De nouveau, le scrutin présidentiel du mois d'avril prochain réoccupe le devant de l'actualité nationale, à défaut d'une actualité plus riche et plus dynamique sur les fronts économique, social et politique. Non, l'essentiel de l'actualité nationale au cours de ces dernières semaines se résume et reste médiatiquement scotché aux annonces de soutien à un 5ème mandat du président Bouteflika. Car les acteurs sociaux, syndicaux et politiques proches du pouvoir exercent une telle pression sur l'opinion publique que la prochaine élection présidentielle devient un virage politique essentiel pour l'avenir des Algériens. Après l'UGTA, le patronat, les partis de la majorité présidentielle notamment, les deux chambres du Parlement et leurs présidents, les organisations de masse, les fédérations de travailleurs, c'est au tour du P-DG de Sonatrach de se lever et déclarer le soutien de son groupe à un 5ème mandat que devrait briguer M. Bouteflika. Même si le principal concerné, qui a paru très fatigué lors des festivités du 1er Novembre jeudi dernier, ne s'est pas encore prononcé, tous ses soutiens restent persuadés qu'il est capable d'accomplir un 5ème mandat présidentiel à la tête du pays et, dans cette perspective, il y a comme un «unanimisme» ambiant qui a, pratiquement, étouffé toutes les voix contraires. Où en tous les cas cette pression quasi quotidienne exercée par les partisans d'une 5ème mandature n'est pas seulement une stratégie politique, mais laisse transparaître surtout la volonté de ses initiateurs, FLN, RND et l'UGTA en tête du peloton, de forcer la main, dans le cas d'une éventuelle hésitation, au président Bouteflika pour dire «oui» à leurs sollicitations. Certes, le chef de l'Etat est un homme de pouvoir et dans son for intérieur il veut poursuivre son «œuvre» au-devant de laquelle se présentent la sécurité de l'Algérie, la réconciliation entre Algériens et la relance du développement économique et social. Pourtant, cet angélisme est loin d'être le seul objectif qui fait marcher toutes ces voix autour du soutien à une candidature, qui reste pour le moment tributaire de beaucoup de paramètres, au-devant desquels celui de la santé du chef de l'Etat. Et c'est pratiquement sur ce point que l'opposition à un dernier mandat présidentiel de M. Bouteflika cristallise son argumentaire, estimant que l'article 102 de la Constitution doit être plus que jamais appliqué et le président du Conseil constitutionnel prononcer, après une réunion de ses membres, le cas d»'empêchement». Ce n'est là pas seulement la position des partis d'opposition, mais également celle d'intellectuels et autres activistes d'ONG qui veulent et réclament un changement radical dans le mode de gouvernance du pays. Pour les plus «patriotes» de ces courants opposés à un 5ème mandat du président Bouteflika, il y a assez de compétences au sein des partis politiques, qu'ils soient de la coalition présidentielle ou des autres formations, ou au sein de la société civile pour désigner des candidats capables de prendre la relève. En cela, ces courants politiques ne veulent rien moins qu'appliquer les conseils du chef de l'Etat pour qu'il y ait une effective passation de pouvoirs entre les générations, entre celle du 1er Novembre et celle de demain. Car en réalité cette insistance des partis puisant leur légitimité de la guerre de libération à demander au président Bouteflika de «poursuivre son œuvre» est un effroyable désaveu de tout ce que celui-ci prône pour l'émancipation de la jeunesse, son épanouissement et le passage de témoin de la génération de Novembre.