Les dirigeants d'Afrique de l'Est, réunis jeudi à Addis-Abeba pour tenter de relancer les pourparlers de paix au Soudan du Sud, ont appelé Juba et les rebelles à engager un dialogue inclusif, au lendemain de l'investiture par l'Union africaine (UA) d'une commission d'enquête chargée de déterminer les responsables des atrocités commises depuis l'éclatement, mi-décembre, du conflit. Les chefs d'Etat et de gouvernement des pays de l'Igad (Autorité intergouvernementale pour le développement), l'organisation est-africaine qui assure la médiation dans le conflit sud-soudanais, ainsi que l'Union européenne (UE), la Chine et les Etats-Unis ont exprimé à l'ouverture du sommet leur disposition à soutenir les efforts de l'organisation régionale pour la réconciliation nationale et le rapprochement des positions du gouvernement et de l'opposition dans ce pays de l'Afrique de l'Est. Parmi les chefs d'Etat présents au sommet figurent les présidents soudanais, Omar Al Bachir, kenyan, Uhuru Kenyatta, ougandais Yoweri Museveni, djiboutien, Ismaïl Omar Guelleh, et du Soudan du Sud Salva Kiir. Le Premier ministre éthiopien, Hailemariam Desalegn, dont le pays assure la présidence tournante de l'IGAD, et le chef du gouvernement somalien, Abdelwali Cheikh Ahmad, ont aussi participé au sommet qui a planché sur les moyens d'activer les accords signés entre le gouvernement du Soudan du sud et l'opposition, en plus d'autres questions concernant l'acheminement de l'aide humanitaire aux populations et la création d'un mécanisme de suivi des ententes paraphées par les deux parties. Les travaux du sommet se sont poursuivis à huis clos. Nombre de diplomates en mission à Addis-Abeba, ainsi que les représentants d'organisations régionales et internationales ont assisté à la séance d'ouverture. Dans une conférence de presse à l'issue du sommet, le secrétaire exécutif de l'IGAD, Mahboub Maalin, a affirmé que les décisions adoptées soulignent la nécessité de respecter l'accord signé, le 23 janvier, entre le gouvernement et l'opposition visant notamment à mettre un terme aux hostilités, et d'œuvrer à trouver une solution politique au conflit au Soudan du sud. Créé en 1986 en réponse aux catastrophes climatiques qui ont causé des famines et dégradé l'environnement surtout dans la corne de l'Afrique, l'IGAD qui comprend sept pays (Ethiopie, Djibouti, Kenya, Ouganda, Somalie, Soudan et Soudan du Sud) a également pour mission de mettre en œuvre la coopération régionale et l'intégration économique entre les Etats membres. Calme relatif après deux jours de combats dans la ville de Malakal Un calme relatif régnait jeudi dans la ville de Malakal, capitale de l'Etat pétrolier du Haut-Nil, dans le nord-est du Soudan du Sud après deux jours de combats entre l'armée et les rebelles de l'ex-vice-président Riek Machar. Le porte-parole de l'armée, Philip Aguer, a affirmé que "la situation sécuritaire générale du pays est relativement calme", ajoutant "mais depuis deux jours, il y a des affrontements entre nos forces et les rebelles dans et autour de Malakal". Les rebelles avaient lancé le 18 février une vaste offensive contre Malakal, en dépit d'un cessez-le-feu signé entre les belligérants fin janvier. Ces affrontements ont eu lieu alors que des dirigeants d'Afrique de l'Est sont réunis jeudi en sommet dans la capitale éthiopienne Addis Abeba pour tenter d'enrayer la crise sud-soudanaise. Le conflit, qui a fait des milliers de morts et quelque 900.000 déplacés, a débuté le 15 décembre dans la capitale sud-soudanaise Juba, avant de rapidement s'étendre à d'autres régions clés du pays (en particulier les Etats du Haut-Nil, d'Unité (nord) et du Jonglei (est)). Il oppose des soldats loyaux au gouvernement à des militaires mutins qui ont rejoint l'ex-vice-président Riek Machar, limogé l'été 2013. Les combats sont alimentés par une rivalité politique entre l'ex-vice-président et le président Salva Kiir. M. Kiir a accusé Riek Machar de tentative de coup d'Etat. Ce dernier nie, et reproche en retour au premier de vouloir faire le ménage au sein du parti au pouvoir, le SPLM, dans la perspective d'élections en 2015. L'envoyé spécial des Etats-Unis, Donald Booth a indiqué que le non respect, par les belligérants, du cessez-le-feu signé fin janvier a "conduit à des milliers de morts supplémentaires et à une dégradation de la situation humanitaire, le Soudan du Sud faisant face à une possible famine". "Si les choses continuent, le spectre de la famine menace", a déclaré pour sa part Alexander Rondos, représentant de l'UE pour la Corne de l'Afrique, ajoutant que "les pluies arrivent, et si personne ne peut aller planter (les champs), il n'y aura pas assez de stocks (de nourriture) dans quelques mois". L'UA met en place une commission d'enquête sur les atrocités L'Union africaine (UA) a investi mercredi une commission d'enquête chargée de déterminer les responsables des atrocités commises depuis l'éclatement, mi-décembre, du conflit au Soudan du Sud entre forces gouvernementales et troupes loyales à l'ancien vice-président Riek Machar. La commission de cinq membres, présidée par l'ex-chef de l'Etat nigérian Olusegun Obasanjo, est chargée "d'enquêter sur les violations des droits de l'Homme et autres abus commis durant le conflit par l'ensemble des parties" belligérantes, selon un communiqué de l'UA. "Quiconque est responsable ne doit pas s'en tirer avec impunité", a déclaré M. Obasanjo, mercredi, lors de la cérémonie d'investiture au siège de l'UA à Addis-Abeba, "l'Afrique ne doit pas tolérer l'impunité d'Africains traitant des Africains comme s'ils n'étaient pas des êtres humains". "Je veux vous assurer que nous ne négligerons aucune piste", a-t-il ajouté. La présidente de la Commission de l'UA, Nkosazana Dlamini-Zuma a prévenu la mission d'enquête qu'elle faisait face à "une très importante et lourde responsabilité". Outre M. Obasanjo, la mission est composée de Sophia Akuffo, juge ghanéenne à la Cour africaine des droits de l'Homme, de l'universitaire ougandais Mahmood Mamdani, de la Sénégalaise Bineta Diop, envoyée spéciale de l'UA pour les femmes et du Gambien Pacifique Manirakiza, membre de la Commission africaine des droits de l'Homme.