Des Algériens en situation irrégulière en Espagne ont-ils été brutalisés par la police lors de la mutinerie qui s'est déroulée au centre de rétention pour étrangers situé dans le quartier d'Aluche, dans le sud de la capitale espagnole ? C'est en tout cas la version des harraga algériens qui ont indiqué avoir fait l'objet de représailles de la part de policiers après être montés dans la soirée du mardi 18 octobre sur le toit du centre. Selon le quotidien espagnol El Pais, une trentaine de migrants avait auparavant aveuglé des caméras de sécurité à l'intérieur de l'immeuble et cassé des meubles jusqu'à se frayer un chemin vers le toit. L'affaire est suffisamment grave que l'ONG SOS Racisme dépose une plainte, vendredi dernier, pour «mauvais traitement et traitement dégradant». Le journal en ligne «20 minutes» qui a eu accès au document rapporte qu'il contient des témoignages de certains détenus qui déclarent avoir été forcés de se mettre à genoux et de s'asseoir dans une rangée tout en étant agressés par la police. La plainte demande l'ouverture d'une enquête sur ces allégations de brutalités policières. Les témoignages recueillis par l'ONG racontent comment ils ont été «enfermés dans une chambre» et «forcés de s'asseoir dans une rangée sous les coups répétés» de policiers. L'ONG ajoute que les migrants ont souffert de «mauvais traitement, de harcèlement et de représailles» contre leur action. Un témoignage rapporte qu'ils «ont été contraints de rester à genoux dans la cellule pendant de longues périodes tout en étant surveillés et brutalisés». De son côté, une source de la police nationale a signalé à «20 minutes» qu'elle n'est pas au courant de cette plainte. Pour sa part, une source de l'ambassade algérienne à Madrid a indiqué que la représentation diplomatique est en contact avec les autorités espagnoles pour trouver une solution rapide à cette question. Interrogé sur la situation de leurs ressortissants, la même source d'informations rappelle que les Algériens impliqués sont des «personnes en situation irrégulière et non des criminels» et devraient être traités conformément à l'article 8 du Protocole d'accord entre les deux pays en vigueur depuis décembre 2003 et qui met l'accent sur le «respect méticuleux des engagements des deux pays concernant les droits de l'homme». Les mêmes sources diplomatiques ont déclaré avoir été «informées par la police nationale espagnole des événements qui se sont déclarés dans le centre de Madrid». Et à la demande de la partie espagnole, «l'ambassade a envoyé au centre de Aluche deux représentants du consulat». Rappelons que ce n'est pas la première fois que les sans-papiers algériens dénoncent les brutalités des policiers dans les centres de rétention. Parmi ces établissements, celui de Valence qui a été au centre d'une plainte déposée par cinq harraga algériens. Les faits remontent au 11 octobre 2013, quand 20 ressortissants algériens qui ont entamé une grève de la faim au centre de rétention à Valence, en signe de protestation contre leur détention, ont été surpris par la descente de la police espagnole qui s'opposait à leur action, selon la présidente de l'Association Casa Argelia (maison de l'Algérie à Valence), Houria Souhili. Après la plainte déposée par des harraga algériens contre l'administration du centre de détention provisoire des étrangers à Valence en Espagne qui les a privés de toute liberté, ainsi que pour avoir été roués de coups après avoir observé une grève de la faim, la machine diplomatique algérienne s'était manifestée. Le vice-consul algérien à Alicante, Oussama Hamed Salhi, avait visité les installations dudit centre et a tenu une réunion avec les directeurs de la centrale pour demander des explications sur les plaintes de cinq détenus algériens pour mauvais traitements qui leur ont été infligés par des officiers de police et qui sont allés devant les tribunaux pour dénoncer les bavures policières. En 2009, le président de la Fédération des associations algériennes en Europe, Belmeddah Noreddine, avait accusé le ministère des Affaires étrangères de ne pas défendre les intérêts des Algériens en Espagne. A l'époque, il avait tiré la sonnette d'alarme sur le sort de centaines d'Algériens livrés à eux-mêmes, notamment en Espagne où leurs droits sont tout simplement bafoués quand ils ne sont pas bien évidemment morts évoquant le cas des harraga enterrés en terre ibérique. Il avait interpellé solennellement le président de la République pour rapatrier dans leur pays et chez leurs familles tous les harrraga enterrés en Espagne. Ces centres de rétention sont également au centre d'une polémique en Espagne puisque le Syndicat unifié de la police (SUP) a exigé dans un communiqué «la fermeture immédiate du centre» de Sangonera, en dénonçant des carences en matière de sécurité et un manque de personnel. Des organisations des droits de l'Homme et partis espagnols de gauche s'intéressent eux aussi à ces centres mais sous un autre angle. Ils y dénoncent les mauvaises conditions de séjour et réclament leur fermeture. «Ils enferment des internés dans des cellules d'isolement, en représailles pour des petites choses, c'est un traitement dégradant», a notamment déclaré un juge chargé du contrôle du centre de rétention de Madrid, estimant que ces centres de rétention sont «pires que la prison». Selon un rapport du Défenseur du peuple (le médiateur de la République), 6.930 personnes sont passées en 2015 par les sept centres de rétention du pays, dont 41% ont été finalement expulsés.