Le chantier des réformes de l'Enseignement, en Algérie, engagées par la ministre de l'éducation nationale Nouria Benghebrit se poursuit. Hier dimanche, elle a, un peu plus, précisé le chantier qu'elle compte mettre, rapidement, en place et relatif au changement radical du système d'évaluation des élèves en mettant, hors-jeu, la notation quantitative. La ministre de l'Education nationale a annoncé, dans un entretien à la Radio nationale que : «le système tel qu'il est mis en oeuvre correspond à une notation et un contrôle. Par contre le système d'évaluation évalue la progression de l'apprentissage de l'élève, de savoir où on est et où on va». Pour elle, «l'enfant a le droit à la réussite, et son corollaire, comment avoir la capacité de réussir. Les difficultés d'apprentissage (de l'élève, Ndlr) ne sont pas prises en compte, aujourd'hui, il faut, donc, mettre une pédagogie de la différenciation, de la formation pour mieux assurer l'apprentissage» de l'élève, estime la ministre, qui explique que s'il y a échec, «cela ne peut-être l'échec de l'élève, le fait de le stigmatiser sans lui donner les moyens de s'en sortir, c'est l'échec, pour moi, du système, et il faut la formation et l'accompagnement pour aider l'élève à s'en sortir.» Jeudi dernier, elle avait annoncé que «le système d'évaluation des élèves sera révisé, en passant d'une évaluation globale (notes et observations) à celle de la définition exacte des lacunes, dans chaque matière, en vue de faciliter leur traitement et leur assurer un soutien scolaire.» La ministre a expliqué que : «l'évaluation à travers l'observation générale de l'élève, dans une matière précise, n'a pas donné de résultats, voilà pourquoi il sera procédé à la définition exacte des lacunes relevées chez l'élève, dans chaque matière, en vue d'y remédier.» Mme Benghebrit va plus loin et affirme, qu'aujourd'hui, «nous sommes en décalage par rapport à ce qui se passe à l'international, il faut réduire le gap, les enseignants n'ont pas les éléments suffisants pour organiser la remédiation, qui est notre première priorité.» Une inquiétude, qui est matérialisée par le taux de déperdition scolaire énorme et d'échec de l'Ecole algérienne. Selon une étude du ministère de l'Education nationale, menée en 2013, sur 1.000 élèves qui débutent leur scolarité dans le primaire, seulement 41 arrivent à décrocher leur baccalauréat, sans redoubler au bout du cursus scolaire. La ministre a indiqué que «657 élèves arrivent en cinquième année primaire, 550 en première année de l'Enseignement moyen, 397 en quatrième année de l'Enseignement moyen, 150 en première année secondaire et 41 élèves, seulement, décrochent leur bac». Selon Benghebrit, le redoublement, «c'est autour de 30%, il y a des abandons, 2% dans le primaire et 9% dans le moyen», avant d'affirmer que «tout cela nous pose des problèmes, et interpelle le système d'évaluation dans l'Education», car «950 élèves sont perdus en cours de route et cela inquiète énormément, il y en a qui piétinent, qui redoublent au niveau de la scolarité obligatoire», et «cela pose le problème de l'efficacité et l'efficience, ce que le système produit face à tous les investissements.» Par ailleurs, la seconde mesure annoncée par la ministre de l'Education nationale est la refonte du système de rattrapage, qui sera généralisé à toutes les classes, hormis celles concernées par des examens. «Ce qu'on fera, c'est généraliser les examens de passage à l'ensemble des années, dans les matières où l'élève n'a pas la moyenne», a-t-elle expliqué. La ministre, qui a annoncé, également, que le nombre de devoirs à la maison sera diminué, a assuré que le nouveau système d'évaluation des élèves sera mis en oeuvre progressivement. Bottant en touche sur la question de la surcharge des classes, elle explique que «les travaux n'accordent pas une priorité au nombre d'élèves par classe, mais à la capacité du directeur de l'établissement à avoir, à sa disposition, les solutions qu'il peut amener.» UN CARNET DE COMPETENCES POUR L'ELEVE «Ce que nous allons faire avec les enseignants, c'est mieux diagnostiquer les difficultés des élèves, nous avons mis en branle le système, et à la rentrée 2016-2017, nos enseignants et inspecteurs seront formés à cette tâche, formés au repérage et aux difficultés des élèves.» Le processus, selon la ministre, a «démarré au 1er trimestre 2015, certains vont le mettre en oeuvre aux 3ème et 4ème trimestres, et le système sera généralisé, l'année prochaine.» Sur le nombre d'examens, elle a indiqué qu'il y a une «une circulaire pour diminuer le nombre d'examens, et devoirs à la maison, et passer d'une note chiffrée à une note d'évaluation du niveau de l'élève», et, «avec le nouveau système, l'évaluation qualitative, il faudra qu'on aille vers un nouveau conseil des classes». Pour Benghebrit, «il faut aller vers un examen unique de l'évaluation de l'élève», ajoutant que «notre ambition est que l'élève ait son carnet de compétences et que l'enseignant soit préparé, en amont, pour remplir ce carnet de compétences. Notre objectif est d'amener le corps des enseignants à aller vers ce système d'évaluation, pour comprendre les difficultés et les compétences de l'élève», explique, encore, la ministre de l'Education nationale, qui n'a pas donné de précisions sur ce système d'évaluation des compétences de l'élèves. Elle a, juste, dit qu'il va falloir «avec des appréciations qualitatives, changer l'évaluation des élèves, en mettant de côté la mémorisation.» Quant à la révision des manuels scolaires, elle a rappelé que cette tâche «fait, évidemment, partie de notre programme». Elle a expliqué que pour «la rentrée 2016-2017, tout va changer pour les 1er et 2ème paliers, et aujourd'hui, avec la Commission d'homologation, on a toutes les chances d'améliorer les manuels scolaires.» Mercredi, elle avait annoncé que plusieurs nouveaux manuels scolaires, pour les cycles primaire et moyen, seront disponibles pour la rentrée scolaire 2016-2017. Deux manuels pour la 1re année primaire et deux autres pour la 2ème , concernant les matières technologiques et scientifiques, l'Education islamique et civique seront disponibles, à partir de la prochaine rentrée scolaire. COURS DE RATTRAPAGE, LA GRANDE BOSSE Sur les cours de rattrapage, elle a estimé que «le fait de demander aux enseignants de procéder à la remédiation est essentiel, c'est devenu une chose habituelle, mais nous avons demandé aux chefs d'établissements d'organiser ces cours durant la 1ere semaine des vacances. On laisse les établissements ouverts pour ces élèves.» Mais, concernant certains enseignants qui prennent en otages leurs élèves, les obligeant à suivre moyennent finances les cours de soutien qu'ils organisent, la ministre n'a pas condamné ces pratiques, mais a seulement rendu «hommage aux enseignants», qui ne recourent pas à ce procédé condamnable, tout en accablant les parents d'élèves qui recourent à ce système «pour avoir de bonnes notes». «C'est un signe qu'il faut revenir aujourd'hui à la norme et l'éthique», a-t-elle observé, avant d'annoncer que le poids du cartable sera diminué pour la 1re et 2 ème années primaires dès 2016. Cet allègement est aussi lié, selon elle, à la proposition d'avoir des armoires pour les affaires scolaires des élèves. Pas grand-chose, d'autre part, pour le Baccalauréat, hormis que l'épreuve de sport (EPS) sera intégrée dans le contrôle continu et prise en compte dans la note du BAC pour les scolarisés, mais aucun changement n'est prévu pour les non scolarisés. Pour la durée de cet examen, qui est actuellement de cinq jours, des propositions sont faites pour la diminution des jours d'examen, «il y a des propositions a l'étude, un travail a été fait avec nos partenaires sociaux, il y aura un séminaire sur cela, et dès que le système sera accepté, il sera soumis au gouvernement», explique la ministre, qui a prévenu que le BAC 2016, «on va se préparer à lutter contre la fraude et» assurer les conditions de crédibilité de cet examen.» Enfin, elle a annoncé que pour l'examen de 5 ème année, les candidats ne vont pas se déplacer dans des centres d'examens, mais ils resteront dans leurs écoles. «Cela va diminuer le stress pour nos enfants, et on passera de 6.000 centres d'examen à 16.000», assure la ministre.