La Chambre des représentants américaine a voté favorablement pour la prolongation de dix mois de la Loi d'exception anti-terroriste controversée, votée juste après les attentats du 11 septembre, suscitant les inquiétudes des associations américaines de défense des libertés civiles. Appelée US Patriot Act (Uniting and Strengthening America by Providing Appropriate Tools Required to Intercept and Obstruct Terrorism Act, ou en français: Loi pour unir et renforcer l'Amérique en fournissant les outils appropriés pour déceler et contrer le terrorisme), cette loi, qui arrive à expiration le 28 février, a énormément renforcé les pouvoirs des différentes agences gouvernementales (FBI, CIA, NSA et l'armée) qui se sont vues pourvues de prérogatives qui, souvent, ne nécessitent pas l'autorisation d'une autorité judiciaire. Avec cette reconduction, certains commentateurs américains considèrent que d'exception, cette loi pourrait devenir la règle. Ce vote de la première Chambre du parlement américain accorde une prolongation de dix mois pour trois éléments-clé du Patriot Act qui est l'objet de vives critiques, notamment des organisations de défense des droits de l'homme et des juristes, qui la considèrent liberticide. Selon eux, les libertés individuelles ont été largement diminuées au profit de la répression policière. D'ailleurs, plus de 360 villes et comtés ont déclaré refuser d'appliquer le Patriot Act. Un terrain d'entente doit être trouvé cette semaine avec le Sénat, avant la fin février, puisque le Congrès ne sera pas en session la semaine prochaine. La première des trois clauses-phares de ce texte législatif autorise les forces antiterroristes possédant un mandat d'écoute électronique à installer des dispositifs d'écoute sur plusieurs appareils électroniques. Quant à la seconde, elle permet d'avoir accès aux dossiers d'affaires en cause lors des enquêtes sur le terrorisme. L'accès doit être autorisé par les tribunaux. Pour la troisième mesure, émanant d'une loi de 2004, elle donne le droit aux services de renseignements de surveiller des individus qui ne possèdent pas la citoyenneté américaine et qui ne sont pas forcément soupçonnés d'entretenir des liens avec des organisations terroristes. Ce qui vaut à cette disposition le nom du "loup solitaire" (lone wolf). La semaine dernière, les républicains n'étaient pas parvenus à faire adopter le même projet de loi alors qu'ils avaient eu recours à une procédure accélérée nécessitant le soutien des deux tiers de la Chambre. En effet, 26 républicains ont rejoint 122 démocrates qui s'étaient opposés à cette prolongation, soutenant que ce dispositif permet des fouilles anti-constitutionnelles et qu'elles permettent au gouvernement de s'ingérer dans la vie personnelle des gens. La Maison Blanche a déclaré qu'elle "ne s'opposait pas" à l'extension de 10 mois proposée par la Chambre, mais souhaiterait une extension des dispositions jusqu'à la fin de 2013. Son argument est qu'une plus longue durée offre la "certitude et la prévisibilité nécessaires" pour les besoins des Etats-Unis en matière de renseignements. Mais la directrice du bureau de Washington de l'Union des libertés civiles américaines (ACLU) a soutenu fortement que c'était une erreur de renouveler les trois dispositions sans autres garanties de préservation de la vie privée. Dans ce sens, elle a exhorté le Sénat à rejeter ces dispositions et à introduire dans cette loi les changements nécessaires pour la mettre en conformité avec la Constitution des Etats-Unis. Il est à souligner que l'un des axes centraux de la loi Patriot act (132 pages) est d'effacer la distinction juridique entre les enquêtes effectuées par les services de renseignement extérieur et les agences fédérales responsables des enquêtes criminelles (FBI) dès lors qu'elles impliquent des terroristes étrangers. Elle crée aussi les statuts de ''combattant ennemi'' et ''combattant illégal'', qui permettent au gouvernement des Etats-Unis de détenir sans limite et sans inculpation toute personne soupçonnée de projet terroriste.