ALGER - Avancée du désert, dégradation des terres, raréfaction des ressources naturelles, et exode massif des populations sont autant de conséquences dramatiques qu'engendre le phénomène de la désertification qui, aujourd'hui plus que jamais, interpelle en Algérie les pouvoirs publics, les institutions et les citoyens pour en réduire les effets sur l'homme et l'environnement. Au delà de la dimension environnementale du phénomène, la désertification touche également la vie socio-économique des populations notamment rurales, les plus exposées à ce danger naturel, estiment des experts algériens. La lutte contre la désertification a toujours constitué une priorité pour les pouvoirs publics dans les différents programmes de développement socioéconomiques du pays, depuis les premières années de l'indépendance nationale. Cet intérêt s'est traduit par des reboisements tous azimuts, qui ont été réalisés au lendemain de l'indépendance. L'exemple le plus édifiant est le barrage vert, qui s'étend de la frontière ouest à la frontière est sur une superficie de 3 millions d'ha, et réalisé par les jeunes appelés du service national. Mais, eu égard à l'ampleur du phénomène, cette ''muraille verte'' ne peut désormais, à elle seule, faire face à l'avancée du désert, qui est aujourd'hui aux portes du sud de Tlemcen à l'ouest du pays, selon des indications des services concernés. Par les chiffres, ce sont 30 wilayas qui sont menacées dont 8 dans les zones steppiques, 13 dans la région agropastorale et 9 wilayas sahariennes, soit 965 communes et 1870 localités. Pis, les régions du sud ouest du pays connaissent une dégradation plus avancée par rapport aux autres régions. "La volonté et la détermination de préserver ces territoires sont là, à travers des programmes d'action à grande échelle", rassure le premier responsable de la direction générale des forêts (DGF), Abdelmalek Titah. Ces espaces potentiellement menacés font l'objet d'un vaste programme de prévention et de lutte contre la désertification, mené actuellement par la Direction générale des forêts dans le cadre de la politique du Renouveau rural. Lutte contre la désertification : une affaire de tous Pour les forestiers, de par son ampleur, le phénomène de la désertification interpelle tout un chacun, du simple citoyen jusqu'aux institutions étatiques et les décideurs. "Il ne faut surtout pas croire que la lutte contre la désertification est l'affaire uniquement de la direction générale des forêts ou du ministère de l'Agriculture et du Développement rural", a estimé M. Titah. "C'est un domaine où la multisectorialité doit être très forte. Chacun doit apporter sa contribution pour lutter contre ce phénomène ou du moins le réduire", a-t-il ajouté. Il s'agit d'un véritable défi qu'il faut relever avec l'ensemble des intervenants en vue de préserver la vie au niveau des différentes zones arides et semi-arides. Le programme de la DGF sur la lutte contre la désertification porte sur l'extension et la réhabilitation du barrage vert sur 100.000 ha, la réhabilitation de la nappe alfatière, la protection des zones de parcours et le développement de l'agriculture saharienne autour des oasis. En outre, un vaste programme de lutte contre l'érosion à travers 34 bassins versants a été engagé. Il s'agit à ce niveau de planter une superficie de 3,5 millions d'hectares. Pour autant, la réussite de ce programme dépend dans une très large mesure de l'adhésion et la participation des populations riveraines des espaces concernés par cette dégradation environnementale, estiment des cadres à la DGF. Les citoyens peuvent participer à cette opération d'envergure à travers des projets de proximité de lutte contre la désertification (PPLCD), selon la DGF. Ainsi, plus de 300 PPLCD sont en cours de réalisation dont 11.409 ha de plantations forestières dont 2.000 oliviers, 2.508 ha de plantations pastorales, 48.050 ha de mise en défens des parcours steppiques, 600 km de désenclavement, la réalisation de 75 points d'eau, de 24.400 mètres de canaux d'irrigation, et 445 unités solaires et éoliennes distribuées aux populations rurales. "La consolidation de ces actions sur le terrain nous laisse dire que nous sommes en mesure de réduire l'avancée de ce phénomène", a estimé M. Titah. "Pour cet objectif, il faut que les populations rurales soient pleinement impliquées et nous les accompagnons", a-t-il ajouté. Reboisement : Une opération d'intérêt national Les Nations unies ont placé cette année la journée mondiale de la lutte contre la désertification sous le thème "les forêts maintiennent la vie dans les terres sèches", et ce, en relation avec la déclaration par la même institution de l'année 2011 "Année des forêts". Outre la séquestration du carbone en vue d'en réduire les effets sur le réchauffement climatique, les forêts auront un grand rôle à jouer dans la lutte contre l'ensablement et l'érosion, phénomènes accélérateurs de la dégradation massive des terres arables. "Vu les conditions climatiques et écologiques de notre pays, l'Algérie ne va pas échapper au phénomène du changement climatique du fait de son climat aride et semi-aride. Nous devons continuer à reboiser davantage", estime M. Titah. L'Algérie compte réaliser sur 20 ans plus de 1,2 million d'ha de nouvelles plantations forestières à travers l'ensemble des zones et régions dégradées. "Le reboisement constitue une opération d'intérêt national dans la mesure où elle est soutenue par les pouvoirs publics à travers des enveloppes budgétaires conséquentes d'année en année", a souligné le directeur général des forêts. L'Etat consacre chaque année une enveloppe de 60 milliards de DA au développement rural dont 40% sont consacrés à la lutte contre la désertification. Le patrimoine forestier national est composé de 4,7 millions d'hectares dont 1,2 million d'ha de forêts productives (liège et fruit sauvages notamment), ainsi que 800.000 ha de plusieurs espèces de ''pinus'', dont le ''pin noir'' (pin de l'Atlas) du Djurdjura.