Le Fonds monétaire international a donc lancé un nouveau warning à l'Algérie. Pour lui, l'économie algérienne, qui a un besoin urgent d'un toilettage en profondeur de ses principaux agrégats, doit mener un peu plus en profondeur des réformes susceptibles de lui ouvrir de nouveau les chemins de la croissance et de la fin des déficits. Le problème que le Fonds soulève dans sa dernière évaluation de l'état de l'économie nationale est qu'il a encore une fois montré son désaccord total avec le modèle de financement des déficits pris par le gouvernement, «la planche à billets», ou le recours au financement non conventionnel. Et le dit et le montre aux autorités algériennes: les administrateurs du Fonds «conviennent dans l'ensemble qu'il serait possible de mener un assainissement progressif des finances publiques dès 2018 sans recourir au financement par la Banque centrale, mais en s'appuyant sur une variété de mécanismes de financement, dont l'emprunt extérieur pour financer des projets d'investissement sélectionnés avec soin». La messe est dite et le FMI désapprouve ouvertement le recours du gouvernement à la planche à billets et préconise le retour tout simplement aux emprunts extérieurs, c'est-à-dire un appel clair et solennel à l'Algérie d'aller, une fois encore, s'endetter auprès des bailleurs de fonds, autrement dit le FMI, la Banque mondiale et les grandes institutions bancaires. Un remake des années 1994 avec ces jeux de mots lorsqu'il fallait expliquer aux Algériens que le pays, alors en cessation de paiement, n'a plus de souveraineté financière. La mauvaise expérience étant bien enregistrée, il reste que le recours des autorités au financement non conventionnel pour éponger la dette du Trésor et faire tourner le pays n'aura pas été le bon choix, et le FMI l'affirme, estimant qu'il y avait de meilleures voies de répondre aux déficits budgétaires. Pour autant, le «warning» du FMI n'est pas aussi déplacé qu'il ne le paraît, car les mécanismes mis en place par le gouvernement pour répondre aux graves déficits qu'a provoqués autant la dépréciation des cours du brut que la baisse de la production pétrolière algérienne ne peuvent à court terme permettre un redressement des grands agrégats et relancer la croissance. Bien au contraire, les premiers effets de cette approche, celle du financement non conventionnel notamment, c'est d'abord une aggravation des déficits budgétaire, commercial et de la balance des paiements, ensuite une inflation galopante, et donc une hausse du coût de la vie, qu'induiraient des mesures fiscales impopulaires sur les produits industriels les plus consommés. Avec, au bout de la chaîne, un désengagement progressifs des investisseurs. Cette vision des choses ne semble pas, cependant, ébranler le gouvernement qui croit d'abord en sa bonne étoile, celle qui est en train de faire monter les cours du baril de pétrole, ensuite que les chemins de l'endettement externe ont été, une fois pour toutes, obstrués. En fait, c'est le président Bouteflika qui a appelé le gouvernement à l'automne dernier à aller vers des sources de financement non conventionnelles pour irriguer l'économie nationale, en cette période de «vaches maigres», et d'éviter le recours à l'endettement extérieur. C'est un choix politique qu'il faut saluer, car il prémunit le pays contre des remèdes antisociaux qu'il faut également assumer, mais ne doit pas ouvrir la voie aux excès et se limiter à la période prescrite, c'est-à-dire trois ans tout au plus et revenir à l'orthodoxie financière. Et, dans l'intervalle, trouver les ressorts nécessaires pour renouer avec la croissance et contrôler les déficits avec de vraies réformes.