En plein mois d'août, propice aux congés de détente, la scène nationale enregistre la naissance d'un mouvement qu'on présente sous l'angle apolitique sous la marque « Forces nationales de la réforme ». Il s'agit selon ses initiateurs, qui viennent de divers horizons politiques, de syndicats nationaux, d'associations, d'organisations économiques et de personnalités, d'une démarche nationale en vue de «concrétiser des réformes profondes réelles traduisant la volonté populaire pour le changement». Un tel titre ou projet pourrait-il échapper à l'étiquette ou l'ambition politique ? Difficile de le croire, même si on plaide ouvertement pour un dialogue économique et social, mettant le politique out. Mais, on n'aurait certainement pas caché l'essence politique de cette démarche s'il y avait de la politique derrière, et qui prendrait dans ce sens la forme d'une large coalition de partis et d'autres représentants d'associations et de syndicats, qui devrait forcément, dans cet esprit, faire montre de son opposition ou de son alliance au pouvoir en place. En tout cas, ceux qui ont mis sur pied cette initiative tiennent à souligner qu'elle aspire à «garantir un cadre aux forces nationales intègres et fidèles aux constantes nationales, qui croient profondément en la transition démocratique et au processus constitutionnel, à la protection des acquis du Hirak populaire, à la concrétisation de ses aspirations, à l'immunisation de l'identité de la Nation et au renforcement de l'unité nationale». Les parties prenantes de l'initiative, où sont représentés les partis de deux ex-candidats à la présidentielle de décembre dernier, en l'occurrence les partis El Moustakbal et El Bina, ainsi qu'un troisième parti, El-Fajr El-Jadid, font savoir qu'elles comptent, pour la réalisation de ces objectifs, recourir à tous les moyens pacifiques, prévaloir les débats et la communication sur les questions qui préoccupent la scène nationale et contribuer à relever les différents défis que confronte le pays. D'où l'on devrait bien exclure le défi politique, si l'on se fie au caractère apolitique de la démarche. De nombreuses interrogations sont également soulevées par les observateurs dans ce sillage, notamment au sujet de l'absence des partis FLN et RND, qui n'auraient pour rien au monde raté un tel évènement pour se remettre en selle s'ils en avaient l'opportunité. Est-ce à dire que ces deux derniers partis sont devenus persona non grata' ? Immanquablement, la suite des nombreux évènements, hautement politiques, ceux-là, attendus sur la scène nationale dans les prochains mois, notamment le référendum sur la nouvelle Constitution, vont confirmer ou infirmer cette supposition. En tout cas, les initiateurs des « Forces nationales de la réforme » ne ferment pas la porte à d'autres participants, sans couleur politique, appelant dans ce contexte tout un chacun à contribuer à la dynamique du changement « réel et sûr ». L'exercice politique en berne depuis l'avènement du « Hirak », incapable de répondre aux préoccupations de l'heure, a-t-il besoin de se laver de tous les affronts passés et présents, se refaire une virginité pour jouer le rôle qui lui échoit dans l'édification du pays, ou devrait-on y faire dessus une prière ?