De plus en plus, les populations dans les pays dits du monde arabe (certains appellent cela Nation arabe) ne croient plus que la démocratie descendra du ciel comme s'il s'agissait d'une révélation. Il y a une classe politique «dirigeante» dans des pays arabes qui parlent de démocratie, comme s'ils pouvaient en être les modèles et qui perçoivent (c'est ce qu'ils disent) que la démocratisation soufflera sur le monde arabe dès lors que le fonctionnement de la Ligue aura été démocratisé. A l'heure de l'Internet, de la parabole, les populations se comparent au monde extérieur, comparent également leurs dirigeants à ceux qui sont extérieurs au monde arabe, et ne réagissent plus en fidélité au slogan «unité de pensée, unité d'action», slogan qui avait bercé et berné le monde arabe. Elles y croyaient quand leurs pays étaient fermés sur l'extérieur et quand l'extérieur était fermé sur leurs pays. Il y a même un ministre ambassadeur, connu comme un homme de culture, qui avait osé affirmer -lors du dernier sommet arabe qui s'était tenu à Alger- que dans cinq années, au plus tard, la ligue fonctionnera sur le modèle européen. Le parlement arabe réussira à fonctionner comme le parlement européen. Comme le parlement européen? Allons donc! Forte conviction? L'idée d'une réorganisation du parlement arabe, dans l'objectif du renforcement de son rôle sur le modèle avancé de celui de l'Union européenne, ne doit pas mettre l'impasse à la fois sur la démocratisation des pays arabes, sur l'homogénéisation des systèmes politiques et sur l'exigence d'un rapprochement des positions, notamment en ce qui concerne les questions de défense commune, de sécurité collective et de politique extérieure. C'est bien dans les domaines de la défense, de la sécurité intérieure et de la politique extérieure que peuvent s'échanger des mesures de confiance. Ils savent pourtant qu'ils devraient agir en urgence car des indices montrent que le théâtre des opérations qui devait se situer en Europe, durant la guerre froide, glisse progressivement vers leurs propres territoires. Les pays arabes sont désormais soumis à plusieurs types de menaces qui n'ont pas disparu avec la fin de la guerre froide et qui se retrouvent plutôt exacerbées. Les conditions pour la construction d'une entité arabe sont-elles réellement réunies? Tous les observateurs en doutent. Le chemin de la démocratisation, pour asseoir au moins un modèle basé sur une certaine légitimité, est jonché d'une menace intérieure provenant du risque de conjonction entre une opposition bâillonnée et placée dans une situation d'impasse et un terrorisme à l'affût de la moindre vulnérabilité pour semer les graines d'un endoctrinement susceptible de l'élargissement de sa base de recrutement. Mais la menace aux frontières est encore perçue comme pouvant provenir de l'intérieur de l'espace arabe, des litiges frontaliers subsistant encore. La troisième menace est connue et a pour visage le cas irakien suivi maintenant par le cas libyen. Les pays arabes sont forcés à tirer les leçons de l'expérience irakienne et la leçon que les Américains ont voulu leur adresser. Ceci consiste à leur recommander de faire de leur diplomatie l'instrument de leur mise à l'abri d'une telle menace, donc de leur soumission à l'oncle Sam.