Ceux qui pensaient que l'Algérie allait subitement changer avec son départ doivent revoir leurs copies. L'Algérie ne sera pas plus propre ni plus agréable à vivre sans lui. La corruption, les passe-droits, le clientélisme sont toujours aux postes de responsabilité, mais c'est un début d'espoir de croire que les choses vont évoluer, que demain sera plus clément et que la justice fasse, enfin, son job. Les informations sur l'imminence de poursuites judiciaires contre des oligarques de premier plan restent toujours un pas vers l'assurance et peuvent supposer d'une nouvelle orientation dans la gouvernance, loin d'un effet d'annonce ou d'un sacrifice rituel par excès de populisme pour calmer la foule. Première journée passée sous le ciel d'une Algérie débarrassée du Clan ? Reste à voir et à analyser les événements à venir d'autant plus que cette démission n'est qu'anecdotique, dans les annales du Mouvement populaire qui a toujours revendiqué, non pas le départ d'une personne physique mais la chute d'un système de gouvernance qui aura mis et le peuple à genoux et le pays à mal. La démission de Bouteflika ne doit pas être perçue comme une victoire finale ni être revendiquée par un quelconque pouvoir, aussi puissant et influent soit-il mais il est le fruit d'une revendication nationale, soulevée par des millions de paires de jambes qui ont marché, inlassablement, vendredi après vendredi, ainsi que les autres jours pour dénoncer l'omnipotence d'un régime autocratique, népotique et ploutocratique. Bouteflika est désormais hier, et aujourd'hui commence le combat pour une deuxième République, si d'aventure on en avait une première. Aujourd'hui, il est attendu des Algériens de continuer à croire dans leur dynamique, de faire confiance à leurs mollets pour les porter vers demain où ne subsistera aucune trace de l'ancien temps. Le monde nous regarde et attend cette transition qui doit être gérée par ce peuple, dans le calme et la transparence. Et il est du devoir national de répondre aux aspirations des Algériens qui ne veulent pas d'une transition aux mains des complices institutionnels du régime. Hier, le Conseil constitutionnel s'est réuni pour constater la vacance du poste de la présidence de la République, autant dire une formalité administrative qui doit ouvrir la porte sur une nouvelle ère, pour peu que les mêmes hommes qui ont failli dans leur gestion, ne soient pas ceux qui vont construire le pont pour nous mener vers la rive du salut. Il est clair que dans l'absolu, le maintien ou non du nouveau gouvernement Bedoui est un indicateur de choix dans l'orientation qu'on compte donner au hirak' puisque, et selon le dernier message de l'état-major de l'ANP, il est le fruit de forces anticonstitutionnelles. Cette étape est donc cruciale dans la configuration de la transition qui s'annonce délicate dans un contexte d'extrême tension où la rue n'a pas encore dit son dernier mot.