Venus avec leurs familles et accompagnés parfois de leurs enfants en bas âge, des Syriens qui ont fui leur pays, théâtre de violences et d'affrontements depuis des mois, ont élu domicile ces dernières semaines au square Port-Saïd à Alger. Assis à même le sol, les visage anxieux et inquiets, et se prêtant difficilement aux questions des journalistes venus s'enquérir de leur situation, et craignant un "ennemi imaginaire", les réfugiés syriens se disent "vivre difficilement ces premiers jours du mois sacré". Pour certains, "la générosité légendaire" des Algériens en leur faveur leur avait permis de rompre le jeûne comme s'ils étaient dans leur propre pays, avec des dattes, du lait et des plats divers en guise de menu. Pour d'autres, ils sont dans l'obligation de se "débrouiller", puisant ainsi dans leurs modestes économies pour avoir de quoi se "mettre sous la dent" après une "dure journée" de jeûne. "Cela fait plus d'un mois que je suis ici. Je suis passé via la Jordanie et l'Egypte pour gagner l'Algérie. Au départ, je mangeais en puisant dans mes propres moyens et je vivais, avec ma famille, dans un hôtel à des prix très cher. Mais, à présent que j'ai épuisé toutes mes économies, je suis obligé de dormir à la belle étoile", raconte les yeux embués de larme, Raafat, venu d'Idleb, ville du nord-ouest de la Syrie. Pour lui, ça fait plus de trois jours qu'il se procure lui même le repas de la "soirée". "Même dans les restaurants de la rahma (sorte de resto du coeur), nous ne trouvons pas de place pour rompre le jeûne, ma femme mes enfants et moi-même. Il y a toujours trop de personnes. Et les bénévoles qui viennent distribuer des repas n'arrivent pas à satisfaire tout le monde", a-t-il déploré. Un élan de solidarité s'est constitué autour des réfugiés syriens Pour son "voisin de la galère", en Algérie pays "stable" et "hospitalier", la prise en charge des syriens est "impeccable". "Nous ne manquons de rien. Des gens viennent nous offrir des vêtements, des denrées alimentaires et parfois nous payent même les hôtels pour ceux d'entre nous qui n'ont pas d'argent. En plus, des plats tout chauds et variés nous sont servis, à notre grand bonheur", fait savoir Amr, venu accompagné de sa famille de la ville de Homs. Pour lui, la situation de son pays va s'améliorer et un réel changement va s'opérer, "c'est juste une question de temps". Près de cent personnes sont présentes dans ce jardin public de la capitale, a-t-on constaté sur place. Le square Port-Saïd est devenu la curiosité des Algérois et de badauds, qui s'arrêtent des fois des heures entières pour voir de plus près ces visages "hagards venus d'ailleurs" et des enfants déambulant en toute insouciance dans ce petit jardin, ignorant la "triste et dramatique situation" de leur parents. Sur place, un élan de solidarité s'est constitué autour de ces réfugiés pour leur venir en aide, où se mêlent de simples personnes, des bénévoles et des associations venus apporter leur contribution. Venue d'Aïn Taya (est d'Alger) avec sa copine, Ghania, opératrice dans une boite de communication a apporté des dattes, des habits et des couches pour les bébés et des "objets intimes" pour les femmes. "Je ne peux pas rester insensible à leur sort. Ce sont nos frères et nous sommes obligés de leur venir en aide. Je me déplace ici dès que je peux me libérer de mon travail pour leur apporter de l'aide. Je leur donne même de l'argent", a-t-elle indiqué. Houria Bouhired, la présidente de l'association "Sauvons la Casbah", s'est déplacée pour inviter tous les réfugiés syriens pour la rupture du jeûne et même se reposer. Un bus sera mis à leur disposition à partir de 19h00 pour les transporter au siège de son association à Bab Azzoun, a-t-elle assuré. "Dès que j'ai su que des réfugiés syriens, qui ont fui leur pays en guerre, étaient au square Port-Saïd, on s'est organisé à l'association pour les inclure dans notre programme du mois sacré", a-t-elle relevé. "Nous pouvons assurer les repas pour plus de 400 personnes. De plus une fois sur place, ils peuvent se reposer à leur aise", a-t-elle ajouté. D'autres jeunes, qui se sont constitués en un groupe de bénévoles, avec l'aide d'un bienfaiteur qui a mis à leur disposition son restaurant, situé à la rue Larbi Ben M'Hidi, font des pieds et des mains pour satisfaire tout le monde. "Nous récoltons auprès des bienfaiteurs toute sorte de denrées alimentaires pour la préparation des repas. Les gens ne rechignent pas à nous aider, hamdoullah ! (Dieu merci)", s'est exclamé Mourad, qui a refusé d'indiquer le lieu du restaurant en question. "C'est difficile de satisfaire toute la demande mais nous comptons sur la générosité de tout le monde. Nous distribuons plus de 90 plats, mais d'autres personnes se mêlent aux syriens et profitent de leur situation pour avoir des plats gratuitement alors qu'ils ne sont pas dans le besoin", s'est-il désolé.