Il y a 10 ans, le 23 mai 2001 à Sidi Bel Abbes, nous quittait à jamais « Si Ahmed Essemghouni », de son vrai nom Abbad Ahmed, un grand militant des droits de l'homme qui a consacré toute une vie « pleine de sacrifices, de privations... » mais habitée surtout du rêve d'un « monde juste et profondément humain ». Ancien représentant régional du quotidien Algérie Républicain, à Oran au lendemain de l'indépendance, ensuite à Sidi Bel Abbes au début des années 90, notre confrère avait 83 ans quand il rendit l'âme dans les bras de son frère cadet Khaled sous le regard un moment pétrifié de son fidèle compagnon de lutte, le Moudjahid Martinez. Bref rappel de la trajectoire de cet enfant des Ksours que le tout Bel Abbes rive gauche chérissait et admirait comme tous les grands chioukh de la verte tribu. Abbad Ahmed est né en 1918 à Boussemghoun, un îlot berbère du sud steppique oranien. Issu d'une famille nationaliste, il dut quitter très jeune son village natal pour s'installer d'abord à Mecheria puis à Oran où il se vit offrir l'opportunité historique de côtoyer les militants et les grandes figures des différents mouvements nationaux représentés à l'époque dans la métropole régionale. Après un bref passage dans les cercles politico-culturels animés par les ulémas, il adhéra au PPA-MTLD au sein duquel il joua un rôle moteur pour la préparation, l'organisation et l'encadrement des manifestations du 8 mai 1945 à Oran. En sa qualité de responsable politique régional, il oeuvra de manière très active à l'implantation des structures du PPA/MTLD dans le sud de l'Oranie où il séjourna souvent en compagnie de compagnie du Zaim Messali El Hadj. Il fit plusieurs séjours en prison durant les vagues de répression successives qui ciblèrent les représentants du mouvement national. A la fin des années 40, Il émigra en France et s'installa en région parisienne, où il entama une nouvelle étape de son combat nationaliste. A la faveur des lectures et des rencontres, s'imprégnant des grands idéaux de paix de justice et de progrès, il rejoignit le PCA, dont il devint membre du comité central, et se fit surtout remarquer par son engagement et son attachement aux nobles valeurs humanitaires. Durant la guerre de libération, il continuera la lutte dans une totale clandestnité avant de se voir confiée, au même titre que certains de ses camarades militants, la mission de sillonner les pays de l'Est pour défendre la cause nationale...A la libération, il retourna en Algérie et contribua pleinement à la reparution d'Algérie Républicain comme le soulignera Henri Alleg dans l'un de ses livres. Après le « redressement » du 19 juin, il fut arrêté pour son appartenance au groupe fondateur de l'ORP et emprisonné à Lambèze en compagnie de Mohamed Harbi, Bachir Hadj Ali, Hocine Zahouane, Abdelhamid Benzine... Il fut par la suite “libéré” et placé en résidence surveillée à Biskra, puis à Annaba avant d'être déclaré libre de ses mouvements au début des années 70... Mais, surprise à son retour à Oran, il se vit signifier une interdiction de séjour... Abbad Ahmed décida alors de s'installer définitivement à Sidi Bel Abbes. Dans cette ville, il se vit confier un poste de cadre moyen auprès de l'ex SONELEC. Parallèlement à son activité professionnelle, il ne cessera pas de poursuivre son combat militant dans les rangs du PAGS- TAHADI-MDS et contribua activement à la création de la ligue des droits de l'homme et de plusieurs associations locales à caractère socio-professionnel, caritatif ou culturel.