L'opposition populaire à la tenue du scrutin présidentiel du 12 décembre prochain ne se démentant pas comme l'attestent les marches hebdomadaires du Hirak et des étudiants dont l'ampleur de la mobilisation semble connaître un regain à l'approche de l'échéance électorale, le pouvoir cherche à retourner contre elle la stratégie de l'occupation de l'espace public et de la rue qui lui permet d'apparaître comme défendant une cause et une revendication que l'ensemble de la population partage et soutient. Cela est devenu patent avec les marches pro-élection présidentielle qui se sont produites ces derniers temps dans quelques villes et localités du pays. Mais s'il est de « bonne » guerre que le pouvoir essaye de démontrer que cette population est divisée sur l'attitude à avoir sur sa démarche et mobilise à cet effet ses partisans, sa tactique ouvre la voie à un engrenage dont le péril est la confrontation qui peut en résulter entre citoyens. Pour l'heure, les démonstrations de rue des uns et des autres ne se télescopent pas en terme d'horaires et de jours et leurs protagonistes se contentent d'échanges à distance. Mais cette ambiance « silmia » dont est empreinte l'occupation de la rue risque de céder la place à une volonté d'en découdre dont la tentation n'est absente ni chez les partisans activistes de l'élection présidentielle ni chez ceux du Hirak. La campagne électorale dont le coup d'envoi est imminent s'annonce de ce fait comme un moment où cette tentation va avoir prétexte à se traduire en actes. Bien évidemment pour le Hirak, les manifestations pro-élection présidentielle qui tentent de le faire apparaître comme non représentatif d'une opinion populaire unanime ne sont pas « spontanées » et il y voit la main du pouvoir ayant échoué à briser sa dynamique par l'intimidation et l'embastillement de ses militants et activistes. Il est vrai que ces marches se produisent très certainement à son instigation avec le calcul qu'elles finiront par sortir sa base sociale de la léthargie dans laquelle l'a plongée le mouvement populaire qui s'est insurgé contre le projet humiliant du 5ème mandat et a obtenu la déchéance de son postulant et l'incarcération des principaux symboles de son régime. Ce que voyant, le Hirak pourrait être poussé à se radicaliser et à disputer à cette base du régime l'occupation de la rue. Ce qui procurera par là même l'occasion et la justification au pouvoir d'entreprendre contre lui plus que de l'intimidation à laquelle le cantonnaient ses manifestations pacifiques. Pour autant et dans ces conditions, quelle valeur et quelle crédibilité revêtirait l'élection présidentielle dont il mène tambour battant les préparatifs et qu'il présente comme étant la solution voulue par la population à la crise politique dans laquelle se débat le pays ? Ce n'est certainement pas en poussant les Algériens les uns contre les autres que le pouvoir offrira à cette élection le climat qui convaincra qu'elle offre effectivement l'opportunité d'un règlement pacifique et consensuel de la crise politique.