Américains et Saoudiens réclament l'instauration du cessez-le-feu en Syrie. Leur demande a été formulée ce lundi à Washington par le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel Al Jubeir en visite dans la capitale américaine où il s'est entretenu avec John Kerry. Il faut remarquer que Ryadh et Washington s'avisent de demander ce cessez-le-feu quand sur le terrain en Syrie les groupes armés anti-régime qu'ils soutiennent sont soumis à une offensive des forces loyalistes qui atteint des résultats dont les experts militaires disent qu'ils sont un tournant décisif dans la guerre qui les oppose. Jusqu'à ce retournement auquel l'on assiste sur le plan militaire en Syrie, Washington et Ryadh n'ont pas voulu entendre parler d'un cessez-le-feu, ayant tablé que les aides qu'ils octroient à la rébellion anti-régime ont créé un rapport de force en faveur de cette dernière dont il résulterait à courte ou moyenne échéance la chute du régime de Damas. Tant que cet objectif leur a paru à portée de l'opposition armée, Washington et Ryadh ont poussé celle-ci à rejeter les offres de trêve ayant émané du régime et de ses alliés. Les succès remportés ces derniers jours par l'armée de Bachar El Assad font que la rébellion syrienne est en pleine déconfiture, pratiquement en voie d'effondrement que Washington et Ryadh tentent de prévenir en préconisant un cessez-le-feu qui mettrait fin à l'avancée du rouleau compresseur devant lequel elle abandonne ses positions les unes après les autres. Il ne faut pas être dupe des considérations «humanitaires» qu'avancent Washington et Ryadh pour leur demande de cessez-le-feu. Ce qu'ils tentent d'obtenir c'est en fait que leurs protégés syriens conservent le contrôle de portions de territoire et notamment d'une partie d'Alep, la seconde ville du pays, qui les feraient apparaître comme étant toujours en position de contraindre le régime à prendre en compte leurs exigences politiques. Ryadh a lancé l'appel au cessez-le-feu devant prémunir ses alliés syriens de la déroute finale qui se profile pour eux en l'ayant fait précéder par la menace d'une intervention militaire terrestre saoudienne. Pareille aventure est dans le domaine du possible de la part de la monarchie saoudienne entêtée à faire tomber le régime de Damas quitte à provoquer un conflit généralisé qui n'affecterait plus par ses enchaînements que la seule région du Moyen-Orient. En fait, plus qu'un cessez-le-feu que dit vouloir l'Arabie Saoudite, c'est l'embrasement qui est recherché par Ryadh afin qu'il détermine ses alliés occidentaux à prendre fait et cause en sa faveur. L'intervention russe au côté du régime a incontestablement rebattu les cartes du conflit syrien et créé une situation qui rend illusoire pour Ryadh et les autres ennemis étrangers de ce régime leur persistance à exiger des négociations de paix pour la Syrie à leurs conditions et préalables. Ce que le régime n'a pas accepté quand il a été en moment de faiblesse militaire, il ne faut pas s'attendre qu'il s'y résolve alors qu'il est parvenu sur ce plan à retourner la situation en sa faveur.