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SYSTEME FISCAL, EMPRUNT NATIONAL, SPHERE INFORMELLE, VALEUR DU DINAR, BANQUES ISLAMIQUES : Quelques recommandations de politique économique au gouvernement
Cette présente contribution est une brève synthèse d'un débat le 31 mars 2016, d'une heure à une télévision algérienne que j'ai eu avec un député membre de la commission finances de l'APN sur le système fiscal et les perspectives de l'économie algérienne face à la chute du cours des hydrocarbures (1) 1.-Le système fiscal se fonde sur la rente et son efficacité doit se baser sur la confiance 1.1-Le système fiscal est au cœur de toute société devant concilier l'équité, les politiques parleront de justice sociale et l'efficacité économique modifiant l'allocation des ressources financières. En référence à l'élément fondamental de toute économie, tout opérateur américain, européen, chinois ou algérien est mu essentiellement par la logique de maximisation de son taux de profit. Il appartient à l'Etat régulateur de concilier les coûts sociaux et les coûts privés, l'efficacité économique et une profonde justice sociale. Le paiement de l'impôt direct est le signe d'une plus grande citoyenneté, la facilité pour tout gouvernement qui ne maîtrise pas la régulation globale étant l'impôt indirect supporté par toutes les couches sociales sans distinction, au même titre que les subventions généralisées non ciblées. Tout est une question de confiance sans laquelle aucun développement n'est possible ou aucun système fiscal ne serait véritablement efficace. On ne combat pas le recouvrement de l'impôt par l'autoritarisme provoquant l'effet contraire, la fuite des capitaux. 1.-2-Les exportations d'hydrocarbures officiellement représentent 95% du total. Mais sur les 5% restant 70% concernent des dérivées d'hydrocarbures et marginalement des métaux ferreux et semi-ferreux, le secteur privé représentant environ 1% des exportations totales. La fiscalité hydrocarbures représente, certes variant selon les recettes de Sonatrach entre 2007/2015 entre 60 et 35%. Mais pour avoir un montant exact, il faut prendre en charge les taxes sur les importations en devises biens et services permises grâce aux hydrocarbures. Un dérapage du dinar pour ne pas dire dévaluation, sans dynamiser les exportations hors hydrocarbures, étant passé de 5 dinars un dollar , à 75 dinars un dollar vers les années 2012/2013, à 107 dinars un dollar entre 2015/2016 et de 85 dinars un euro à 117/122 dinars un euro entre 2015/2016 ( 55% des importations provenant de la zone euro) gonfle à la fois la fiscalité hydrocarbures mais également la fiscalité ordinaire provenant de l'importation. Cela gonfle également outre le fonds de régulation des recettes calculé en dinars qui risque de s épuiser malgré ces artifices d'écritures comptables, courant 20 et par là le véritable déficit budgétaire ( la loi de finances 2016 donnant environ 36 milliards de dollars de déficit pour un cours de 99 dinars un dollar ; mais si on avait appliqué 75 dinars un dollar le déficit serait environ de 45 milliards de dollars. 1.3 -Les informations officielles donnent 2000 milliards de dinars d'impôts ordinaires pour 2016, 2600 milliards de dinars pour 2014 et 3050 milliards de dollars pour 2015. Mais le grand problème est de ventiler cet agrégat global de peu de signification. En effet pour une appréciation objective, l'on doit ventiler le montant exact du cheminement des impôts à travers tous les circuits, des taxes douanières jusqu'au consommateur final devant donc distinguer les biens produits localement des biens importés. Les créances du fisc envers ses contribuables sont estimées à quelques 2.000 milliards de dinars, mais devant ventiler également entre le secteur d'Etat ou secteur privé et de par nature d'activité. Comme doit être pris en compte les assainissements des entreprises publiques de plus de 60 milliards de dollars entre 1971/2015 qui sont des détournements d'impôts. Comme doit être pris en compte le montant des exonérations fiscales des différents organismes en quantifiant leurs impacts en termes de création de valeur ajoutée, de réduction des importations et de création d'emplois productifs. La cour des comptes dans son rapport présent à l'APN en 2013, selon les données de 2012 donne pour la taxation de l'immobilier un montant dérisoire d'environ 150 milliards de dinars. Il faut à tout prix régulariser le foncier où dans la majorité des wilayas, existe une véritable anarchie concernant les titres de propriété où les dossiers ne sont pas informatisés. Si chaque habitation payait qu'un million de centimes, le montant devrait être de plus de trois milliards de dinars/an. Il est entendu que c'est une moyenne, les habitations dans des quartiers résidentiels comme cela se passe à travers le monde, les taxes seraient plus élevées et s'élevant progressivement en fonction du nombre de villas ou d'immeubles de luxe. 1.4-Le Ministre des finances avance que 99% des recettes fiscales recouvrées à travers le pays proviennent de 12 wilayas et que sur les 48 wilayas, il y en a 36 qui ne contribuent que de 1% au total des recettes fiscales. Cela ne nous apprend pas grand-chose sur la manière de canaliser l'épargne. Déjà en 1990, la direction générale des impôts a mis en relief officiellement que six wilayas payaient 70% des impôts et qu'une wilaya qui regroupait 35% des activités ne contribuait qu'à environ 5%. Or le montant de l'impôt est fonction de l'activité économique, qui crée de la valeur ajoutée, y compris les nouvelles technologies, le commerce, nécessaire dans la rotation du capital, ne créant pas de valeur mais constituant un transfert de valeur. Si 10 wilayas totalisent 80% de l'activité, il est normal que le taux de recouvrement fiscal lui soit corrélé Aussi, il appartient au gouvernement pour avoir une vision claire de son action où actuellement la majorité des wilayas repose sur une gestion administrative, avec de nombreuses directions budgétivores, (idem pour nos ambassades entités administratives qui ont besoin d'une autre vision orientée vers l'économique), naviguant à vue assimilant réalisation à dépenses monétaires, d'établir un tableau de bord où serait mis en relief l'évolution du produit intérieur brut par activité pour chaque wilaya. Ensuite de consolider ce tableau par grandes zones régionales car tout investisseur a besoin d'un marché large devant éviter les micros wilayas, et également établir un tableau de bord régional de l'emploi et du chômage par sexe, niveau de qualification. Ces instruments sont inexistants au niveau des wilayas, étant stratégiques pour leur gestion, passant par la symbiose universités, centre de recherche/chambres de commerce/ wilayas. 2-La valeur de toute monnaie dépend de la valeur créée et l'intégration de la sphère informelle du retour à la confiance 2.1-La valeur d'une monnaie, rapport social dépend d'une part de la confiance Etat-citoyens et d'autre part de la production et de la productivité. L'impôt dans les pays développés fait vivre les différents appareils de l'Etat et permet des investissements dans les secteurs sociaux, éducation santé, infrastructures ect ...En Algérie la valeur du dinar est corrélée à 70% aux réserves de change étant passées de 192 milliards de dollars début 2014 à 143 milliards de dollars fin 2015, certes avec une dette extérieure inférieure à 4 milliards de dollars, la situation étant différente de celle des années 1986. Ces réserves eux mêmes sont corrélées aux rentrées de Sonatrach, et toute baisse entraîne automatiquement une baisse de la valeur du dinar. A moins de 10 milliards de dollars de réserves, le cours officiel du dinar se coterait à plus de 200 dinars un euro d'où l'importance de préserver les réserves de change par des emprunts extérieurs ciblées à moyen et long terme, concernant uniquement les segments créateurs de valeur ajoutée et d'alléger la règle des 49/51% par un partenariat gagnant/gagnant Cela n'est pas propre à l'Algérie, et concerne les économies rentières, l'expérience du rouble russe dévalué de plus de 70% l'atteste. Concernant la dualité du taux de change du dinar entre le marché parallèle et le marché officiel traduisant la dualité de l'économie où 50% environ de l'activité est dans la sphère informelle, les transactions annuelles seraient d'environ trois milliards de dollars, mais en réalité beaucoup plus. En effet les surfacturations des importations ( 71,3 milliards de dollars de biens et services en 2014, d'environ 71,3 milliards de dollars , et plus de 60 milliards de dollars en 2015 , où certaines activités légales d'émigrés permettent d' alimenter en partie ce marché où existent des grossistes avec des ramifications au niveau international. L'on oublie souvent les services dont les surfacturations sont plus aisées dont le montant fluctue annuellement entre 10/12 milliards de dollars entre 2010/2015. Donc le montant des transactions est plus important car l'épargne des salariés de l'émigration avec la crise économique et le décès des retraités, est faible, les jeunes ayant une autre vision de leur avenir. L'intégration de la diaspora qui peut être d'un apport certain, implique d'autres mécanismes. 2.2-Concernant l'emprunt national, après le relatif échec de vouloir insérer le capital argent de la sphère informelle au sein de la sphère réelle, à un taux d'intérêt fixe de 5%, sa réussite dépendra de la maîtrise de l'inflation réel, le taux d'inflation officiel étant baisée par les subventions et la baisse du cours du dinar qui ne règle rien sans réformes structurelles. En cas d'un taux d'inflation supérieur au taux des emprunts obligataires et d'une dévaluation rampante du dinar, il ne faut pas s'attendre à un afflux notamment de ceux qui possèdent du capital argent, qui se réfugieront dans l'achat de devises, l'immobilier, l'or ou spéculant sur les matières premières fortement demandées. Comme l'on devra tenir compte de la détérioration du pouvoir d'achat des ménages du fait de la forte déthésaurisation actuelle, confrontés déjà à d'autres dépenses notamment dans la construction et de la faiblesse du tissu économique productif qui en cas d'excès d'impôt iront vers la sphère informelle. En effet 83% de la superficie économique est constituée selon l'officiel de petits commerce/services, le secteur industriel représentant moins de 5% du produit intérieur brut (PIB) et sur ces 5% plus de 95% sont des PMI/PME endettés vis-à-vis des banques, idem pour le BTPH fonctionnant avec des méthodes de construction anciennes (ciment, rond à béton) , énergivores, qui connait une crise, avec le risque d'une bulle immobilière. 2.3-Concernant les bureaux de change privés, c'est une vieille idée qui remonte aux années 1990 avec une marge bénéficiaire dérisoire de 1% aux agences privées, n'ayant jamais vu le jour concrètement. Le FMI dans ses statuts interdit toute dualité de la valeur d'une monnaie. Durant une phase de transition, il serait souhaitable qu'un contrat ferme soit établi entre la banque d'Algérie qui alimenterait ces bureaux de change privées à 140 dinars un euro, avec une marge de 5% afin d'avoir un cours final de 150/155 dinars un euro. Comme la demande provient surtout des agences de voyage (vous payer en dinars et celles-ci paient les hôtels à l'étranger en devises) , il serait souhaitable également un contrat ferme avec la banque d'Algérie sous réserve d'une balance devises positives. Or, actuellement la majorité des agences concourent à la sortie de devises alors que dans la majorité des pays font venir des touristes étrangers concourant à la rentrée de devises. A moyen terme, il est impératif de s'orienter vers un taux de change unique fonction de l'intégration de la sphère informelle produit des dysfonctionnements des appareils de l'Etat et d'une incohérence de la politique socio-économique, au sein de la sphère réelle. Lorsqu'un Etat veut imposer des règles qui ne correspondent pas à l'état de la société, celle-ci enfante ses propres règles qui lu permettent de fonctionner dans un cadre légal reposant sur la confiance veneurs/offreurs, contrat moral plus solide que celui que veut imposer l'Etat par la contrainte. Le redressement de la valeur de toute monnaie implique l'élévation de la production et de la productivité interne en termes de cout/qualité de nos entreprises privées ou publiques devant s'adapter aux nouvelles mutations mondiales, en levant les contraintes d'environnement à la mise en œuvre des affaires ( bureaucratie étouffante, système financier sclérosé, système socio-éducatif inadapté, le foncier), donc en libérant toutes les énergies créatrices passant par le développement des libertés au sens large. 2.4-Concernant, la finance islamique, le fondement étant le partage du risque et du profit. qu'il s‘agit d'encourager, le montant global des banques islamiques en 2014 ne dépasse pas 1300 milliards de dollars représentant moins de 5% du volume des transactions financières mondiales et connaissant une crise depuis la chute du cours du pétrole. Pour le cas algérien, sur les 50/60 milliards de dollars circulant au sein de la sphère informelle, existant plusieurs méthodes de calcul donnant des montants différents ((voir étude sous la direction du professeur Abderrahmane Mebtoul- Institut Français de Relations Internationales IFRI décembre 2013- 60 pages – la sphère informelle au Maghreb), il faut être réaliste, l'on pourrait drainer environ 20%. Dans le cadre fiscal, il serait souhaitable qu'une institution soit créée entre le Ministère des affaires religieuses et le Ministère des Finances répertoriant individuellement ceux qui versent la Zakat afin qu'ils ne soient pas pénalisés par un double paiement d'impôts. En résumé, comme je viens de le souligner au site international français (voir le Point.Afrique -Paris/France - interview parue le 24 mars 2016), il faut éviter toute vision de sinistrose. L'Algérie, pays pivot a toutes les potentialités pour réaliser une économie diversifiée dans le cadre des nouvelles mutations internationales caractérisées par la quatrième révolution industrielle. Sa stabilité conditionnée par son développement fondé sur un partenariat gagnant/gagnant (voir mon interview à l'hebdomadaire français l'Express à paraitre lors de la visite du Premier ministre français, Manuel Valls en Algérie les 9/10 avril 2016), est le garant de la stabilité de la région euro-méditerranéenne et africaine, sous réserve de profondes réformes structurelles et donc d'une gouvernance rénovée qui déplaceront forcément des segments de pouvoir liés à la rente. Pour cela, le gouvernement algérien doit éviter l'écueil à la fois strictement monétariste, et mécanique des années 1970 reposant sur l'illusion d 'un retour du cours de pétrole à 80 dollars, qui dépend de facteurs externes échappant totalement à l'Algérie, la baisse étant de longue durée, donc de fausses solutions à des problèmes mal posés. Cela implique une adaptation culturelle au nouveau monde de nos responsables. (1)-Voir le débat télévisé en arabe entre le professeur Abderrahmane Mebtoul et un député membre de la commission des finances de l'APN -31 mars 2016 - 19/20h reproduit le 01 avril de 10/11h télévision El Bilad, sur les enjeux de la fiscalité et de l'économie algérienne face à la chute du cours des hydrocarbures en Algérie. Egalement un dossier avec débats dans le quotidien gouvernemental arabophone Ech-Chaab du professeur Abderrahmane Mebtoul - dimanche 03 avril 2016