Il y a maintenant unanimité des institutions internationales, des observateurs nationaux que de certains segments de la classe politique tant de l'opposition que du pouvoir, du fait que le cours fluctuera entre 50/60 dollars 2017/2020, à prix constants et moins en cas de crise mondiale, que sans réformes de fond, des tensions sociales sont inévitables horizon 2020. A court terme, contrairement à certaines supputations 1.Il n'y aura pas d'implosion lors de la rentrée sociale 2017 pour cinq raisons principales. Premièrement, l'Algérie n'est pas dans la situation de 1986, où les réserves de changes étaient presque inexistantes avec un endettement qui commençait à devenir pesant. Avec 100 milliards de dollars de réserves en juillet 2017 et une dette extérieure inférieure à 4/5 milliards de dollars, ces réserves de changes, richesses virtuelles qu'il s'agit de transformer en richesses réelles, si elles sont bien utilisées, peuvent à la fois servir de tampon social. Deuxièmement, vu la crise du logement, le regroupement de la cellule familiale concerne une grande fraction de la population et les charges sont payées grâce au revenu familial global (même marmite, paiement des charges). Mais il faut faire attention: résoudre la crise du logement sans relancer la machine économique prépare à terme l'explosion sociale. Comment voulez-vous qu'un ménage vivant seul avec moins de 50.000 dinars/mois net puisse subvenir à ses besoins? Troisièmement, grâce à leur travail, mais également aux mesures populistes, bon nombre de bas revenus ont bénéficié de logements sociaux presque gratuits, pénalisant les couches moyennes honnêtes qui ont mis des décennies de travail pour se permettre un logement décent, permettant aux familles algériennes une accumulation sous différentes formes. Cependant, il suffit de visiter les endroits officiels de vente de bijoux pour voir qu'il y a «déthésaurisation» et que cette épargne est, malheureusement, en train d'être dépensée face à la détérioration de leur pouvoir d'achat. Cela peut tenir encore deux à trois ans. A la fin de cette période tout peut arriver. Quatrièmement, l'Etat, malgré des tensions budgétaires qui iront en s'accroissant, les dispositions de la loi de finances 2017, certainement celle de 2018, continue à subventionner les principaux produits de première nécessité: il n'est pas question de toucher à deux produits essentiels pour les plus pauvres, à savoir le pain et le lait. En revanche, à terme il s'agira de cibler les subventions qui, généralisées, sont insoutenables pour le budget. Cinquièmement, la sphère informelle, produit de la bureaucratie, des dysfonctionnements des appareils de l'Etat, du manque de visibilité de la politique socio-économique (gouvernance locale et centrale) contrôlant 40% de la masse monétaire en circulation, contrôlant 65% des produits de première nécessité et employant plus du tiers de la population active joue le rôle de tampon social. C'est la rente des hydrocarbures qui joue la fonction de vases communicants entre différentes sphères économiques et sociales, devant être au centre ou directement à la périphérie pour pouvoir capter cette rente, expliquant que la réforme du système financier, enjeu important du pouvoir et des rapports de force, lieu de distribution de la rente, malgré bon nombre de promesses, tarde à se réaliser.
2.-Les trois raisons d'une situation préoccupante horizon 2019/2020 1- Premièrement, la population algérienne est passée de 12 millions en 1965, de 34 591 000 le 1er juillet 2008, à 37,5 millions d'habitants en 2010, 39,5 millions d'habitants au 1er janvier 2015, à 40,4 millions d'habitants au 1er janvier 2016 et à 41,3 au 01 janvier 2017. .. En avril 2017, selon l'ONS, la population active a atteint 12,277 millions de personnes contre 12,117 millions en septembre 2016. La population active était de 9,493 millions d'habitants en 2005, 10,862 en 2010, 11,423 en 2012, 11,964 en 2013. Le taux d'emploi est fonction dut aux de croissance -moyenne 3% 2005/2016- Le rapport du Fonds monétaire international (FMI) sur les perspectives économiques mondiales pour l'Algérie montre que la situation devrait fortement se dégrader en 2017 et en 2018. En effet, le FMI table sur une croissance de 1,4% du PIB algérien en 2017 et en 2018, l'économie algérienne devrait connaître une quasi-stagnation, avec un taux de croissance du PIB de seulement 0,6%. Conséquence directe de ce ralentissement économique, le taux de chômage devrait sensiblement augmenter sur la même période estimé à 13,2% en 2018 avec une tendance inflationniste La population en chômage selon l'ONS, était de 15,3% en 2005, en 2011 10%, 11% en 2012, 9,8% en 2012/2013, 10,6% en 2014 11,2% en 2015. Selon l'ONS, cité par l'APS, en avril 2017, la population en chômage a ainsi atteint 1,508 million de personnes, soit un taux de chômage de 12,3% au niveau national, en hausse de 1,8 point par rapport à septembre 2016 avec un taux de chômage des jeunes de 16-24 ans de 29,7%. 2-Deuxièmement, les réserves de l'Algérie ont été estimées à 56 milliards de dollars en 2005, 77,78 milliards en 2006, 110 milliards en 2007 à 138,35 milliards de dollars en 2008, à 147,2 milliards en 2009, à 157 milliards de dollars fin 2010 , 2011 avec 188,8 milliards de dollars en 2011, 190, 66 en 2012, 194 milliards de dollars en 2013, 179,9 milliards de dollars en 2014, 152 milliards de dollars fin 2015, et selon le rapport du FMI à 113,3 mds usd en 2016 et à environ juillet 2017 à 100 milliards de dollars. Selon les documents du FMI, les sorties de devises des services souvent non commentés ou les surfacturations sont plus faciles, ont été de 10,7 milliards de dollars en 2013, 11,7 en 2014, 11,0 en 2015, 9,9 en 2016 avec une prévision de 10,6 milliards de dollars en 2017. Le rapatriement légal des bénéfices, selon les sources du FMI, a été de 8 milliards de dollars en 2013, 8 en 2014, 6,5 en 2015, 3,1 en 2016 et une prévision de 3,7 milliard de dollars en 2017, prévoyant une moyenne entre 4,5 et 5 milliards de dollars entre 2018/2020. Dans ce cas, au rythme des indicateurs financiers des sept premiers mois de 2017, en toute hypothèse, les sorties de devises, sans compter les transferts légaux de capitaux, clôtureraient fin 2017 à 45-46 milliards de dollars (biens) plus 8-10 milliards de dollars (services) soit 53-56 milliards de dollars et tendant vers 60 milliards de dollars avec les sorties légales de capitaux. Ce montant de sorties de devises correspond pour l'équilibre à un baril variant entre 85-88 dollars pour éviter des tensions au niveau de la balance des paiements. 3.- Troisièmement, le dérapage accéléré du dinar officiel avec des incidences sur le Taux d'inflation avec un écart de 35/45% avec le cours du marché parallèle: 1970 : 4,94 dinars un dollar- 1980 : 5,03 dinars un dollar- 1985 : 5,03 dinars un dollar- 1989 : 8,03 dinars un dollar- 1990 : 12,02 dinars un dollar-1991 : 18,05 dinars un dollar- 1994 : 36,32 dinars un dollar- 1995 : 47,68 dinars un dollar. : 1996 : 54,74 dinars un dollar- 1997 : 57,71 dinars un dollar- 1998 : 58,76 dinars un dollar- 1999 : 66,64 dinars un dollar- 2001 : 69,20 dinars un euro et 77,26 dinars un dollar- 2002, 75,35 dinars un euro et 69,20 dinars un dollar- 2003, 87,46 dinars un euro et 77,36 dinars un dollar- 2004, 89,64 dinars un euro et 72,06 dinars un dollar- 2005, 91,32 dinars un euro et 73,36 dinars un dollar- 2006, 91,24 dinars un euro et 72,64 dinars un dollar- 2007, 95,00 dinars un euro et 69,36 dinars un dollar- 2008, 94,85 dinars un euro et 64,58 dinars un dollar- 2009, 101,29 dinars un euro et 72,64 dinars un dollar- 2010, 103,49 dinars un euro et 74,31 dinars un dollar- 2011, 102,21 dinars un euro et 72,85 dinars un dollar- 2012, 102,16 dinars un euro et 77,55 dinars un dollar- 2013, 105,43 dinars un euro et 79,38 dinars un dollar- 2014, 106,70 dinars un euro et 80,06 dinars un dollar- 2015, 108,60 dinars un euro et 99,50 dinars un dollar -2016 (11 mai) 124,936 dinars 1 euro et 109,275 dinars un dollar et le 26 aout 2017 130,73 dinars un euro et 109,58 dinars un dollar .Ainsi, le taux d'inflation officiel entre 1989 et 2017 a été le suivant : 17 87% en 1989 ; 25 88% en 1991 ; un pic de 31,68% en 1992 ; 21,9% en 1995 ; 5% en 1998. En 1999 : 4/2% ; en 2000 : 2% ; 2001 et 2002 : 3% ; en 2003 : 3,5% ; en 2004 : 3,1% ; en 2005 1,9% ; en 2006 : 3% ; en 2007 : 3,5% ; en 2008 : 4,5% en 2009, 5,7% en 2010, 5% ; en 2011, 4,5%, en 2012, 8,9%, en 2013, 3,3%, en 2014, 2,9%, en 2015, 6,7% en 2016 et 6,1% en avril 2017.
En résumé, statut quo ou réformes A court terme, bien que la situation soit difficile avec les tensions budgétaires, contrairement aux supputations de certains méconnaissant la morphologie sociale, ou de certains faisant peur avec le calcul de préserver le statu quo en différant les réformes nécessaires versant toujours dans l'alarmisme, sans proposer de solutions réalistes, il n'y aura pas d'implosion sociale durant cette rentrée sociale 2017. Mais attention à l'autosatisfaction : Il suffit d'aller enquêter dans les quartiers d'Algérie et de recueillir les sentiments des citoyens, loin des bureaux climatisés de nos bureaucrates, pour constater qu'il existe une véritable crise morale, un sentiment d'injustice sociale et de révolte latente surtout d'une jeunesse désespérée de son avenir. L'Algérie a un répit seulement de trois ans pour changer de cap et éviter de vives tensions sociales 2019-2020. La situation peut être maîtrisable, sous réserve d'une plus grande rigueur budgétaire et d'une lutte contre les surcoûts, le gaspillage et la corruption renvoyant au mode de gouvernance. Mais à moyen terme, en cas de faiblesse de la production interne, d'un dérapage accéléré de la valeur du dinar corrélé à la baisse des réserves de changes, nous devrions assister à un processus inflationniste accéléré et que sans réformes structurelles, évitant les replâtrages, le retour au FMI sera inévitable à l'horizon 2019-2020, avec d'inévitables tensions sociales et politiques avec des incidences géostratégiques facteur de déstabilisation de toute la région méditerranéenne et africaine (voir notre interview 28/12/2017 au quotidien American Herald Tribune). L'objectif stratégique est d'aller véritablement vers un large consensus face aux tensions budgétaires inévitables entre 2017/2020 devant éviter la vision strictement monétariste équilibrer recettes/dépenses comme un gestion d'épicerie. Attention à la généralisation du financement non conventionnel de la planche à billets avec le risque d'un processus inflationniste incontrôlée (expérience récente du Venezuela). La solution est d'avoir une vision stratégique de mutation systémique.