Le président français Emmanuel Macron organise, ce mardi, un sommet diplomatique international sur la Libye, de trois heures, à l'Elysée, où sera discutée une nouvelle feuille de route politique pour une solution de sortie à la crise libyenne. Et, surtout, l'organisation d'élections présidentielle et législatives avant la fin de l'année. C'est, du moins, le vœu de la présidence française, qui a déjà organisé, en juillet 2017, un premier sommet, impliquant les forces militaires et politiques libyennes, mais sans grand succès, Paris ayant opté pour un soutien sans faille au maréchal Khalifa Haftar, chef de la Cyrénaïque (est libyen), qui a fait grincer des dents les autres protagonistes de la crise libyenne. Vingt pays, dont l'Algérie, en tant que pays voisin, et qui sera représentée par le Premier ministre Ahmed Ouyahia, en qualité de représentant du chef de l'Etat, vont participer à ce sommet. Celui-ci va regrouper les cinq pays membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU (Chine, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Russie), l'Italie, l'Allemagne, les Pays-Bas, l'Egypte, le Tchad, le Niger, la Tunisie, l'Algérie, les Emirats arabes unis, le Qatar, l'Arabie saoudite, le Koweït, la Turquie et Malte et quatre organisations internationales (Union européenne, ONU, Union africaine et Ligue arabe) seront représentés à Paris. En face, il y aura, réunis pour la première fois, tous les responsables d'une Libye écartelée entre seigneurs de la guerre et chefs politiques. Seront donc présents à ce sommet, côté libyen, Fayez Al-Sarraj, chef du gouvernement d'accord national (GAN), seul reconnu par la Communauté internationale, mais dont l'autorité ne s'exerce que sur la seule Tripolitaine (Ouest), et le maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de la Cyrénaïque (Est), Aguila Salah Issa, président de la Chambre des représentants, élue démocratiquement, en 2014, et repliée à Tobrouk, et Khaled Al-Mishri, président du Conseil d'Etat, une instance consultative basée à Tripoli. « Cette réunion vise à les mettre face à leurs responsabilités », explique l'Elysée. L'objectif de ce sommet est d'ouvrir la voie à des élections législatives et présidentielle, avant la fin de l'année, le dossier libyen, étant depuis le début de la présidence d'Emmanuel Macron, une priorité de la diplomatie française, indique-t-on à Paris. « Le statu quo est intenable car l'instabilité en Libye est une menace systémique pour l'Europe, l'Afrique du Nord et le Sahel », souligne l'Elysée dans un communiqué, évoquant, aussi bien la menace terroriste que les trafics de migrants. En outre, les participants à ce sommet diplomatique devront obliger les parties libyennes à s'engager à mettre en place et appliquer un processus politique, au cours duquel seront organisées des élections libres pour la désignation d'un nouveau parlement et un président pour tous les Libyens. D'autant que la campagne d'inscription sur les listes électorales a été un véritable succès avec l'enregistrement de 2,7 millions de Libyens, dont 43% de femmes, sur les 6 millions d'habitants. A cette réunion sera ainsi mise en place la nouvelle feuille de route commune sur la Libye, qui est centrée sur le processus électoral, l'élément-clé de la stratégie de sortie de crise préconisée par le chef de la mission de l'ONU, pour la Libye, le Libanais Ghassan Salamé. En la signant, les participants à la réunion de mardi s'engageront, devant la Communauté internationale. Lundi dernier à Alger, la réunion ministérielle tripartite (Algérie, Egypte-Tunisie) sur la Libye, avait, notamment, insisté sur l'application du plan de sortie de crise proposé par l'ONU. Attentes populaires, crispations politiques A l'issue de cette réunion, tenue en présence des chefs de la diplomatie des trois pays : l'Algérie, la Tunisie et l'Egypte avaient réitéré « la nécessité de la mise en œuvre du plan d'action onusien pour la résolution de la crise libyenne et d'assurer les conditions propices à son accélération. » « Tout retard dans la résolution de la crise ouvrera la voie à davantage d'escalade, de violence, de terrorisme et de conflits ». Le communiqué final de cette réunion a appelé toutes les parties libyennes dont celles influentes à « davantage de concessions pour mettre l'intérêt national au- dessus de toutes autres considérations et à réaliser le consensus national pour dépasser l'étape de transition ». En présence des principaux pays impliqués dans la crise libyenne, aussi bien ceux qui l'ont créée, dont la France, en organisant la chute du régime libyen et l'assassinat du Président Mouamar Kadhafi, que ceux qui avaient prévenu contre les effets de l'intervention militaire internationale, dans ce pays, les principaux protagonistes libyens devront valider une feuille de route, qui se décline en 8 points contre les 13 points, initialement, envisagés. Le document insiste particulièrement, sur l'organisation des élections présidentielle et législatives, et leur sécurisation, ou l'unification des forces armées. Par contre, l'ambiguïté demeure sur la nouvelle Constitution, adoptée en juillet 2017, par une mini-assemblée constituante, mais qui attend, toujours, d'être validée par un référendum. Une partie de la Chambre de Tobrouk s'y oppose en raison de certaines de ses clauses portant, notamment, sur la double nationalité d'un candidat, le maréchal Haftar et sur la durée de sa présence en Libye. Ce qui, en l'espèce conduirait à l'inéligibilité pour la présidentielle de l'homme fort de la Cyrénaïque, Haftar s'étant réfugié durant une vingtaine d'années aux Etats-Unis, fuyant le régime de Kadhafi. Un verrou important sur le chemin de la mise en place d'institutions représentatives en Libye, à commencer par l'organisation d'une élection présidentielle. Les principaux chefs politiques et militaire libyens devront, donc, lors de ce sommet, signer une déclaration qui « fixe le cadre d'un processus politique » prévoyant la tenue d'élections législatives et présidentielle, si possible d'ici la fin de l'année, un engagement, qui sera pris en présence de représentants de l'ONU, des pays voisins et de la Communauté internationale. Mais, sera également engagée « la responsabilité de la Communauté internationale » sur l'avenir de la Libye, où les choses s'améliorent sur le plan sécuritaire, en dépit des franchises terroristes qui s'y sont établies, notamment l'Etat islamique qui s'y est replié après la fuite de Syrie et d'Irak. En Libye, « il y a des attentes très fortes, dans la population, pour que des élections, notamment la présidentielle, se tiennent », souligne une source proche du sommet parisien, selon laquelle « la situation sécuritaire s'est améliorée » même si « elle reste très instable ». Le processus politique envisagé devra également, s'attacher à simplifier les institutions pour que ne subsistent qu'une seule Banque centrale et un seul Parlement, alors que le plan d'action de l'ONU prévoit, en outre, qu'un projet de Constitution puisse être soumis à référendum, ce qui pourrait repousser la tenue des élections, notamment la présidentielle, défendue par Paris, mais critiquée en Libye. Un tel report est souhaité par certains responsables libyens, qui insistent sur la nécessité de d'abord mener à bien la réconciliation nationale. Un principe défendu depuis le début de la crise libyenne, par l'Algérie.