Le Congrès américain a reçu lundi à Washington la militante sahraouie des droits de l'homme, Mme Aminatou Haidar, en visite dans la capitale fédérale américaine pour plaider la cause du Sahara occidental occupé et dénoncer les violations continues des droits de l'homme des Sahraouis par le Maroc. Mme Haidar est intervenue devant le Congrès dans le cadre de la ''Conférence Emir Abdelkader'' (Emir Abdelkader Lecture) organisée périodiquement par Defense Forum Foundation, qui est une fondation américaine enregistrée au Congrès activant pour la démocratie et les droits de l'homme ainsi que pour les questions de défense nationale américaine et elle est surtout connue pour ses forums tenus au bénéfice de l'institution parlementaire américaine pour promouvoir la liberté et les droits de l'homme à l'étranger. La conférence ''Emir Abdelkader Lecture'' désigne annuellement une personnalité musulmane, oeuvrant pour la liberté et les droits de l'homme dans le même esprit et en référence à l'Emir algérien Abdelkader Ben Mahieddine, pour prononcer une allocution au Congrès américain. Dans son intervention intitulée ''Justice pour la dernière colonie de l'Afrique: la lutte pour les droits de l'homme et l'autodétermination au Sahara occidental'', Mme Haidar a expliqué la genèse du dossier du Sahara occidental occupé, tout en faisant part du problème préoccupant des violations des droits de l'homme perpétrées par les autorités marocaines contre le peuple sahraoui. Devant les participants à ce forum, elle a décrit la politique de répression brutale et sanglante menée par le Maroc, à travers les arrestations arbitraires, les bastonnades, les actes de torture, les viols, les exécutions extra judiciaires et les disparitions forcées des Sahraouis. A ce propos, l'activiste sahraouie a fait part au Congrès que ces violations des droits de l'homme continuaient d'être commises même après la création, au Maroc, du Conseil national des droits de l'homme, qui est censé agir pour prémunir la société marocaine et sahraouie contre les violations des droits de l'homme, et malgré les appels au respect de ces droits formulés dans les rapports du département d'Etat américain et des ONG internationales des droits de l'homme et en dépit des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU et des rapports du Secrétaire général de l'ONU appelant au respect des droits de l'homme des Sahraouis. Appel à un mécanisme de surveillance des droits de l'homme au sein de la MINURSO Face à un auditoire particulièrement attentif à son discours, Mme Haidar a relevé l'importance de la création d'un mécanisme de surveillance des droits de l'homme des Sahraouis au sein de la Mission des Nations Unies pour l'organisation du référendum au Sahara occidental (MINURSO), qui est devenue, a-t-elle observé, une revendication unanime des ONG internationales des droits de l'homme. Or, a déploré cette activiste qui est également la présidente du Collectif des défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental (CODESA), ''ce sont certaines grandes puissances membres du Conseil de sécurité qui s'opposent toujours à la volonté de la communauté internationale qui réclame la mise en place d'un tel mécanisme.'' Ce qui fut le cas, a-t-elle rappelé, en avril 2013 lorsque certaines puissances mondiales avaient refusé d'appuyer, au Conseil de sécurité, le projet de résolution présenté par les Etats-Unis pour l'élargissement du mandat de la MINURSO au volet de la surveillance des droits de l'homme des Sahraouis au Sahara occidental occupé. Pire encore, s'est indignée Mme Haidar, même avec la résolution adoptée par le Conseil de sécurité en avril 2013 qui a appelé à l'amélioration de la situation des droits de l'homme des Sahraouis et à la mise en place des ''mesures indépendantes et crédibles'' garantissant le plein respect de ces droits, ''le Maroc récidive et continue toujours de violer ces droits''. Sur ce point, elle a précisé que rien que durant la période allant entre l'adoption de la résolution du Conseil de sécurité le 25 avril 2013 jusqu'au 18 mars 2014, la répression des manifestations pacifiques a touché 912 personnes (458 femmes, 399 hommes, 28 enfants et 27 handicapés). Cette période a recensé également 52 enlèvements dont des femmes et des enfants, qui ont été tabassés et/ou torturés avant d'être relâchés, tandis que des attaques et agressions ont été commises contre les défenseurs sahraouis des droits de l'homme et des blogueurs sahraouis alors que 197 maisons ont été saccagées. Quant aux poursuites judiciaires, elles ont concerné 108 prisonniers politiques sahraouis durant cette même période. En conséquence, elle a prévenu que l'aggravation de la précarité des conditions de vie et la situation alarmante des droits de l'homme dans les territoires occupés du Sahara occidental ''vont nourrir l'émergence, chez les civils sahraouis, d'un sentiment non seulement de perte de confiance mais aussi de désespoir pouvant être, à l'avenir, un catalyseur d'une riposte violente de leur part pouvant déstabiliser la paix dans le nord-ouest africain.'' Droit du peuple sahraoui à l'autodétermination Outre les droits de l'homme, la présidente du CODESA a également évoqué la question fondamentale de l'autodétermination en rappelant que ''le Maroc, avec l'appui de certaines puissances mondiales dont notamment la France, refuse toujours de se conformer à la légalité internationale laquelle donne, pourtant, le droit au peuple sahraoui de jouir de son droit à l'autodétermination''. Après la présentation de cette situation, Mme Haidar a, alors, appelé le Congrès, au vu de l'engagement de ce dernier pour la promotion des droits de l'homme à travers le monde et étant donné son rôle influent sur la politique étrangère des Etats-Unis, ''à se préoccuper davantage de la situation des droits de l'homme des Sahraouis et du problème de l'exploitation illégale des richesses minières et halieutiques du Sahara occidental surtout qu'il existe des entreprises américaines qui continuent de mener des activités de prospection minières et pétrolières alors que d'autres continuent d'importer du phosphate du Sahara occidental''. Cela se pratique, a-t-elle regretté, en dépit des clauses de l'accord de libre-échange entre les Etats-Unis et le Maroc excluant le Sahara occidental des territoires de mise en £uvre de cet accord. Mme Haidar a également sollicité le Congrès d'agir davantage pour une contribution efficace des Etats-Unis au Conseil de sécurité de l'ONU aux efforts déployés par la communauté internationale pour garantir le respect des droits de l'homme au Sahara occidental, et ce, afin de parvenir à l'adoption par le Conseil de sécurité d'une résolution statuant non seulement l'introduction de la surveillance des droits de l'homme au sein de la MINURSO mais aussi à l'application des conventions internationales interdisant le pillage des ressources minières et halieutiques sahraouies et, surtout, à trouver une solution pacifique garantissant le droit du peuple sahraoui à l'autodétermination. Outre son intervention au Congrès, Mme Haidar interviendra également jeudi prochain à la Représentation de l'Union africaine à Washington où elle animera un panel de discussion avec Mme Kerry Kennedy, la présidente de l'ONG américaine ''Robert F. Kennedy pour la justice et les droits de l'Homme'' (RFKennedy Center), et Mme Amina Salum Ali, l'ambassadrice de l'UA dans la capitale fédérale américaine. Après son séjour à Washington, l'activiste sahraouie se rendra la semaine prochaine à New York où elle rencontrera de hauts représentants de l'ONU, et ce, à l'approche de la réunion du Conseil de sécurité consacrée au Sahara occidental prévue en avril prochain.