Les travailleurs chinois en Algérie sont désormais dans la mire d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). La nébuleuse d'Oussama Ben Laden a, en effet, menacé hier de représailles les ressortissants chinois établis en Afrique du nord en réaction à la répression par les autorités chinoises de la minorité ouigour Xinjiang. Un rapport du cabinet d'analyse de risques «Stirling Assynt», dont une copie a été rendue publique hier par l'Afp, fait état d'une détermination d'Al-Qaïda de s'en prendre aux travailleurs chinois «présents en Afrique du Nord pour venger les victimes de la minorité ouigour». Du coup, ce sont les autorités algériennes qui devraient se tenir le ventre, voire se mettre sur le pied de guerre, du fait que notre pays constitue une destination phare de la main d'œuvre chinoise en Afrique du nord. Ce sont en effet des milliers de travailleurs chinois qui arrivent par bateau en Algérie pour servir dans de nombreux chantiers de travaux publics et d'infrastructures raflés par les entreprises chinoises. C'est donc une menace à prendre au sérieux surtout que les Chinois sont présents dans la plupart des villes d'Algérie notamment à Alger et dans la capitale de l'Ouest, Oran. Et il est aisé d'imaginer les conséquences, si d'aventure Al-Qaïda mettait à exécution sa menace d'attentat contre les intérêts chinois. L'Algérie où résident régulièrement et même irrégulièrement des milliers de Chinois risque de constituer un terrain de «combat» pour Al-Qaïda. Officiellement, plus de 25000 Chinois travaillent en Algérie selon les statistiques du ministère du Travail. Or, leur nombre est estimé à plus de 80.000 tant ils opèrent même dans l'informel. Des «Chinatown» ont même vu le jour dans certains quartiers de la capitale, notamment à Bab Ezzouar. La Chine qui figure parmi les partenaires les plus importants de l'Algérie, grâce à l'accord de «coopération stratégique» signé en 2004, voit ainsi ses intérêts directement menacés. Mais c'est évidemment la sécurité de notre pays qui est ciblée par cette menace d'Al-Qaïda. Présents partout, les Chinois font ainsi encourir un grave risque pour l'Algérie à cause de la poursuite des répressions contre les musulmans du Xinjiang. Le gouvernement algérien va être sans doute sur le qui-vive pour faire face à d'éventuelles attaques contre les Chinois. Le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois a immédiatement réagi hier en assurant que «la Chine prendra toutes les mesures nécessaires pour protéger ses ressortissants à l'étranger». «Le gouvernement chinois s'oppose au terrorisme sous quelque forme que ce soit», a déclaré Qin Gang lors d'un point de presse régulier. «Nous allons suivre de près la situation et faire des efforts conjoints avec les pays concernés pour prendre toutes les mesures nécessaires afin d'assurer la sécurité des institutions et des ressortissants chinois à l'étranger», a-t-il ajouté. Cela voudrait dire que le gouvernement chinois compte sur les services de sécurité des pays concernés pour sécuriser les personnes et les installations. Et dans le cas de l'Algérie, il va falloir mobiliser de gros moyens pour mettre tout cette «armée chinoise» à l'abri des attaques d'Al-Qaïda. Il faut savoir en effet que les entreprises chinoises ont raflé tous les grands projets structurants en Algérie où travaillent des milliers de leurs compatriotes. A lui seul, le secteur du bâtiment emploie plus de 12.000 Chinois notamment dans les projets AADL. D'autres sources évaluent le nombre de Chinois en Algérie à environ 100.000. La majorité des grands chantiers de construction (logements, barrages, ports, routes,...) ont ainsi été confiés depuis 2004 à 18 groupes chinois de BTP présents en Algérie, dont le géant public China State Construction & Engineering Corporation (CSCEC), pour un montant de 720 millions de dollars environ. Il n'y a pas uniquement le bâtiment et les travaux publics, les Chinois ont aussi un pied dans l'industrie pétrolière avec ce contrat décroché par China National Petroleum Corporation (CNPC) portant sur la reconstruction d'une raffinerie à Skikda (Est du pays) pour un montant de 390 millions de dollars. En outre, le groupe mixte chinois Citic-Crcc réalise une tranche de 528 km du projet autoroutier est- ouest pour un montant dépassant les 4 milliards de dollars. Ce tronçon devra relier Bordj Bou-Arreridj, à l'Est, aux frontières avec le Maroc. Autant dire que l'Algérie est appelée à faire face à une importante menace terroriste que le gouvernement chinois aurait pu éviter en cessant ses descentes punitives contre les Ouigours.