le Malien ou tout autre homme sur cette terre y aspire de tout son cœur. Question : faut-il la seule voie des armes et de la violence pour y parvenir ? Des exemples dans l'histoire nous enseignent qu'il y a l'autre voie, celle du dialogue et de l'action pacifique : Gandhi en Inde a défait le puissant empire britannique par une simple marche. Nelson Mandela a libéré son pays de l'apartheid à partir d'une cellule de prison. Le régime communiste de l'ex-URSS est tombé par une simple réforme politique venue de ses propres entrailles. Le mur de Berlin s'est effondré sous la mobilisation du peuple allemand. En agressant par les armes la Libye et la Syrie, la France de Sarkozy et de Hollande a tâché sa propre histoire et porte une lourde responsabilité dans la tragédie vécue par ces pays. Pour que le martyr Aylan, de son autre petit frère, de sa mère et des milliers d'autres Aylan ne soit pas vain, brandissons cette terrible photo au visage des responsables politiques d'Europe et du reste du monde et, surtout, ne l'oublions jamais. Car, Aylan pourrait être un jour votre enfant.

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