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Médecins résidents-ministère: Le bras de fer continue
Publié dans Le Quotidien d'Oran le 28 - 04 - 2018

  La crise dans le secteur de la Santé s'est encore exacerbée jeudi avec l'annonce par le ministère du recours aux réquisitions pour faire barrage à la grève des médecins résidents.
Cette annonce intervient à la suite de la décision du Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra) de ne plus observer de gardes et le service minimum à partir du 1er mai prochain, une décision prise dans le prolongement de la dernière manifestation organisée à Alger, à la place Emir Abdelkader et devant le Parlement. Durant cette manifestation, le Camra a dénoncé ‘'les brutalités policières'', l'arrestation de médecins et appelé les parlementaires à réagir.
‘'Suite aux agissements arbitraires et illégaux de l'administration de l'hôpital et dans le cadre du durcissement de notre mouvement de contestation et vu la situation financière très délicate des résidents les mettant dans l'incapacité de subvenir aux frais de transports pour rejoindre leurs lieux de travail, nous vous informons que la présence des résidents dans les points de garde ne sera plus assurée à partir du 01/05/2018'', prévient le Camra dans un communiqué daté de mardi dernier. Pour contrer cette décision et obliger les médecins résidents à assurer leurs gardes et le service minimum, le ministère de la Santé a appelé les directeurs des structures hospitalières à recourir aux réquisitions des médecins résidents. Dans une instruction en date de jeudi 26 avril, la direction générale des services de santé du ministère explique aux responsables des hôpitaux publics qu'ils peuvent désormais avoir ‘'recours aux réquisitions des médecins résidents pour garantir la continuité des soins et la prise en charge des malades''.
‘'Les gestionnaires des établissements publics de santé sont tenus, si besoin est, et ce, conformément aux articles 41 et 42 de la loi précitée (90-02), d'avoir recours aux réquisitions des médecins résidents en sciences médicales qui font partie des équipes de garde, aux fins de garantir la continuité des soins et la prise en charge des malades dans le cadre de l'urgence'', précise cette instruction envoyée aux 48 directions de wilaya de la santé. La même instruction précise qu'''il appartient aussi aux directeurs de santé et de la population de wilaya et les chefs des établissements d'étudier tous les voies et moyens en concertation avec les conseils scientifiques ou médicaux et les représentants des syndicats, pour la prise en charge des malades et la continuité du service public. Toute difficulté rencontrée devra être signalée à mes services'', intime la même source.
La même instruction explique en outre qu'''il revient au chef de service de lister les postes qui doivent être absolument pourvus en élaborant le tableau nominatif hebdomadaire incluant l'équipe médicale concernée y compris les médecins résidents en sciences médicales particulièrement dans les services d'urgence et les services hospitaliers de garde et ce en sus du tableau de garde médicale et paramédicale mensuel, élaboré selon les différents cas figurant dans les textes en vigueur réglementant la garde''. L'instruction du ministère de la Santé porte le N.06 du 26 avril 2018 et est relative ‘'aux réquisitions par nécessité absolue de service et à la continuité du service public''.
Les résidents «pas concernés»
Pour autant, le Camra estime qu'il n'est pas concerné par les dispositions de l'article 38 de la loi 90-02 du 6 février 1990, invoquée par le ministère de la Santé pour obliger les médecins résidents à assurer le service minimum et les gardes. Dans un communiqué rendu public jeudi 26 avril, quelques heures après celui du ministère et parvenu à notre rédaction, le Collectif explique que ‘'nous rappelons à qui de droit que le service minimum tel que juridiquement défini par les articles de la loi 90-02 du 6 février 1990, est uniquement applicable aux seuls travailleurs''. ‘'Or, poursuit le Camra, nous ne disposons pas de la qualité de fonctionnaires, ni même celle de travailleurs salariés au sens de la loi 90-14 du 2 juin 1990''. ‘'Nous ne pouvons donc être soumis aux dispositions réglementaires ni disciplinaires du statut de la Fonction publique, ni celles de la loi 90-02''. En outre, le Camra précise dans ce même communiqué que ‘'les articles 41 et 42 de la dite loi portant réquisition des travailleurs ne concerne en rien les étudiants que nous sommes''.
Le Camra ajoute encore à l'adresse du ministère que ‘'conformément à l'article 2 de notre statut, nous sommes en formation post-graduée, et qu'à ce titre, notre responsabilité est limitée et se résume à seulement participer aux activités de soins dans un but exclusivement pédagogique''. D'autant que, ajoute le Collectif, ‘'la rémunération que nous percevons avant le gel de nos salaires n'a jamais constitué selon les autorités compétentes la contrepartie d'un service fait, qui crée des droits et des obligations aux fonctionnaires tels que prévus par le statut général de la Fonction publique''.
Le Camra rappelle ainsi que ‘'nous ne sommes donc pour l'heure selon les strictes modalités de notre présent statut que des étudiants'', avant d'appeler les autorités compétentes à mobiliser ‘'les personnels soignants titulaires de santé publique et hospitalo-universitaire''.
Les «internes» menacent
Face à l'annonce de l'arrêt total du service minimum et les gardes décidé par les médecins résidents, le Collectif autonome des internes en médecine algériens (CAIMA) a indiqué dans un communiqué qu'il pourrait ‘'recourir à un mouvement de protestation avec arrêt de toute activité hospitalière''. Il a ainsi souligné que ‘'suite à l'annonce de l'arrêt des activités de garde par -nos aînés- les résidents, des mesures de renforcement des équipes de gardes par les internes ont été envisagées''. Le CAIMA prévient ainsi que ‘'nous refusons catégoriquement les mesures de renforcement des gardes qui vont à l'encontre de nos droits et de notre formation''. Le Collectif des médecins internes ajoute que ‘'si ces mesures seront prises, nous serons amenés à recourir à tout mouvement de protestation avec arrêt de l'activité hospitalière''.
Le dernier round de discussions avec le ministre de la Santé, le Pr Mokhtar Hasbellaoui, qui a fait d'autres propositions au Camra, dont un aménagement de la durée du service civil et la prise en charge des médecins affectés dans les régions du Sud dans le cadre de ce service civil, n'a pas débouché sur une sortie de crise. Selon le Camra, les propositions faites par le ministère sont en deçà de leurs attentes, en particulier pour le service civil, qu'ils ne veulent pas supprimer, mais aménager selon les spécialités. Pour certains, il y a urgence de revoir le service civil dans le secteur de la Santé, car la nouvelle loi sanitaire est à l'APN et doit être votée mardi prochain. Or, une loi sur la Santé a une durée de vie d'au moins 20 ans et l'actuelle loi a été revue au bout de 34 ans avant son adoption par le Parlement, prévue cette semaine. Globalement, les propositions du ministère portent sur la réduction à une année du service civil dans le Sud et celle du nombre de spécialités concernées, l'attribution d'un logement et d'une prime de 20.000 à 60.000 DA, ainsi que l'aménagement et l'équipement des plateaux techniques dans les wilayas d'affectation dans le cadre du service civil, le droit au regroupement familial pour les couples de médecins, le droit à un billet d'avion par année vers les wilayas de l'extrême Sud, outre l'autorisation d'exercer une activité complémentaire dans le secteur privé. Pour nous, ‘'ces propositions sont des mesures incomplètes et on veut plus de précisions et d'engagement du ministère'', nous a expliqué un médecin résident de la wilaya de Blida.


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