"Asif n yidammen" (Le sang du fleuve), un film documentaire sur la répression sanglante de la manifestation pacifique des Algériens le 17 octobre 1961 à Paris, sera en compétition pour l'Olivier d'or du 13ème festival du cinéma amazigh prévu du 23 au 28 mars à Tizi-Ouzou, a-t-on appris vendredi auprès du réalisateur, Abderrazak Larbi-Cherif. Dans sa première partie, le documentaire (52') revient sur la création de la Fédération de France du FLN et l'atteinte d'un objectif inédit de la Guerre de libération nationale : porter le combat libérateur sur le sol de l'ennemi. La seconde partie est consacrée aux évènements de l'automne 1961 à Paris et à la sauvagerie d'une police "républicaine" qui s'est abattue sur des manifestants pacifiques, sortis en ce mardi noir d'octobre pour dire non au couvre-feu imposé quelques jours auparavant aux seuls Algériens, par le préfet de police de l'époque Maurice Papon. Avec force témoignages d'acteurs de cette action pacifique et de récits d'historiens, Larbi-Chérif revient sur le combat de l'immigration qui a donné le coup de grâce à un système colonial en déclin. La France va ainsi perdre contre la Fédération de France du FLN, à Paris, sa dernière bataille de la guerre d'Algérie. Selon son réalisateur, le film se propose de souligner l'apport de cette immigration dans le cours de la Révolution. "L'impact de ces tragiques évènements sur les négociations, déjà en cours, entre la GPRA et le gouvernement français, est un fait indéniable de l'histoire du mouvement national", a-t-il indiqué à l'APS, au terme d'une séance exclusive de visionnage du film. Larbi-Cherif a signalé, à cette occasion, la difficulté de répondre à certaines questions lancinantes se rapportant à ces évènements dont notamment le nombre "réel" des victimes. Tout en faisant parler des témoins et des historiens corroborant le chiffre de 300 victimes "au bas mot", il a fait part d'écueils insurmontables tant, a-t-il dit, les archives se rapportant surtout aux rapports de la préfecture de Paris d'alors et à l'ordre de tirer sur les manifestants demeurent "inaccessibles". Tout en se félicitant que son produit soit enfin prêt dans les deux versions arabe et français (avec sous-titrage en tamazight pour le festival), le réalisateur, établi en France depuis 12 ans, souhaite avoir un soutien financier pour l'acquisition des images d'archives, indispensables à la réalisation de documentaires sur l'histoire d'Algérie. Le réalisateur a d'ailleurs déposé une demande de subvention auprès du Fonds de développement de l'art, de la technique et d'industrie cinématographique (FDATIC) suite à l'appel du ministère de la Culture, dans le cadre des célébrations du cinquantenaire de l'indépendance, aux producteurs et professionnels du cinéma ayant des projets sur la guerre de libération. "Asif n yidammen" (2013) est la troisième oeuvre du genre avec laquelle Larbi-Cherif compte participer au festival du cinéma amazigh. "Ger yenzizen, l'art en fréquence", un portrait du grand compositeur algérien Kamel Hamadi (2010) et "Tahar Djaout, un poète peut-il mourir ?, Amedyaz ur yettmettat" (2011) avaient marqué leur passage à ce rendez-vous du cinéma algérien. Avec sa nouvelle production, le réalisateur compte rendre un hommage souligné à son grand-père, Si Abderrahmane (décédé récemment à l'âge de 104 ans), un militant de la première heure de la cause nationale. Journaliste (promotion 1991 de l'Institut algérien des sciences de l'information et de la communication), Abderrazak Larbi-Cherif est également diplômé de l'Ecole internationale de création audio-visuelle et de réalisation (EICAR) de Paris. Après huit ans de services à Berbère Télévision, il rejoint, en 2010, France 24 où il exerce présentement.