La fête du Panaf se poursuit au Théâtre de verdure d'Oran à un rythme fou. Après une première soirée de variétés algériennes très mitigée, les mélomanes oranais ont eu droit à, consécutivement, deux soirées explosives avec notamment un gala de musique RnB, mercredi, animé par l'afro-américain Big Ali et le groupe ivoirien Magic System et une extraordinaire soirée rap, jeudi, avec le chanteur iconoclaste Lotfi Double Canon, où le public a grandement contribué, par son entrain, à donner de la voix et de l'éclat à la fête. La soirée du mercredi devait débuter par la production du groupe folklorique «Bakalama» qui a donné au public un aperçu du patrimoine culturel sénégalais par une série de danses paysannes. Costumes très colorés, rythmes endiablés des percussionnistes accompagnés du son monotone et tenace du saxo, mouvements vifs et saccadés de danseurs qui se livraient à une sympathique joute chorégraphique faite de prouesses physiques pour symboliser les réjouissances après une providentielle récolte. Après la danse, place à la house-music et au RnB avec le tonitruant Big Ali, au gabarit débordant de lutteur de sumo qui, en dépit de son impressionnante obésité, a fait sans complexe et sans jeu de mots, un «big show» en sautillant sur les planches pour faire vibrer la nombreuse assistance qui reprenait les airs manifestement connus, dont une chanson en hommage à Michael Jackson. Lui succédant, le groupe ivoirien Magic Sytem fera monter la fièvre avec un florilège de chansons de leur répertoire, dont le fameux tube «Ya delali», réalisé avec le chanteur algérien Mohamed Lamine, qui seront toutes reprises en chœur par un public enthousiaste et très remuant. Le groupe ivoirien, qui a à son actif d'autres tentatives de fusion musicale avec notamment Khaled, se dira «très ravi de se retrouver pour la seconde fois Oran» où il avait conçu, en 2004, son opus «Un gaou à Oran», dans le cadre du festival «qui est le plus important festival où le continent est en train de prouver au monde sa prodigieuse richesse culturelle». La soirée musicale du jeudi a été tout simplement extraordinaire avec l'époustouflante prestation de Lotfi Double Canon qui réussira à créer une véritable osmose avec le public l'accompagnant durant tout son tour de chant. La soirée sera inaugurée par le groupe folklorique Hloseini Arts de Bulawayo (Zimbabwe) qui, comme le groupe sénégalais de la veille, présentera des danses qui célèbrent les faveurs de la pluie et d'une bonne récolte. La chanson raï figurera également au programme avec la production de deux vétérans du genre musical, en l'occurrence Bouteïba Seghir et Bouteldja Belkacem qui ressusciteront pour l'occasion quelques succès surannés: «Ouled Chouly» et «Hak Qachek hak» pour le premier et «Sid El-Hakem ouine» et l'incontournable «Zerga ou mesrara» pour le second. Puis viendra le tour de Lotfi Double Canon dont la prestation très animée et interminable enflammera un public tout acquis qui, à la demande de l'artiste, reprendra en chœur les refrains, saluera du bras ou hurlera son allégresse. Un moment d'extrême fusion entre un public et un artiste qui sait trouver les mots justes pour exprimer les préoccupations de la jeunesse et crier sa révolte. Brisant les tabous, Lotfi Double Canon s'en prendra à sa manière à beaucoup de véreux en reprenant ses titres caustiques et célèbres «Koulch machi», «Dir el-Koustim yal kafi», «Yal bhar gata'ni», «Bled Miki», «Bin el-bhar ouel moudja ouness haïdja», ou encore «Kamikaze» et «Cannibale» qui enflammeront un amphithéâtre plein à craquer et qui ne voulait pas que la soirée finisse. Le Théâtre de verdure Chekroun-Hasni aura vécu ainsi une soirée mémorable qui, du fait de l'insistance du public, devait s'achever à une heure très tardive.