« Si ton Seigneur l'avait voulu, tous ceux qui sont sur la terre auraient cru. Est-ce à toi de contraindre les gens à devenir croyants? » Sourate 10 YŪNUS - (JONAS) verset 99 « Nulle contrainte en religion! Car le bon chemin s'est distingué de l'égarement. » Sourate 2 AL-BAQARAH (LA VACHE) verset 256 Ils étaient irrémédiablement convaincus du bien fondé de leur mission sacrée car ordonnée directement par Dieu lui-même : "(deus vult) " Dieu le veut ! Telle était la devise de ces premiers Croisés qui constituèrent la première coalition qui se donnera pour tâche d'aller rééduquer le Sarrazin. Il est stupéfiant de constater certaines similitudes fort instructives et qui doivent donner à réfléchir. Avant la croisade de l'illuminé Georges Busch et ses massives campagnes de propagandes mensongères et fallacieuses, ces fameuses croisades médiévales ou ces croisières puisque elles s'étaleront de l'an 1095 à 1291, mettront le cap sur une contrée qui ne cessera jamais d'obséder les esprits et de susciter les convoitises. Cette coalition invoquera comme alibi le devoir sacré de pacifier les alentours du Saint sépulcre, de sécuriser les interminables randonnées pédestres des pèlerins vers cette terre de sainteté et de damnation et surtout de débarrasser les parages du fléau Sarrazin qui préfigurait déjà ce que nous pourrions appeler aujourd'hui le « Péril vert » ou la « Menace islamiste ». Fléau hélas toujours omniprésent, selon nos braves néoconservateurs. Péril latent, dormant, quiescent, qui prendra sans cesse des formes volubiles, dynamiques et itinérantes, tel de la cuscute, une nébuleuse qui excelle dans la palingénésie et la pollinisation. Lorsque Francis Fukuyama avait essayé de décrire en quoi consisterait cette fin de l'histoire où son « Dernier Homme » devait en principe, après tant de pérégrinations et de déboires, marquer une pause et opter pour un choix de vie plutôt convenable et confortable ( Libéralisme politique et économique) qui devait susciter un engouement général , le philosophe était loin de se douter qu'allait apparaitre ,immédiatement après une décolonisation assez coûteuse et houleuse, une ribambelle de sadomasochistes stoïques qui voudraient forcer l'histoire à rebrousser chemin : Nos irréductibles islamo-terroristes. Chose assez bizarre et incompréhensible encore pour beaucoup de spécialistes-devins, c'est à ce moment là donc qu'on verra la légendaire « Al-Qaïda » venir réfuter toutes les thèses des plus grands philosophes du Monde qui pensaient que le cerveau de cet « Homo œconomicus » était inconditionnellement programmé pour se focaliser sur la conservation de sa propriété (Locke), ou la préservation de sa vie (Hobbes). Fort malheureusement nous sommes aux antipodes de ces optimistes prédictions. Le consumérisme béat et festif s'avère incapable d'émousser les sens de cet Islamisme nihiliste et insolite qui ne semble rien vouloir hormis faire du chahut et ralentir la glorieuse marche de cette unique civilisation en dehors de laquelle, tout le monde serait d'accord, rien ne peut subsister. Et pourtant la majorité des arabes et des musulmans font partie de cette même et unique civilisation et demeurent eux aussi étonnés et incapables de déchiffrer les réelles motivations de ces hordes préfabriquées qui veulent replonger le monde dans la préhistoire. Et même lorsque les Etats-Unis, assez fréquemment, n'hésitent guère par certains de leurs agissements péremptoirement condamnables, à basculer allégrement dans le club de ces états voyous ou de cet axe du mal contre lesquels ils tentent vainement de mobiliser la planète entière, il reste quand même aux arabes et aux musulmans assez de bon sens pour ne jamais cautionner l'idéologie et les aventures de ces forces islamistes nihilistes folkloriques surmédiatisées. Néanmoins, il est assez curieux de constater que chaque fois que ce Djihadisme incongru et saisonnier disparait quelque part après avoir semé le chaos souvent parmi les siens, des forces obscures s'arrangent pour le faire réapparaitre ailleurs, ces mêmes forces qui lui ont balisé les sentiers de la perdition. «On a vu souvent rejaillir le feu d'un ancien volcan qu'on croyait trop vieux. Il est paraît-il des terres brûlées donnant plus de blé qu'un meilleur avril. » Même notre cher politologue Gilles Kepel avait lui aussi péremptoirement annoncé le déclin de cet islamisme politique considérant que celui-ci « était désormais devenu un monument historique daté, dépassé et rejeté et non plus une utopie porteuse d'avenir.»(1) Son confrère, Olivier Roy conclura dans le même sens en parlant de cette subversion intermittente : « le problème du soulèvement ne prend pas place dans la temporalité de l'histoire, mais dans celle du rituel, donc de la répétition...le sens de la révolte n'est pas la réalisation de l'utopie mais de faire tomber l'illusion et les illusions du pouvoir. »(2) En d'autres termes, il serait honnête aujourd'hui, pour nos Etats terriblement défaillants, incapables d'engager de sérieuses réformes politiques et sociales pérennes (car trop soucieux de régner dans la durée indéterminée) d'admettre que c'est nous même qui favorisons la résurgence de ces nihilismes susceptibles à l'avenir d'emprunter des voies plus sournoises, moins ostensibles, moins exubérantes mais tout aussi insensées que ce que nous a habitué à voir cet islamisme politique suicidaire. On aurait jamais imaginé que l'histoire marcherait à reculons et surtout depuis que Mustafa Kemal Atatürk avait fait nettement sentir aux uns et aux autres, et bien avant Fukuyama, que le Califat dans ses phases les plus perverses était inéluctablement condamné à disparaître pour laisser place à une nouvelle organisation politique, économique et sociale où chacun trouverait son compte. Alors, venir aujourd'hui nous présenter comme une menace apocalyptique un fatras d'épouvantails qui prétendent reconstituer un Califat, c'est carrément de la téléréalité de mauvais goût. Pour en revenir à ces fameuses croisades d'antan et à l'amalgame que l'on essaye chaque fois de distiller dans les esprits des gens, essayons plutôt de nous rappeler ces fastueuses périodes où musulmans, chrétiens et juifs vivaient en très bonne intelligence et que c'étaient plutôt les prétendus agissements de certains Seldjoukides qui suscitèrent l'ire des premiers Croisés , alors que l'histoire fourmille de chroniques où la paix et l'harmonie entre chrétiens, musulmans et juifs n'était pas un mythe mais bel et bien une réalité aisément accessible si de part et d'autre. Nous cessions un jour d'attiser cette maudite culture du bellicisme congénital en érigeant les murs de la haine et de l'intolérance. Ayons aussi l'honnêteté d'admettre que l'incommensurable profit (économique, culturel et scientifique) que ces croisades transbahuteront en Europe sera pour certains un sérieux mobile pour faire perpétuer ces conflits hautement rentables pour l'occident et assez dévastateurs pour ces régions où l'on essaye toujours de mater le Sarrasin : en Irak, en Afghanistan, en Syrie, en Palestine...peut-être en Afrique du nord et partout ailleurs où il y aura toujours des principautés giboyeuses à sous-traiter. Chacun pourra aisément prendre conscience que ce vaudeville politico-religieux extraordinaire fait de méprises, de préjugés et de desseins machiavéliques ne semble guère s'estomper en dépit de la mondialisation du savoir et de la vérité. Il y a l'Islam des Lumières, du dialogue et de la tolérance, des coexistences pacifiques et fécondes, de l'humanisme et du partage universel, celui qui un jour, au moyen de ses sciences avancées et de ses philosophes, a permis à l'occident de s'affranchir de ses torpeurs moyenâgeuses. Et bien entendu il y a ce pseudo islam piégé dans les ténèbres, confisqué par des terroristes et des hommes de mauvaise foi. Tout comme en Occident , il y eut des empires coloniaux qui ont commis des atrocités indescriptibles , des multinationales qui ont pillé , ravagé et dévasté la planète et qui continuent à le faire , il y eut aussi un siècle des lumières où une pensée humaine clairvoyante a légué à toute l'humanité un besoin et un art de vivre basés exclusivement sur le respect de l'autre , une fraternité humaine portée par des philosophes, des hommes de Loi , des philanthropes qui ont consacré leur vie et leur génie afin d'affranchir l'humanité de toutes les formes d'oppression et de servitudes. Qui serait assez insensé pour imaginer un seul moment que l'ensemble de ces sacrilèges et monstruosités commises çà et là par ces bandes d'assassins qui se réclament de l'Islam s'inscrit en droite filiation de L'Islam des premiers califes, d'Al-Ma'mûn et de beaucoup d'autres. L'Etat islamique est une attraction, un paravent et une ingénieuse opération de diversion pour nous tétaniser et maintenir nos esprits dans un état hallucinatoire chronique dans le seul but de retarder notre réveil, notre éveil et l'essor de nos nations et masquer le pillage de nos richesses. Chaque otage assassiné implique le redéploiement d'une présence militaire, celle du Bled ou celle des autres. C'est une véritable course contre la montre. L'occupation du terrain, une simple notion de territorialité, réflexe avisé aussi vieux que le monde. Pour les malheureux sept moines de Tibhirine (et ce sera toujours sept victimes innocentes de trop) assassinées dans des circonstances au sujet desquelles une enquête est toujours en cours du côté français, il y aura 200.000 victimes algériennes. Pour l'assassinat d'Hervé Gourdel, (et ce sera toujours et chaque fois une autre victime innocente de trop) il régnera en Kabylie pendant plus de dix années une période terriblement malsaine où des dizaines d'otages innocentes seront kidnappées et assassinées dans l'indifférence la plus étonnante. C'est dire que cet Islamisme de pacotille n'a jamais menacé l'occident, bien au contraire, il a toujours été un fléau pour l'Islam et les Musulmans eux mêmes. Mettez une kalachnikov entre les mains d'un barbu, habillez le en noir et faites lui vociférer «Ellah akbar» et vous aurez réussi à alimenter les plus grands business au monde : 1)-La vente des armes. 2)-Le Trafic de la drogue 3)-Le droit d'ingérence avec ses guerres préventive et préemptive ainsi que le redécoupage incessant du monde en sphères d'influences qui sous-tendra dans ces foyers de turbulence des imbroglios politiques quasi permanents et inextricables. « On entend souvent de hauts responsables à Washington, ou ailleurs, parler de redessiner les frontières du Proche-Orient, comme si des sociétés aussi anciennes et des populations aussi diverses pouvaient être secouées comme des cacahuètes dans un bocal. » (3) « Musulman ! » Ce n'est hélas ni une identité figée et inaltérable ni une spécificité ethnique, c'est un attribut, une qualité inhérente à chaque être humain et qu'il faut mériter donc que l'on doit en permanence s'efforcer de conserver car on est sans cesse exposé à égarer ce statut si noble et si précaire. « Musulman ! » c'est une vertu, une personnalité qui n'est jamais acquise d'office ou héréditaire. Ce que bon nombre de musulmans ignorent à force de mimétismes liturgiques vidées de toute introspection et autocritique. "Nous sommes musulmans donc nous sommes parfaits". Syllogisme funeste qui sape toute perfectibilité dans l'individu, en neutralisant en lui tout souci de perfectionnement. C'est ainsi que l'idéal islamique; idéal de vie et de mouvement a sombré dans l'orgueil et particulièrement dans la suffisance du dévot qui croit réaliser la perfection en faisant ses cinq prières quotidiennes sans essayer de s'amender ou de s'améliorer... : il est irrémédiablement parfait, Parfait comme la mort et comme le néant. Tout le mécanisme psychologique du progrès de l'individu et de la société se trouve faussé par cette morne de satisfaction de soi. "(4) Le prophète dira à ce sujet : " Nul d'entre vous ne sera croyant tant qu'il n'aimera pas pour son frère ce qu'il aimerait pour lui " On est dans la logique de la validation permanente et non dans la logique de la représentation théâtrale. Le philosophe Emmanuel Kant dira: "Agis de telle sorte que tu traites l'humanité comme une fin, et jamais simplement comme un moyen" Les sociétés arabes et musulmanes affichent le plus souvent sans vergogne des spectacles contradictoires où règnent corruption, injustice, violence ; conjonctures cycliques et favorables à l'émergence de mouvements subversifs qui au nom d'une certaine légitimité au changement ne feront qu'alimenter un chaos permanent Noé était musulman, et bien avant lui Adam, et bien plus tard Abraham, les plantes aussi et tout ce qui respire sur cette planète répondent à un certain impératif préétabli, une subordination et une soumission éclairées et consenties qui s'expriment et se manifestent de milles manières différentes. On a appelé cela un beau jour « l'Islam ». La soumission à Dieu. Obsédé par le profit et la survie, l'occident n'a jamais cessé de jouer aux « Lego ». Il a donc découpé la mappemonde en tranches, utilisé des raccourcis désuets et risibles pour arriver enfin à confectionner ex nihilo une sorte de Frankenstein, un croquemitaine qui justifie ses peurs, ses méfiances et cautionne ses guets apens. Il n'y avait pas mieux que l'islam pour endosser ce rôle, avec un terreau de débiles et de cobayes infiltrés à leur insu dans cette idéologie mystificatrice de la menace permanente. A chaque One-man-show animé par des psychopathes brandissant une bannière sur laquelle le monde entier pourrait capter ces mots si lourds de sens « Ellah akbar », l'occident se met ipso facto à agencer ses bivouacs militaires et économiques, pendant que le monde arabe s'essouffle à jurer son innocence, clamant à qui veut bien l'écouter que l'islam est une religion de paix. La plus massive majorité silencieuse du monde arabe assistera éberluée à une véritable chasse aux sorcières avec des procès truqués d'avance , et une kermesse de plaidoyers incarnée par une nouvelle intelligentsia musulmane laïco-religieuse , juste pour défendre la virginité de l'islam et l'innocence d'un dieu qui a toujours été étranger à cette industrie de la décapitation , de l'amputation , de la séquestration des femmes ,de l'excision des jeunes filles pour ne citer que ces clichés sanglants et macabrement ostentatoires. « Des attaques massives, d'une agressivité planifiée, ont été lancées contre les sociétés arabes et musulmanes contemporaines, accusées d'arriération, d'absence de démocratie et d'indifférence pour les droits des femmes. Au point de nous faire oublier que des notions telles que la modernité, les Lumières et la démocratie ne sont en aucun cas des concepts simples et univoques que chacun finirait toujours par découvrir, tels les œufs de Pâques cachés dans son jardin. »(5) On aura vraiment tout vu ! Oser parler aujourd'hui de Califat pandémique proclamé par des zouaves incapables de fabriquer un clou, c'est vraiment être à cours de fables. Même le festival d'Avoriaz n'en voudrait pas de ce scenario burlesque. Une nuit raconte le calife Al-Ma'mûn: « J'ai vu en rêve un homme assis dans la posture des sages, je lui ai demandé « qui es-tu ? », il m'a répondu « Aristote le Sage ». Alors je lui posais la question « Dis-moi comment définir une parole juste ? », Aristote « Celle qui est conforme à la raison ». Al-Ma'mûn « Mais encore ? », Aristote « Celle qu'apprécie l'interlocuteur ». Al-Ma'mûn « Mais encore ? » Aristote « Celle dont on n'a pas à craindre les conséquences ». Al-Ma'mûn « Mais encore ? » Aristote « Il n'y a pas encore, le reste ne sert qu'à divertir les hommes. » Notes : 1)Gilles KEPEL « Jihad, Expansion et déclin de l'Islamisme. » Ed. Gallimard, 2000 2)Olivier Roy, L'énigme du soulèvement : Foucaultet l'Iran.(http://w.w.w.vacarme.org/article1366.html) 3)Edward.G.Said «L'Orientalisme : L'Orient crée par l'Occident (Préface de l'auteur Ed. du Seuil 2003) 4)Malek BENNABI «Vocation de l'islam (1954) » 5) Edward.G.Said « L'Orientalisme : L'Orient crée par l'Occident (Préface de l'auteur Ed. du Seuil 2003) 6)Mahmoud Hussein -"L'âge d'or de l'Islam : Quand le monde parlait arabe"