Le ministre chargé des Affaires maghrébines, de l'Union africaine et de la Ligue arabe, Abdelkader Messahel, est formel: le terrorisme «est une menace globale contre la paix et la sécurité, une atteinte à l'humanité». Intervenant dans le sillage des attentats de Paris, il a expliqué à la radio nationale que «l'Algérie est impliquée depuis de nombreuses années dans la lutte antiterroriste pour faire front» contre cette menace. «Et c'est la démarche de l'Algérie depuis de nombreuses années, car le terrorisme se nourrit du discours de l'exclusion, trouve sa force dans le discours radical, l'exclusion prônée un peu partout, et c'est ce genre de discours qui fait sa force», estime M. Messahel qui indique que «depuis deux ou trois mois l'Algérie s'est investie dans le partage de son expérience en matière de déradicalisation du terrorisme, (car) elle a beaucoup souffert du terrorisme». Le ministre a rappelé que «l'Algérie mène au niveau international une politique de déradicalisation, soutenue à travers la loi sur la concorde civile ou la réconciliation. Les grandes réformes menées par l'Algérie font une référence aujourd'hui en matière de déradicalisation», car elle «s'est beaucoup investie dans ce domaine et a été sollicitée par beaucoup de partenaires, dont l'ONU pour partager cette expérience». Et, dans la foulée, «l'Algérie donne moins à Daech, et cela fait partie de la politique de déradicalication. La politique de déradicalisation, c'est la concorde civile, la réconciliation nationale, la réhabilitation de l'islam traditionnel, redonner à la mosquée sa mission culturelle, redonner à l'école sa vocation citoyenne, affirmer le rôle de la presse». «Le choix de la démocratie par l'Algérie n'est pas un choix née de coquetterie, mais parce que la démocratie est le fondement de la déradicalisation», a-t-il dit. Pour M. Messahel, «le terrorisme occupe aujourd'hui des espaces, ce n'est plus des actes ciblés, mais un contrôle de vastes territoires, ce qui atteste de la mutation du terrorisme à travers également le cyber-terrorisme, avec une mutation dans le mode opératoire. Il est passé d'actes ciblés à occuper des espaces importants». Et, face au cyberterrorisme, «il faut s'organiser au niveau international notamment au niveau du Forum global contre le terrorisme», indique-t-il avant d'annoncer qu'au début du 1er trimestre 2016 se tiendront à Alger deux forums l'un sur la place de la démocratie dans la déradicalisation, le second sur la cybercriminalité, le terrorisme et ses commanditaires à travers les réseaux sociaux». Car, en fait, estime M. Messahel, il s'agit de mieux organiser les réseaux sociaux «au service de l'humanité et non de destruction massive de la population un peu partout». Sur la situation aux frontières algériennes, il a expliqué que l'Algérie est «dans un isolement positif. Nous vivons dans une zone de turbulences qui se précisent chez nos voisins à l'Est et au Sud. Le terrorisme est toujours vivant, le crime organisé est toujours vivant, il y a une connexion entre les deux, et l'Algérie a pu se prémunir contre ces menaces, car elle est moins donneuses d'hommes, car elle a mené une politique de réconciliation nationale, de renforcement de l'Etat de droit et de prise en charge de la jeunesse». Ce qui permet au ministre de dire que «l'Algérie est aujourd'hui moins exposée que nos voisins, mais on reste vigilants, car il n'y a pas de risque zéro», soulignant que «la vigilance est menée par l'ANP qui fait un travail extraordinaire à nos frontières», car «il faut contrôler les frontières, le contrôle se fait et se fait très bien», précise-t-il. Pour autant, M. Messahel relève également qu'il faut que «le front intérieur soit solide, avec une unité nationale contre le terrorisme. Il faut une vigilance intérieure, et rester mobilisé». LIBYE : PAS D'ALTERNATIVE A UN GOUVERNEMENT D'UNION Sur la situation en Libye, il a déclaré que «l'Algérie ne peut rester à l'écart de ce qui se passe dans ce pays, et a toujours recherché des solutions à la crise par des voies consensuelles, par un dialogue inter-libyen». «L'Algérie a prôné dès le départ une solution politique, un agenda entre partenaires. On a prôné la seule solution pour la Libye, la solution politique, et l'Algérie soutient les efforts de l'ONU», explique-t-il avant de rappeler que «nous restons un pays qui soutient les efforts des Nations unies, car il n'y a pas d'alternative à un gouvernement d'Union nationale».' Et sur ce registre, Messahel ira droit au but: «On ne peut s'accommoder d'un gouvernement à Tobrouk et un autre à Tripoli. La mise sur pied d'un gouvernement est une nécessité», martèle-t-il avant de souligner que «l'intervention en Libye est une erreur, c'est clair». Et, «chaque fois, l'Algérie a mis en garde contre les conséquences des interventions militaires, qui ne sont pas une solution, car on ne peut savoir comment se termine une intervention militaire et ses conséquences directes». Dès lors, l'Algérie considère, selon M. Messahel, que «la stabilisation du Sahel est dépendante de la stabilité de la Libye. Il faut une approche globale pour la crise libyenne». Revenant sur la menace terroriste, il a affirmé que «l'Algérie a les moyens de se défendre, on ne peut rester indifférents à ce qui se passe à nos frontières», car «la menace est là, présente ; chaque jour le MDN annonce la découverte d'armes et l'arrestation de terroristes et de bandits». Comme il a par ailleurs rappelé que les sources de financement du terrorisme proviennent «des rançons, des trafics en tout genre dont le trafic de drogue, les sources occultes, les paradis fiscaux, des Etats d'une manière indirecte à travers des sociétés caritativesz. Il faut donc, relève-t-il, «réfléchir comment tarir ces sources de financement et les criminaliser». Enfin, le «printemps arabe a accouché plutôt de forces d'exclusion que de forces démocratiques», a-t-il enfin déploré.