Le chef de l'Etat est revenu sur la dernière polémique suscitée par l'appel de certaines personnalités à l'Armée pour intervenir dans le champ politique. A l'occasion du 63e anniversaire du déclenchement de la Révolution, Abdelaziz Bouteflika, et dans un message à la nation, a déclaré, à propos de l'Armée nationale populaire (ANP), qu'elle «doit être tenue à l'abri des surenchères et des ambitions politiciennes». En rappelant «sa mission constitutionnelle de protection de nos frontières face au terrorisme international et au crime transfrontalier», le message de Bouteflika trace les lignes rouges à ne pas dépasser. Affirmant que le pouvoir se conquiert «désormais» par la voie des urnes, Bouteflika barre ainsi la route aux partisans d'un putsch militaire qui reviennent périodiquement à la charge en invitant l'institution militaire à s'impliquer dans les décisions politiques. On se rappelle de la passe d'armes entre Boukrouh et l'état-major de l'armée, en septembre dernier, après la publication de l'ancien président du PRA sur sa page Facebook d'une opinion intitulée «L'Armée algérienne: une muette qui ne veut rien entendre». Dans un éditorial-mise au point de sa revue El Djeïch, l'ANP a adressé une fin de non-recevoir aux appels pressants adressés, ces derniers temps, pour qu'elle intervienne dans le champ politique. Dans un contexte marqué par des interrogations sur la santé du président de la République et la campagne menée pour l'application de l'article 102 de la Constitution pour sa destitution, le débat sur l'implication de l'ANP dans la vie politique était revenu par la porte des contributions de l'ancien ministre. L'édito d'El Djeïch, qui s'est attaqué à Boukrouh sans le citer nommément, la qualifiant de «plume mercenaire», reprenant les déclarations du chef d'état-major de l'ANP, qui avait réaffirmé le statut de l'Armée «une armée républicaine» qui «ne se départira pas de ses missions constitutionnelles quelles qu'en soient les conditions et les circonstances» comme réponse à «tous ceux qui, en secret, ouvertement ou implicitement, réclament l'intervention de l'Armée». Quelques jours plus tard, trois personnalités nationales et politiques, Ali Yahia Abdennour et Ahmed Taleb-Ibrahimi et le général à la retraite, Rachid Benyellès, emboîtent le pas à Boukrouh, demandant à l'ANP «de se démarquer de manière convaincante du groupe qui s'est emparé indûment du pouvoir» et qui prétend avoir «le soutien» de l'institution militaire à défaut «d'accompagner le changement qui s'impose et de participer à l'édification d'une République véritablement démocratique». Par ailleurs, le président de la République a dressé un tableau noir du colonialisme, une colonisation «centenaire», «de peuplement», «d'extermination et de spoliation», «de négation», rappelant l'épisode des massacres du 8 mai 1945 qui «demeurent une barbarie infamante pour ses auteurs». Un réquisitoire sans concession des années France qui ne laisse aucun équivoque mais qui, paradoxalement, ne va pas au-delà du simple constat. Il n'est nulle trace dans le discours présidentiel d'une quelconque volonté de demander à Paris de se repentir de ses crimes contre l'humanité. Le message adressé à la nation reprend également les réalisations économiques, sociales, politiques et diplomatiques de l'Algérie depuis l'indépendance du pays et Bouteflika d'appeler à leur préservation et de faire front commun «chaque fois qu'il s'agira de l'Algérie notamment face aux multiples menaces extérieures».