Le tribunal correctionnel d'El-Affroun (Blida) a condamné lundi les PDG de l'OAIC et du Groupe SIM à respectivement deux années de prison ferme et un an de prison avec sursis dans une affaire de passation de contrats non conformes à la reglementation et dilapidation de deniers publics. Ces deux responsables ont été condamnés également à verser respectivement 100.000 DA et 50.000 DA d'amende. Cette affaire a fait objet d'une enquête ouverte en 2007 suite à une lettre anonyme faisant état d'irrégularités dans les marchés accordés au groupe SIM.Inculpé avec douze autres personnes, cadres et ex-cadres de l'OAIC (Office algérien interprofessionnel des céréales), par le tribunal d'El Affroun pour passation de marché contraire à la réglementation, dilapidation des biens de l'Etat, écarts de poids.Le président-directeur général du groupe SIM (Semoulerie industrielle de la Mitidja), l'un des plus importants en Algérie dans le secteur de l'agroalimentaire, est depuis des semaines sous contrôle judiciaire.L'enquête sur cette affaire, qui a duré huit mois, vient d'être achevée et une expertise judiciaire est en cours pour déterminer le préjudice causé à l'office par les «largesses» accordées par ses responsables depuis 2003. Pour les réductions sur le prix du blé dur, le montant s'élève à 8 milliards de centimes, selon une première estimation. La cellule de recherches de la Gendarmerie nationale a entendu 113 personnes dans cette affaire, dont 37 responsables de l'OAIC : le P-DG, le directeur de la régulation et de la distribution, le DFC, le directeur du commerce extérieur et l'ex-directeur régional centre ont été inculpés. Deux ex-directeurs ainsi que l'actuel de le CCLS d'El Affroun ainsi que le directeur du service de qualité, le chef de service gestion des stocks et le chef de service transit ont été inculpés. D'autres responsables de la Société de transport ferroviaire des céréales, tels que le P-DG, le DFC, le DC et les 3 chefs de gare de Blida, d'El Harrach et de Gué de Constantine, ont été auditionnés avec des responsables des unités de Rouiba, de Khemis Miliana et du port d'Alger.En parallèle, d'autres enquêtes ont été menées sur la fortune accumulée en un temps record par certains inculpés dans cette affaire. Selon nos informations, c'est le cas notamment pour le directeur général de l'OAIC qui devrait sûrement expliquer les signes extérieurs de richesse ne s'accordant pas avec son niveau social. C'est ce directeur général de l'OAIC -félicité par son ministre par le biais de la presse le jour même de sa mise sous contrôle judiciaire- qui a décidé de la réduction du prix du blé dur vendu au groupe SIM. Une réduction qui paraît à première vue insignifiante : 2 à 3% du prix initial du quintal (entre 50 et 150 DA par quintal). Mais qui reste importante si on précise que ce groupe était le meilleur client de l'office régional de Blida avec des marchés atteignant les 5 milliards de centimes par semaine ! L'OAIC est un EPIC (Etablissement public à caractère industriel et commercial) et selon le décret qui le régit, le prix du blé dur est libre alors que celui du blé tendre (subventionné par l'Etat) est fixe. Le décret fixe également pour l'office, qui importe le blé des deux catégories, la vente du blé tendre aux minoteries par un système de quotas selon la capacité de trituration de chacun. Durant une période de quatre années, selon des informations proches de l'enquête, SIM a bénéficié d'une réduction du prix du blé dur auprès de l'OAIC chez lequel il s'approvisionnait à hauteur de 50%. Le groupe SIM était au début le seul bénéficiaire de cette réduction, avant que l'opération ne soit généralisée à l'ensemble des clients dans différentes régions du pays. Mais cette mesure semble, en réalité, n'avoir été bénéfique que pour ce groupe, détenteur de plus de 30% du marché national (semoulerie et pâtes), puisque, durant la même période (2003-2007), les propriétaires des autres minoteries n'ont pas pris d'assaut les coopératives de l'OAIC pour une plus grande acquisition de blé. L'importation de blé dur étant libre, il semblerait que les gestionnaires des autres minoteries préféraient s'adresser aux importateurs privés qui pratiquaient des prix similaires à ceux de l'OAIC mais offraient un délai de paiement plus important (jusqu'à 90 jours, alors que l'OAIC exige le paiement de ses factures au bout d'une dizaine de jours). C'est du moins les explications données par certains inculpés lors de leur audition par les éléments de la cellule de recherches de la Gendarmerie nationale. Ces derniers ont même soutenu que dans la perspective d'une crise sur le marché international à la veille de l'éclatement de la guerre d'Irak, le gouvernement algérien avait décidé d'importer des quantités importantes de blé (stocks de sécurité) qui ont largement dépassé les capacités de stockage locales.Selon leurs explications, la CCLS s'est retrouvée, après l'ouverture au privé d'importer le blé, avec des stocks très importants car elle n'aurait pas trouvé preneur chez les meuniers nonobstant les opérations de forcing qu'elle aurait réalisées auprès d'eux. D'un autre côté, il aurait accordé au groupe SIM une certaine «largesse» dans les quotas de blé tendre alors que ces derniers sont fixés par l'Etat et ne devaient, à cette époque, en aucun cas dépasser les 50% de la capacité de la minoterie. Il s'agit là d'une instruction, signée par Ahmed Ouyahia en 2004, qui précisait que chaque moulin a droit à 50% de sa capacité de production. Concernant ce volet, l'enquête avait démontré que SIM bénéficiait jusqu'à 180% de blé tendre au moment où les autres meuniers recevaient bien moins, mais aussi de quotas doublés, à partir de la Coopérative des céréales et des légumes secs (CCLS) de Blida et celle de Khemis Miliana uniquement pour le moulin de Aïn Romana à Mouzaïa. Mieux, les enquêteurs ont découvert que le groupe SIM avait déclaré auprès de l'OAIC une capacité de trituration de 950 tonnes/jour alors qu'en réalité cette capacité ne dépassait pas les 600 tonnes/jour. L'OAIC n'aurait pas effectué de visite technique comme le prévoit son règlement, selon les informations