L'ONG internationale Crisis Group (ICG) a affirmé mardi à New York que la situation au Mali ne doit pas être vue sous le seul angle de la lutte contre le terrorisme, mais dans sa globalité, tout en appelant le Conseil de sécurité à distinguer entre la mission de stabilisation politique du pays, qui relève du mandat onusien, et celle d'une "force parallèle" destinée à mener des opérations militaires offensives. C'est ce qu'a déclaré la directrice du programme Afrique de l'ICG, Comfort Ero, qui a présenté le rapport de cette ONG sur le Mali au cours d'une conférence de presse au siège de l'ONU. A ce propos, elle a soutenu que "dans la hiérarchie des causes de la crise malienne, la corruption et le laxisme dans la gouvernance viennent en effet loin devant un problème terroriste, touareg ou même Nord-Sud du pays". Alors que le Conseil de sécurité doit, dans les prochains jours, adopter une résolution relative à l'établissement d'une mission de stabilisation des Nations unies au Mali, Mme Ero a appelé cet organe de l'ONU à prendre en considération toutes les dimensions de la crise malienne. "La communauté internationale doit exiger des Maliens qu'ils prennent leurs responsabilités'', a-t-elle souligné. Le 3 avril dernier, le Conseil de sécurité a été saisi des deux options envisagées par le secrétaire général en vue de la transformation de la Mission internationale de soutien au Mali sous conduite africaine (MISMA), autorisée par le Conseil dans sa résolution 2085, en opération de stabilisation et de maintien de la paix de l'ONU. Si la première option envisage une présence politique intégrée et multidimensionnelle des Nations unies aux côtés d'une force militaire placée sous conduite africaine, la seconde option, qui a la préférence du Mali et des pays de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), serait une mission de stabilisation intégrée et multidimensionnelle des Nations unies créée en vertu du Chapitre VII, et qui serait établie en complément d'une force parallèle, rappelle-t-on. Dans ce sens, la représentante de l'ICG a averti que "ni une présence prolongée de l'armée française, ni la transformation de la MISMA en une mission de stabilisation de l'ONU ne peuvent se substituer à l'immense chantier politique auquel doivent s'attaquer les autorités intérimaires, les acteurs politiques et la société civile du Mali". Comparant la situation au Mali avec celle dans laquelle se trouve l'Afghanistan, elle a plaidé pour qu'une solution politique de stabilisation du Mali se conjugue à une solution militaire de lutte contre les groupes extrémistes. Elle a aussi invité le Conseil de sécurité à maintenir une distinction claire entre la mission de stabilisation politique et sécuritaire du pays, qui relève du mandat des Nations unies et, d'autre part, celle d'une "force parallèle" destinée à mener des opérations militaires offensives. Les modalités de la coopération entre la mission de stabilisation et cette "force parallèle" devront également être précisées, a insisté Mme Ero. Selon elle, "la mission des Nations unies ne devra pas geler le processus de dialogue à Bamako, mais bien l'encourager en responsabilisant toutes les parties". Alors que le gouvernement malien a annoncé et maintenu l'échéance du mois de juillet 2013 pour la tenue de l'élection présidentielle, la directrice du programme Afrique de l'ICG a indiqué que les conditions techniques, politiques, sécuritaires et psychologiques nécessaires à la tenue d'un scrutin n'étaient pas toutes réunies. Par ailleurs, elle a déploré la lenteur et le manque de clarté dans l'élaboration de la stratégie régionale intégrée de l'ONU pour le Sahel, telle qu'elle a été requise dans la résolution 2056, étant entendu, selon elle, "qu'il ne peut être demandé au Mali de résoudre la crise systémique qui prévaut dans toute la région du Sahel". Présidée par Louise Arbour, ancienne haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, l'ICG est une ONG internationale qui a pour mission de contribuer à prévenir et à résoudre les conflits a travers ses analyses de la situation sur le terrain et des recommandations.