Un dense remous bouscule l'esprit quand chaque fin d'année, l'éphéméride est établie pour comptabiliser la mort récente des personnes connues. Dans la proximité et dans l'éloignement, connaissances locales ou célébrités internationales, leurs disparitions récentes provoquent en chacun de nous un curieux sentiment de perte de quelque chose en nous pour presque réveiller un penchant égoïste. Une drôle de compassion qui ne serait d'abord soumise qu'à notre propre émoi. Presque comme un son de tocsin et même une alerte pour indiquer que l'immortalité est une fadaise. L'amour ou l'attachement à la vie enjoignent tout le monde à s'attacher à des profils humains connus dans un besoin puéril d'ignorer les cimetières pour que la mort soit une fatalité très éloignée. Parfois, une petite folie caresse une approche insensée pour laisser croire que l'on ne cessera pas d'exister, alors que l'existence n'a de vrai sens que quand elle charrie la mort que l'on ne peut éviter. Raquel Welch, Tina Turner, Harry Belafonte, Pelé, Kissinger, Khaled Nezzar, des noms cités au hasard, font partie d'une longue liste de disparus cette année qui, elle aussi, s'éteint. Un pan de notre propre vie dégringolant au fil des années pour rappeler la vulnérabilité humaine et surtout nous imposer à chacun une rétrospective de son existence pour se surprendre à comprendre que même les célébrités ont une fin. La leur devient alors la nôtre. C'est de ce sentiment que naissent notre déroute et notre compassion. Le cimetière devient si proche et l'inconnu si pressant. Chaque génération a sa toile de fond que des indéfinissables coups de pinceaux retouchent à la guise des événements et des expériences. Celle qui s'en va écorche en disparaissant un tableau de vie de référence pour qu'en s'érodant, il cède sa place à un autre tableau.