Dorénavant, les accords commerciaux, agricoles et autres entre l'Union européenne et le Maroc évacueront de leur champ d'application le territoire non autonome du Sahara occidental, occupé par Rabat depuis 1975. Cette confirmation de l'arrêt de la Cour de justice de l'UE (CJUE) de décembre dernier a été rappelée par la commissaire européenne au Commerce, Cecilia Malmstroem. 'A l'avenir, la Commission tiendra dûment compte de l'arrêt du 21 décembre 2016 dans tout processus», a-t-elle écrit dans sa réponse, au nom de la Commission européenne, à des députés européens qui l'exhortaient à exclure le Sahara occidental des négociations de l'accord de libre-échange complet et approfondi entre le Maroc et l'UE, conformément à la décision de la CJUE. Pour les défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental et de l'autodétermination du peuple sahraoui, c'est là une grande victoire. En effet, de nombreux eurodéputés ont, dans une lettre, appelé la Commission européenne à confirmer que le Sahara occidental sera dorénavant exclu des négociations avec le Maroc sur cet accord de libre-échange complet et approfondi que négocient depuis 2013 l'UE et le Maroc, qui a tenté d'inclure le territoire non autonome du Sahara occidental dans ces accords commerciaux. Et, tout accord entre Rabat et Bruxelles 'ne sera pas applicable, de jure ou de facto, aux territoires sahraouis occupés sans le consentement du peuple du Sahara occidental», précise la commissaire européenne au Commerce. Elle a en outre confirmé que les négociations pour cet accord de libre-échange approfondi et complet «sont actuellement suspendues et aucune date n'a encore été fixée en vue de leur reprise». 'Les institutions de l'Union européenne procèdent parallèlement à un examen approfondi de l'ensemble des implications de l'arrêt de la CJUE», a-t-elle ajouté. De son côté, le commissaire européen chargé de l'action pour le climat et de l'énergie, Miguel Arias Canete, a assuré que l'UE tiendra désormais compte du statut «distinct et séparé» du territoire du Sahara occidental dans ses échanges avec le Maroc en matière d'énergie renouvelable. Cecilia Malmstroem a par ailleurs indiqué qu'elle soutient 'les efforts déployés par le secrétaire général des Nations unies en vue de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable qui permette l'autodétermination du peuple du Sahara occidental''. Le 21 décembre 2016, la CJUE avait rendu son verdict dans une requête du Front Polisario dénonçant les accords commerciaux entre Rabat et Bruxelles, qui avaient inclus le territoire du Sahara occidental. Ces accords portaient notamment sur la pêche dans les eaux sahraouies. Le dossier remonte à septembre 2016, lorsque l'avocat général de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) Melchior Wathelet avait considéré que l'accord UE-Maroc sur la libéralisation des échanges des produits agricoles et de la pêche ne s'applique pas au Sahara occidental qui «ne fait pas partie du territoire du Maroc». «(...) le Sahara occidental ne fait pas partie du territoire du Maroc et que, partant, contrairement à ce qui a été constaté par le Tribunal, ni l'accord d'association UE-Maroc ni l'accord de libéralisation ne lui sont applicables», a-t-il écrit dans ses conclusions transmises à la CJUE. Dans sa recommandation à la Cour qui a par la suite rendu son verdict, l'avocat général de la CJUE avait souligné que ni l'UE ni aucun de ses Etats membres ne reconnaissent la prétendue souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, un territoire inscrit depuis 1963 sur la liste des territoires non autonomes de l'ONU. Il le précise en relevant que 'l'Union et ses Etats membres n'ont jamais reconnu que le Sahara occidental fait partie du Maroc ou relève de sa souveraineté» et a rappelé que le Sahara occidental est, depuis 1963, inscrit par l'ONU sur sa liste des territoires non autonomes, qui relèvent du champ d'application de sa résolution portant sur l'exercice du droit à l'autodétermination par les peuples coloniaux. Après la décision de la CJUE, Rabat avait menacé et mis à exécution sa menace de ne pas empêcher les migrants subsahariens d'entrer en Europe via les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. 'La non application de cet accord (conclu en 2012, NDLR) expose l'Europe à un véritable risque de reprise des flux migratoires que le Maroc, au gré d'un effort soutenu, a réussi à gérer et à contenir'', avait menacé l'ex-ministre de l'Agriculture Aziz Akhannouch. 'L'absence d'un engagement franc de la part de l'UE imposera au Maroc un choix décisif'', a-t-il ajouté. Moins d'une semaine après, les assauts des migrants subsahariens contres les enclaves espagnoles avaient repris.