Le projet de loi organique relatif à la haute instance indépendante de surveillance des élections devra être présenté prochainement à l'Assemblée populaire nationale pour être opérationnel en prévision des élections législatives puis locales de 2017. Le texte, selon l'APS, comporte 53 articles à l'objectif de fixer les missions, la composition, l'organisation et le fonctionnement de cette instance, en application des nouvelles dispositions de la dernière révision constitutionnelle. L'avant-projet avait été approuvé le 31 mai dernier par le Conseil des ministres, présidé par le chef de l'Etat. Selon le communiqué sanctionnant les travaux du Conseil des ministres, cette instance « sera composée de 410 membres » dont la moitié sera issue de magistrats proposés par le Conseil supérieur de la magistrature et l'autre moitié « des compétences indépendantes issues de la société civile, représentant toutes les wilayas et la communauté nationale à l'étranger, ainsi que tous les acteurs de la société civile ». Le document précise que l'ensemble de la composante de cette haute instance est nommé par le président de la République. Quant à son premier responsable, il « sera choisi à l'issue de consultations avec les partis politiques ». Cet organisme, qui disposera en théorie d'une autonomie administrative et financière, déploiera en période électorale des permanences aux wilayas et aux circonscriptions électorales à l'étranger. Il aura pour mission de veiller à la régularité de toutes les opérations liées notamment à la révision des listes électorales, au dépôt des candidatures, à la remise des listes électorales aux candidats, à une répartition équitable des moyens de campagne, ainsi qu'au déroulement de cette dernière conformément à la loi. Durant le scrutin, elle sera chargée de garantir aux candidats le droit d'assister au scrutin, de veiller à la disponibilité des bulletins de votes et au respect de leur ordre de classement, et de veiller au respect des horaires d'ouverture et de clôture des bureaux de vote. Après le scrutin, elle veillera à la régularité des dépouillements, au respect du droit des candidats de consigner leurs réclamations sur les procès-verbaux de dépouillement, et d'obtenir des copies de procès-verbaux de dépouillement aux candidats. Selon le communiqué du Conseil des ministres, l'instance disposera de larges pouvoirs dont notamment celui de demander au Parquet la réquisition de la force publique ou de le saisir de faits constatés susceptibles de revêtir un caractère pénal. Elle pourra également saisir les pouvoirs publics et les candidats de toute carence ou dépassement que les destinataires sont tenus de redresser et la capacité d'obtenir tout document ou information relatifs à l'organisation et au déroulement des opérations électorales pour en effectuer l'évaluation. Le texte contient, par ailleurs, des dispositions pénales selon lesquelles « est puni d'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans et d'une amende de 20.000 à 100.000 DA quiconque entrave les membres de la haute instance pendant ou à l'occasion de l'exercice des missions qui leur sont dévolues ». La peine est doublée en cas de récidive. Les partis politiques ont différemment commenté cette haute instance. Si les partis du pouvoir ont applaudi, l'opposition a clairement affiché son scepticisme. Ali Benflis, le président Talaïe el Houriet, avait déclaré ne pas trop se faire d'illusions quant à une probable «rédemption» du pouvoir à travers la constitutionnalisation d'une haute instance indépendante de surveillance des élections. Il lui reproche de ne pas être indépendante, devant rendre des comptes à un Conseil constitutionnel « sans libre-arbitre et sans marge de manœuvre » et de se retrouver sous l'emprise de l'institution présidentielle expliquant que « c'est à travers la préparation et l'organisation des élections que la logistique de la fraude se met en place ». Louisa Hanoune qualifiera, quant à elle, cette instance de «foire» de par sa composante pléthorique de 410 membres, invitant ses concepteurs à s'inspirer de l'expérience tunisienne en matière d'organisation des élections. Pour Mohamed Douibi, président du parti Ennahda, « le pouvoir a pris l'idée que nous avons proposée sans le contenu ». Pourtant, l'annonce faite par Bouteflika en mars 2015 de l'institution d'un mécanisme indépendant de surveillance des élections avait été saluée aussi bien par les formations politiques du pouvoir que celles dites de l'opposition qui y ont vu un gage de garantie concernant les prochaines échéances électorales. Mais cela c'était avant de connaître sa composante. Longtemps revendiquée par l'opposition, cette commission indépendante pour la surveillance des élections est, dans l'absolu, un acquis important en perspective des prochains rendez-vous avec les urnes. En théorie seulement, puisque ce mécanisme a toujours existé, dans l'esprit du pouvoir en place, à travers les fameux comités de wilaya et de commune de surveillance des élections, composés d'un représentant de chaque parti politique agréé et d'un représentant de chaque candidat dûment mandatés, censés veiller à la propreté des scrutins. Pourtant, à chaque élection, l'opposition a toujours dénoncé des fraudes au profit des partis du pouvoir.