« On se connaît bien, c'est un ami, on a échangé des propos sur les moines mais il ne m'a pas fait part d'une bavure de l'armée algérienne. Je ne sais pas à quelle date il a pu recueillir ses informations (..) a ainsi avancé l'ancien chef de la DGSE à Alger.» Nouveau rebondissement dans l'enquête judiciaire en France sur l'assassinat des moines de Tibéhirine. Le gouvernement français cacherait des rapports classifiés sur le dossier, selon des informations publiées ce lundi 28 mars par le site internet Mediapart. Ce dernier a pu consulter le procès verbal d'audition de l'ancien chef de poste à Alger des services secrets français, la DGSE, Pierre Le Doaré. Interrogé le 15 mars dernier par le juge Trevidic, celu -ci, en poste à Alger de 1994 à juin 1996, indique que seules des notes de synthèse de la DGSE rédigées depuis Paris lui avaient été communiquées par les autorités françaises, alors que l'antenne d'Alger de la DGSE avait produit plusieurs rapports « à chaud » sur l'affaire des moines de Tibéhirine.En fait, durant son audition, Pierre Le Doaré a été confronté aux documents déclassifiés ces derniers mois par le gouvernement français. Parmi eux, il n'y en avait aucun de ceux qu'il avait lui même rédigés à l'époque depuis Alger mais simplement ceux qui ont été rédigés à Paris. Parmi ces documents, il y a, selon Pierre Le Doaré, le rapport qu'il a rédigé après avoir rencontré un émissaire du GIA le 30 avril 1996 à l'ambassade de France à Alger venu lui apporter une preuve de vie des moines et un message de Djamel Zitouni, l'émir du GIA. Selon des informations recueillies par le juge, l'émissaire en question serait Mustapha Abdallah, un ancien agent de l'ambassade de France à Alger, mais Pierre Le Doaré n'a pu confirmer son identité.Ce nouveau témoignage, s'il confirme l'absence de transparence des autorités françaises dans ce dossier, n'apporte aucune nouvelle information sur la mort des moines de Tibehirine et les responsables de leur assassinat. Pierre Le Doaré a cependant affirmé que le général Buchwalter ne lui a jamais parlé –alors qu'ils étaient tous les deux en poste à Alger– de la thèse de la bavure de l'armée algérienne à l'origine de la mort des sept moines. Le général en question a affirmé au juge Trevidic, le 25 juin 2009 que les moines français avaient été tués lors d'une bavure de l'armée et non pas par le GIA. « On se connaît bien, c'est un ami, on a échangé des propos sur les moines mais il ne m'a pas fait part d'une bavure de l'armée algérienne. Je ne sais pas à quelle date il a pu recueillir ses informations. Je suis parti à la fin du mois de juin. Il y a eu une période de deux ou trois semaines de passation de consignes. Je ne sais s'il m'aurait donné cette information dans l'hypothèse où il l'aurait eue alors que j'étais encore présent », a ainsi affirmé M. Le Doaré. Mais visiblement, lui aussi met en doute la thèse officielle. « Normalement, le GIA égorge. Quand on coupe la tête, ça veut dire qu'on n'ira pas au paradis », a t il ainsi avancé.