ALGER - Gouvernement central qui peine à asseoir son autorité sur l'ensemble du pays, poursuite de l'insurrection armée des Shebab, détérioration de la situation humanitaire des populations déplacées par le conflit armé, et incapacité de la communauté internationale à améliorer la situation sur le terrain : en 2001, la Somalie s'est enfoncée encore plus dans la crise. En proie au chaos et à l'anarchie depuis vingt ans, la Somalie fait face à une crise sans précédent avec la poursuite des violences perpétrées par les insurgés Shebab qui ont pris l'ascendant après le renversement des Tribunaux islamiques suite à l'intervention dans le pays de l'armée éthiopienne fin 2006. Plus d'une dizaine de tentatives pour restaurer une autorité centrale ont échoué, accentuant l'instabilité politique. Le gouvernement somalien de transition (TFG) mis en place en 2004, a lui-même vu défiler deux présidents et cinq Premiers ministres et son mandat initial de cinq ans a été prolongé deux fois. La force de l'Union africaine déployée dans ce pays (AMISOM) qui intervient en soutien du fragile TFG, sous mandat des Nations unies ne parvient pas à réinstaurer la sécurité et la paix dans le pays, en raison notamment du manque de moyens et de logistique sur le terrain. L'Amisom est constituée de 9.700 soldats ougandais et burundais, alors que le plafond autorisé par le Conseil de sécurité de l'ONU est de 12.000 hommes. Plusieurs appels ont été lancés pour renforcer ce contingent. Des troupes de Djibouti avaient rejoint récemment les rangs des forces africaines. Début octobre, le Conseil de sécurité a décidé d'autoriser l'organisation panafricaine à maintenir sa mission jusqu'au 31 octobre 2012, mais le TFG demandait que les effectifs de l'Amisom soient portés à 20.000 soldats. En dépit du manque des moyens dont elle dispose, l'AMISOM a contribué, aux côtés des forces somaliennes, à l'abandon en août dernier, par les insurgés Shebab de leurs positions dans la capitale Mogadiscio. Mais Mogadiscio reste la cible d'attaques régulières à la grenade ou au véhicule piégé attribuées par le TFG aux Shebab qui ont revendiqué l'attentat perpétré début octobre contre un complexe ministériel au centre de la capitale, faisant 82 morts et des dizaines de blessés. Ce groupe d'insurgés contrôle toujours le centre et la sud de la Somalie et son influence s'étend sur les pays voisins, notamment au Kenya. Ce dernier avait lancé en octobre une offensive militaire dans le sud de la Somalie afin de pourchasser les insurgés somaliens responsables, selon Naïrobi, de plusieurs enlèvements d'étrangers en territoire kenyan. Cette instabilité politique et sécuritaire dont souffre ce pays de la Corne de l'Afrique a été aggravée par la dégradation de la situation humanitaire touchant une grande partie de la population, provoquée par la famine, la plus grave depuis 60 ans, selon des ONG. Quelque 4 millions de Somaliens sont frappés par la famine, dont 750.000 risquaient de mourir, d'après les chiffres des Nations unies qui, depuis juillet dernier, ont déclaré six régions du sud somalien en état de famine, toutes sous contrôle des insurgés Shebab. Les enfants sont les plus vulnérables avec plus de 29.000 décès recensés par les agences humanitaires. Depuis le début de la catastrophe, près de 800.000 Somaliens ont traversé les frontières en quête de nourriture. Des milliers de personnes qui ont fuit la famine sont installées aux camps kenyans de Dadaab. Face à cette catastrophe la communauté internationale a tiré la sonnette d'alarme, appelant les pays riches et les donateurs à accélérer l'acheminement de l'aide pour atténuer les conséquences de la crise. Le centre d'analyse pour la sécurité alimentaire (FSNAU) de l'ONU a prévenu que "si le niveau actuel de réponse (à la crise humanitaire) continue, la famine devrait encore progresser au cours des quatre prochains mois". Le chef du Haut commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) Antonio Guterres a appelé toutes les parties en Somalie à laisser les missions humanitaires atteindre toutes les régions en proie à des violences et à une terrible sécheresse. Pour aider la population affectée, le Programme alimentaire mondial (PAM) a mis en place un pont aérien pour acheminer de la nourriture en faveur de 35.000 enfants souffrant de malnutrition. D'autres ONG et plusieurs pays ont également apporté leur aide. Mais cette aide reste toujours insuffisante. "Nous somme très loin de la fin de la famine", a affirmé le chef du bureau de l'organisation onusienne pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) en Somalie, Luca Alinovi, ajoutant qu'il faudrait plusieurs mois pour être sûr que le danger est écarté. Cette crise humanitaire s'est exacerbée par l'insécurité qui règne au large des côtes somaliennes et dans l'Océan indien en raison des actes de piraterie, dont le plupart ont été attribués à des Somaliens. Depuis le début de l'année, plus de 130 attaques de pirates avaient été enregistrées. Selon l'ONG Ecoterra International, qui recense l'activité maritime dans la région, au moins 40 navires et plus de 500 marins sont actuellement détenus par des pirates. Pour lutter contre ce phénomène, les forces navales internationales mènent des efforts conjoints malgré les obstacles, notamment l'étendue des surfaces à patrouiller, la difficulté de poursuivre en justice les pirates ou le manque d'une structure de commandement unifiée pour coordonner leurs opérations. Le Conseil de sécurité de l'ONU a adopté fin octobre une résolution appelant les Etats à coopérer afin de déterminer quel pays aura la compétence pour juger les actes de piraterie perpétrés au large de la Somalie.