La réduction de la facture des importations semble être l'une des priorités sinon la priorité première du gouvernement, et c'est le ministre du Commerce qui vient de le rappeler derechef. Dans le cadre de l'université du Forum des chefs d'entreprises (FCE), Mustapha Benmeradi a annoncé de nouvelles mesures visant à réduire davantage cette facture la ramenant de 40 à 41 milliards de dollars en 2017 à 30 milliards de dollars en 2018. Pour ce faire, le ministre a notamment évoqué «des mesures de sauvegarde volontaristes» qui devront porter sur un relèvement des droits de douanes, le rétablissement des droits de douanes et de la Taxe intérieure de consommation (TIC) sur certains produits finis importés. Benmeradi a également cité une mesure de contingentement d'autres groupes de marchandises «qui pèsent lourdement sur la balance commerciale» en vue de limiter quantitativement du volume d'importation autorisé, soit en pourcentage du marché intérieur, soit en valeur absolue. Selon lui, une vingtaine de produits seulement représentent 50% des importations algériennes depuis 10 ans. Par ailleurs, il a fait état de la suspension d'importation de nombre de marchandises au titre de «la protection de la production nationale». Une mesure sous haute surveillance, admet-il en parallèle de la possibilité des opérateurs économiques de formuler leurs demandes de protection dans un registre ouvert pour la circonstance au niveau de son département. Ce registre, expliquera-t-il encore, permettra à ses services d'engager des enquêtes sur la capacité de ces mêmes opérateurs à couvrir partiellement ou totalement la demande nationale en respectant les conditions de qualité, des prix et de la concurrence. Si les conditions sont réunies, l'importation du ou des produits étrangers équivalents sera interdite. A propos des mesures de protection de la production nationale, le ministre a tenu à rappeler que ce n'est pas une exclusivité algérienne puisque, depuis la crise financière mondiale de 2008, plusieurs pays ont mis en œuvre quelque 600 mesures protectionnistes directes et indirectes qui ont conduit à une baisse du commerce mondial. Rappelons que Bruxelles avait épinglé notre pays sur cette question dans son rapport annuel sur les obstacles au commerce et à l'investissement. La Commission européenne reprochait à l'Algérie la mise en place de deux nouvelles mesures protectionnistes en 2016 afin d'augmenter sa production locale «dans un contexte de dégradation de son compte courant et de sa balance commerciale». Bruxelles voyait d'un mauvais œil la mise en place du régime de licences d'importation qui a eu des conséquences directes sur nombre de secteurs d'activités aussi bien en France qu'en Espagne, impactant négativement les exportations de véhicules en provenance de l'Union européenne. Face à la chute drastique des recettes des hydrocarbures induite par la dégringolade des prix du baril de pétrole, l'Algérie n'avait pas trouvé d'autres solutions que de blacklister entre 1 700 à 2 000 produits interdits d'importation pour lutter contre l'érosion de ses réserves de changes. La décision du ministère du Commerce de suspendre toutes les importations des produits finis avait fait réagir les partenaires économiques, surtout européens. Il a fallu que Tebboune, alors ministre par intérim du Commerce, distribue les assurances pour le respect des engagements contractuels de l'Algérie, à commencer par ses accords avec l'Union européenne. Abordant le «paradoxe algérien», Benmeradi a estimé qu'une approche plus rationnelle devrait traiter cette problématique des importations dans le cadre du commerce intérieur. Si par définition, la régulation étant de satisfaire la demande nationale à partir d'une production nationale alors que les importations jouent le rôle d'appoints nécessaires à la satisfaction de la demande locale, actuellement, les importations se sont substituées à la production nationale. Il donnera en exemple les secteurs de l'agroalimentaire et l'industrie des matériaux de construction comme étant les deux activités ayant enregistré de nombreux investissements sur ces 20 dernières années. Benmeradi révélera que la contribution de ces deux secteurs dans la couverture de la demande nationale n'a pas cessé de décliner passant de 83% en 2000 à 65% en 2015 pour l'agroalimentaire, et de 70% à 60% durant la même période pour les matériaux de construction. Une situation due notamment, précisera-t-il, à l'ouverture débridée du commerce extérieur, aux retards pris dans la mise à niveau des entreprises et la faiblesse des stratégies de défense commerciale. En résumé, expliquera le ministre, «la vulnérabilité de notre commerce extérieur ne résulte pas de la seule dépendance des recettes d'exportations des hydrocarbures mais également de la grande dépendance de la demande nationale des importations».