La trêve humanitaire de six jours annoncée jeudi par l'ONU devra entrer officiellement en vigueur vendredi à 20h 59 GMT au Yémen, afin de permettre d'acheminer l'aide aux populations en détresse, après une journée sanglante marquée par des attaques et des raids dans le sud du pays qui ont fait 36 morts. Depuis des semaines que l'ONU réclamait une accalmie afin de porter secours à la population yéménite, dont 80% ont besoin d'aide ou de protection et plus de 10 millions ont du mal à se nourrir ou à trouver de l'eau potable. Le chef de l'ONU Ban Ki-moon a de ce fait demandé à toutes les parties au conflit de contribuer à éviter une catastrophe humanitaire. Cette "trêve humanitaire inconditionnelle" est la deuxième à être établie durant le mois de Ramadan. Elle doit durer jusqu'à la fin du mois sacré dans le but de permettre aux secours d'atteindre des millions de familles en détresse. Le porte-parole de l'ONU Stéphane Dujarric a réclamé un accès humanitaire "total et sans entraves à tout le pays, y compris par les aéroports et les ports", alors que les ports yéménites sont soumis à un blocus naval saoudien. Entre optimisme et méfiance Pendant que M. Dujarric affirme que l'ONU avait reçu de tous les belligérants des assurances suffisantes pour lui permettre d'annoncer cette "trêve", la coalition arabe menée par l'Arabie saoudite s'est montré méfiante estimant que la trêve serait "inutile" car les rebelles Houthis ne se sont pas montrés prêts à la respecter. "Je crois que la coalition n'a reçu (...) aucune preuve d'engagement de l'autre partie", a dit un responsable saoudien. Le ministre yéménite des droits de l'Homme, Ezzedine al-Asbahi, a également exprimé des doutes sur l'engagement des rebelles à respecter la trêve. "Ils sont maîtres dans l'art de la ruse, même avec la communauté internationale. Leurs groupes militaires sur le terrain ne montrent pas de bonne volonté, ni un engagement sincère à solidifier une trêve humanitaire", a-t-il affirmé. L'ambassadeur adjoint britannique à l'ONU, Peter Wilson, s'est montré quant à lui optimiste, jugeant que le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon avait "créé les conditions" pour les armes se taisent. Vendredi, l'Union européenne a appelé "toutes les parties à respecter la trêve" humanitaire qui doit entrer en vigueur peu avant minuit au Yémen, espérant que l'aide pourra parvenir aux villes les plus touchées par les bombardements. La chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini et le commissaire à l'Aide humanitaire Christos Stylianides ont appelé "toutes les parties à autoriser un accès plein et sans contrainte de l'aide, qu'elle soit transportée par voie aérienne, maritime ou terrestre". De son côté le médiateur de l'ONU, Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, poursuivra ses consultations pour parvenir à un "cessez-le-feu durable "et mettre en place "un mécanisme permettant le retrait des forces, la libération des prisonniers politiques et la reprise d'un dialogue politique", a fait savoir le porte-parole de l'ONU M. Dujarric. Poursuite des combats dans le Sud du Yémen A Aden, grande ville du sud la situation n'est guère plus calme. Les combats entre rebelles et partisans du président Hadi n'ont pas cessé. A quelques heures à peine de la trêve, les avions de la coalition menée par l'Arabie saoudite continuaient à bombarder la rébellion Houthie, qui durant la nuit a lancé des raids sur des quartiers résidentiels d'Aden, le grand port du sud du pays, et a continué à progresser dans le désert d'Hadramaout, dans l'est du pays. Depuis le début des bombardements aériens de la coalition arabe le 26 mars, les combats ont fait plus de 3.200 morts et chassé de leurs foyers un million de personnes, selon le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR). Les humanitaires attendent le feu vert Les agences humanitaires se sont dit prêts à convoyer rapidement de l'aide à des millions de Yéménites dès l'entrée en vigueur de la trêve. "Nous sommes prêts. Nous étions même prêts avant que la trêve soit déclarée" par les Nations unies jeudi, a expliqué Abeer Etefa, porte-parole du Programme alimentaire mondial (PAM). C'est "notre dernier espoir" d'atteindre les zones qui ont besoin d'aide, a-t-elle ajouté, précisant que deux bateaux remplis de nourriture et de carburant croisaient au large d'Aden. Le PAM est parvenu la semaine dernière à livrer 9.000 tonnes de nourriture à son entrepôt au Yémen et la trêve est nécessaire pour pouvoir distribuer cette aide aux personnes dans le besoin.