La ville de Tombouctou est menacée de destruction par le groupe armé Ansar Dine qui poursuivait dimanche la destruction des mausolées de saints musulmans après avoir démoli, la veille, trois sites similaires dans cette ville du Nord malien, vieille de plus de 8 siècles. Samedi, des hommes d'Ansar Dine avaient détruit trois mausolées dans la ville, en expliquant qu'il s'agissait de représailles à la décision de l'Unesco, le 28 juin, d'inscrire Tombouctou sur la liste du patrimoine mondial en péril car la présence des groupes armés la mettait en danger. Mais Tombouctou c'est quoi ? Les récits historiques rapportent que la ville aurait été fondée au 12e siècle par des Touareg autour d'un puits (Tin en Tamasheq) gardé par une femme appelée "Bouctou" d'où le nom de la ville selon le livre "Histoire du Soudan" du Malien Abderrahmane Es Saâdi. Les premiers campements de nomades remontant à plus de mille ans, la ville de Tombouctou a connu une grande prospérité économique construite autour des échanges commerciaux entre le Sahel et le Maghreb. La ville comprend la Madrassa de la mosquée de Sankoré, fondée au 15e siècle, ainsi que deux autres centres de formation en théologie, fondé au 13e, que fréquentaient pas moins de 25.000 étudiants à cette époque. Campement saisonnier pour les caravanes des Touareg, centre de négoce de produits de base et d'esclaves pour les commerçants et centre d'enseignement islamique, la ville reste un témoin de l'histoire commune de plusieurs pays du Sahel et Maghreb. Après l'empire du Mali, Tombouctou tombe sous la domination de l'Empire Songhaï (Afrique de l'ouest) à la fin du 16e siècle puis entre les mains des Marocains entre le 17e et le 18e siècle avant d'être reprise par les Touaregs puis l'empire Peul du Macina avant la colonisation française. Classée patrimoine mondiale en 1988 par l'Organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la culture (Unesco), le vrai trésor de Tombouctou est constitué de près de 100.000 manuscrits, dont certains remontent à l'époque préislamique, détenus par les grandes familles de la ville. Aujourd'hui, les trois mosquées de Djingareyber, Sankoré et Sidi Yahia ainsi que les différents mausolées, remparts de la ville, témoignent encore de l'âge d'or de la plaque tournante du Sahel. Ces vestiges, bien entretenus, continuent à éblouir 12 siècles plus tard grâce à une grande diversité culturelle africaine et à un timbre architectural unique qui est aujourd'hui menacé de disparition. L'Unesco avait accepté, le 28 juin, la demande formulée par le gouvernement du Mali d'inscrire Tombouctou et le Tombeau des Askia sur la liste du patrimoine mondial en péril. Une décision qui vise, selon l'organisation, "à favoriser la coopération et le soutien en faveur de sites menacés par le conflit armé qui affecte la région" depuis la fin mars dernier. Protéger ces sites devient une urgence aux yeux de la directrice générale de l'Unesco, Irina Bokova, qui a exhorté à plusieurs reprises la communauté internationale à "coopérer" dans ce sens après la destruction samedi des mausolées de Sidi Mahmoud, Sidi Moctar et Alpha Moya.