Le tableau dressé hier par le nouveau PDG de Sonatrach, Ould Kaddour Abdelmoumen, sur la gestion du groupe est peu reluisant. Même s'il ne le dit pas clairement, le nouveau patron de Sonatrach remet en cause toute la gestion du groupe, y compris la politique de filialisation qui a constitué une sorte de dogme sacré dans le secteur des hydrocarbures. «J'ai découvert des choses qui ne sont pas normales», a déclaré M. Ould Kaddour devant les principaux responsables du groupe et directeurs généraux des filiales, à l'occasion d'une rencontre organisée au centre international des conférences (CIC) à Sidi Fredj, Alger. «Je suis choqué», a-t-il ajouté en soulignant sans ambages que Sonatrach n'est plus une entreprise économique mais est devenu un «groupe bureaucratique». Cette situation ne peut plus continuer, avertit le PDG de Sonatrach qui déclare également clairement que la «mutation» se fera avec ou sans les filiales du groupe. Très à l'aise, contrairement à ses prédécesseurs qui lisent un discours préalablement préparé par une armada de conseillers, Ould Kaddour improvise et semble dire les choses telles qu'elles sont avec beaucoup d'assurance. En ce sens, il fera formellement savoir aux différents responsables du groupe qu'il n'était pas venu «signer les paraphes» mais apporter de profonds changements dans la gestion du groupe qui doit impérativement tracer des objectifs à atteindre. Il soulignera dans ce même cadre que le système d'information de Sonatrach est défaillant et obsolète. Il ironisera plus loin que l'information ne passe même pas entre les différents intervenants à l'intérieur même du groupe. Le PDG semble vouloir apporter de profonds bouleversements en matière de gestion du premier groupe public algérien dont dépend tout le pays depuis son indépendance en 1962. «Il faut libérer les énergies», a-t-il lancé devant ses collaborateurs qui sont restés scotchés à ses lèvres. Ces mêmes collaborateurs se réuniront à cet effet durant deux jours dans le luxueux CIC afin de débattre des voies et moyens de mettre en œuvre une «stratégie d'amélioration des performances du groupe Sonatrach». Durant cette période tous les mangers et experts du groupe vont se concerter à travers des ateliers sur des thématiques dont les enjeux sont intimement liés à «l'optimisation» des processus de l'entreprise et l'accroissement des capacités de production de Sonatrach. Sonatrach en difficulté ? La compagnie nationale des hydrocarbures est-elle en difficulté ? Le ministre de l'Energie, Mustapha Guitouni, le dit, lui, clairement. «La compagnie a connu des moments très difficiles ces dernières années et c'est un euphémisme de le dire», a-t-il déclaré lors de son intervention au «brainstorming» organisé par Sonatrach. Il soulignera plus loin que «cette période appartient désormais au passé» non sans rappeler que ce «traumatisme» vécu par Sonatrach a permis en quelque sorte au groupe algérien de se projeter résolument dans l'avenir. «Il va falloir trouver des solutions à court, moyen et à long terme pour dépasser cette conjoncture», a ajouté le ministre. Il a affirmé en outre que la poursuite de la prospection et l'amélioration de la production des hydrocarbures reste un impératif. Guitouni a tenu en ce sens à souligner que le groupe doit renforcer ces partenariats gagnant-gagnant et attirer au même moment de nouveaux partenaires. «Le partenariat est un axe stratégique compte tenu des niveaux d'investissement, des potentialités des hydrocarbures, de façon à renouveler nos réserves, diversifier le tissu des industries pétrochimiques de transformation», soutient le ministre de l'énergie qui rappelle que les amendements que projette d'apporter le gouvernement à la loi sur les hydrocarbures vont justement dans le sens d'attirer de nouveaux investisseurs et améliorer les recettes du pays. «Sans porter atteinte à aucune question de souveraineté, une relecture de cette loi est aujourd'hui nécessaire pour améliorer notre attractivité dans le domaine de la prospection et de l'exploitation des hydrocarbures», tente de rassurer le ministre qui souligne dans le même cadre que l'objectif est de valoriser les ressources tout en préservant l'indépendance du pays en énergie. Enfin, en évoquant l'exploitation du gaz de schiste, le ministre de l'Energie promet de communiquer afin de rassurer la population sceptique sur tous les progrès technologiques. «Nous devons communiquer sur ce que font les autres pays dans ce domaine, sur la façon dont les schistes ont complètement modifié la structure des prix et l'architecture des marchés», conclut le ministre.