Les ruptures des réactifs, constatées dans les hôpitaux depuis plusieurs jours, sont dues à la difficulté d'approvisionner le marché, depuis l'instauration de l'obligation de recours au crédit documentaire (Credoc). C'est, du moins, l'hypothèse citée par le Dr Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP). Joint, hier, par téléphone, le Dr Yousfi a confirmé la pénurie des réactifs dans les hôpitaux. Selon lui, cette situation est des plus déplorable et menace directement la santé des citoyens. «En tant que praticiens, nous interpellons le ministère de la Santé sur cette situation qui met en danger la vie des malades». Pour le Dr Yousfi, il s'agit plutôt d'une négligence de la part des premiers responsables du secteur qui pourrait coûter cher à certains patients qui sont atteints de maladies lourdes telles le cancer et le sida. «A défaut de réactifs, l'activité quotidienne des hôpitaux est perturbée et des opérations sont reportées». Ce qui a contraint, explique-t-il, les malades à s'orienter vers le privé pour effectuer des analyses médicales. La rupture de certains réactifs de la sérologie du sang est signalée depuis quelques semaines dans bon nombre d'établissements de santé, selon le Dr Yousfi qui précise qu'il s'agit de réactifs pour les hépatites B et C, la syphilis et le sida. Ces réactifs importés ne sont plus disponibles sur le marché national. Les hôpitaux ont déjà connu, il y a quelques semaines, ce type de pénurie, mais ils ont été dépannés par de petites quantités par l'Institut Pasteur d'Alger (IPA). Certaines sources accusent, par contre, l'IPA d'être à l'origine de cette situation. «Il est en charge de l'importation et de la distribution des réactifs. Au lieu de se concentrer sur leur travail, ses responsables s'intéressent aux nominations aux postes", déplore-t-on. Ces sources n'hésitent pas à déclarer que l'IPA est dépassé par les événements, évoquant l'épisode de la grippe A/H1N1. La même inquiétude a été soulevée par Amor Ziyad, le président de l'Union nationale des opérateurs en pharmacie. Il faut trois mois pour que l'opération se débloque. Dès que les stocks, constitués durant le 2ème trimestre de l'année dernière, ont été épuisés, les difficultés d'approvisionnement du marché ont commencé à apparaître. La pénurie de médicaments de traitement de fond s'installe en Algérie. Les opérateurs du marché du médicament (fournisseurs, distributeurs et pharmaciens), qui annoncent, d'ores et déjà, une rupture de stocks, pointent d'un doigt accusateur les mesures de durcissement des conditions de commerce extérieur décidées par la loi de Finances complémentaire 2009, notamment celle de l'instauration du crédit documentaire comme unique moyen de paiement des importations. Le plus inquiétant dans cette crise est que la pénurie qui concernait une quarantaine de médicaments semble prendre de l'ampleur au fil des jours pour toucher de plus en plus de produits de traitement de fond et s'est étendue à tous les segments du secteur pharmaceutique pour atteindre les réactifs indispensables aux analyses médicales. Les spécialistes tirent la sonnette d'alarme et prédisent un avenir bien difficile pour les malades.