Bouteflika et son équipe ne cachent pas leur addiction au pouvoir. Ils ne veulent pas partir, même si nous ferons le tour du monde à la marche. Dieu, que le pouvoir a l'oreille dure! Ainsi, après la provocation du 5ème mandat via une parodie d'élection, celle du cinquième mandat au moindre frais: un décret pris par son auteur pour lui même, signé par lui-même envers et contre un peuple jusque-là généreux dans sa «révolte», clément dans son offre à ce pouvoir et son système à qui il demande de partir sans rancune. « Vous nous chassez par la porte, nous revenons par la fenêtre» disent Bouteflika et son équipe qui s'adonnent à un jeu de cache-cache avec le peuple pour le mener, comme à son habitude, à des impasses encore plus compliquées, plus infranchissables. Ce n'est ni honnête, ni intelligent et surtout pas plaisant du tout que de fermer le jeu politique en subtilisant la cartes - atout, en trichant, en mentant. « Il n'y aura pas de 5ème mandat et il n'en n'a jamais été question pour moi « dit Bouteflika qui a déposé sa candidature avec cinq fourgons remplis de cinq millions de signatures-parrainage en direct à la télé. Qui a changé en une semaine de directeur de campagne électorale et écrit une lettre, le 3 mars, à partir de l'hôpital de Genève pour confirmer sa candidature à l'élection. Le flagrant-délit de mensonge est avéré. Du coup, tout ce que diront ce pouvoir et ses porte-voix manquera de crédibilité, de sincérité, soulèvera la méfiance et le rejet. « On peut mentir une fois à tout le monde, on peut mentir tout le temps à une personne, mais on ne peut mentir tout le temps à tout le monde» dit l'adage. Le divorce avec le pouvoir et son système est consommé, ne reste que les formalités et conditions de libérer la jeune Algérie de ce mariage forcé avec un système vieux depuis 1962. Est-il possible que ce pouvoir accepte une séparation à l'amiable, sans cris et sans violence? L'inquiétude que les frais soient élevés n'est pas exclue. Bouteflika et sa clique ne partirons pas aussi facilement. Ils s'accrocheront, ruseront, mentiront les yeux dans les yeux, jusqu'au bout, jusqu'à nous faire payer le prix de notre irrévérence envers leur seigneurie. Voyez-les changer de masque et de veste, faire la victime éplorée, déclarer leur flamme à ce pays qu'ils ont maltraité si longtemps et si impunément. Ils font mine-basse, s'approchent du peuple, lui parle comme un ami, une connaissance de longue date et échafaudent dans le secret leurs plans pour garder les clés de la maison Algérie et certainement pour se venger de ce peuple qui ose leur disputer les lieux. «Le diable se cache dans les détails» dit un autre adage. La lettre -programme du président de ce 10 mars ne se gène même pas de détails. Elle est claire, nette, sans détails justement: elle remporte l'élection du 5ème mandat en reportant l'élection. Sans frais, sans efforts et sans l'urne. Avec une simple signature d'un décret chez lui. Bouteflika nous dit : « puisque vous ne voulez pas de cinquième mandat pour moi par la voie des urnes, je m'élis moi même, tout seul et je reste donc votre papa ne serait-ce qu'une année ou deux de plus». C'est ce qu'il dit et c'est ce que nous devons croire et accepter comme depuis 1962. Autrement dit, ce pouvoir et son système qui ont amené le pays à l'échec s'engagent à le faire réussir rapidement en organisant cette fameuse période de transition. « On ne peut résoudre un problème avec le même mode de pensée que celui qui a généré le problème» à dit, pour le coup pas un adage, mais Albert Einstein dont on ne peut douter de sa pertinence scientifique. Garder la vieille garde du gouvernement, les mêmes conseillers à la présidence, ramener d'autres du banc de touche de l'antichambre de la présidence, tout cela ne prête pas au jeu, ne change pas la nature du match. Cela veut dire que l'Algérie ne dispose pas de compétences, de femmes et d'hommes capables de gérer la période de transition, de se doter d'une constitution moderne et démocratique, d'organiser des élections, enfin de libérer le pays de cette fatalité du « nous ou le chaos». A l'oppression et l'affront de ce système et ses hommes, s'ajoutent le mépris et l'arrogance. C'en est trop! Cela ressemble beaucoup à des menaces sur la paix dans ce pays et c'est très grave. Parce que ce pouvoir pousse le peuple à un duel dans la rue. Il dispose de la force croit-il, oubliant la furie et les forces d'un peuple blessé, décidé à en finir avec ces «chaînes» qui le pèsent et l'empêchent de vivre, d'être heureux. Machiavélique dans sa nature, ce pouvoir est capable de pousser au pourrissement la situation jusqu'à faire déraper le mouvement pacifique des citoyens vers l'irréparable, vers la violence. Il en rêve peut-être, pour ensuite évoquer des raisons sécuritaires pour préserver les institutions et la paix au pays et donc, garder la main encore longtemps. Ce n'est pas être alarmiste que d'évoquer l'éventualité d'un dérapage provoqué par ce pouvoir et ses soutiens. C'est un risque à prendre en considération par les millions de citoyens qui appellent depuis des semaines, des mois et des années à plus de justice, de dignité et de liberté. « Pacifique! Pacifique!» crie le peuple dans les rues. L'instinct populaire connait la nature violente de ce pouvoir et son penchant pour la répression. Il a brandi dès le départ son mot d'ordre principal: « Pacifique! Selmia!». Et il n'a pas tort, tant son corps porte encore les stigmates des marches du passé. Que va-t-il se passer les jours et semaines à venir? L'équipe qui gouverne sent-elle les appels au divorce de la rue? Entendra-t-elle raison pour ne pas gâcher le consentement proposé par le peuple? La crainte est qu'elle persistera dans son aveuglement et persistera dans le déni et le mensonge en manigançant pour assurer la «continuité» de ce système qui agonise, sans aucun sentiment de compassion pour l'avenir du pays. Bouteflika et son clan feront, dans ce cas, état de leur totale inconscience et de leur obsession du pouvoir. Ils assumeront leur irresponsabilité. Le peuple, lui, a pris sa responsabilité et signé devant le tribunal de l'Histoire. Bouteflika a dit, a avoué son intention de ne pas céder les clés du pays, dussions-nous marcher autour du monde. Ca a l'avantage d'être clair.