La révision de l'âge de départ à la retraite est une décision "sage" mais pas la meilleure qui soit pour assurer la pérennité du système algérien de retraite, estime le chercheur et universitaire, Walid Merouani, préconisant d'autres réformes "complémentaires". "La suppression de la préretraite décidée lors de la dernière tripartite est une solution sage qui aura un impact significatif sur les dépenses de la Caisse nationale des retraites (CNR) dans la mesure où ces dernières vont forcément ralentir. En même temps, la croissance des recettes devra s'accentuer sur le long terme vue que les travailleurs cotiseront plus longtemps", a expliqué à l'APS, le docteur en économie et statistiques appliquées, et par ailleurs maître de recherche au Centre de recherche en économie appliquée au développement (CREAD). Le chercheur prédit également une "baisse" des transferts de l'Etat au titre de son budget social, conséquemment à la surpression de la préretraite. Une réforme au niveau de cette caisse devrait affecter de la même façon, les travailleurs de tous les secteurs d'activité avec une couverture retraite "plus présente" dans les secteurs de services par rapport à ceux de l'agriculture ou du bâtiment et travaux public (BTP), où les taux de cotisation sont moins importants, note-t-il. Tout en qualifiant la réforme décidée par le gouvernement de "nécessaire", M. Merouani considère néanmoins qu'elle "n'est pas la meilleure qui soit pour assurer la pérennité du système de retraite algérien", dans la mesure notamment où elle incitera les jeunes travailleurs à l'informalité. L'universitaire s'attend ainsi, à "un impact sur le comportement de la jeune population occupée sur le marché du travail, dans le sens où elle ne sera pas incitée à s'affilier à la sécurité sociale avant l'âge de 28 ans". "Pour les individus les moins prévoyants, la retraite apparaît lointaine et l'affiliation au système de sécurité sociale loin d'être une priorité. Le travail informel est plus attractif pour les jeunes de moins de 28 ans", argumente-t-il, se référant aux données des enquêtes nationales sur l'emploi auprès des ménages. En plus d'exposer cette population aux risques de précarité sociale à l'âge de la retraite, ce comportement occasionnera "un manque à gagner" à la CNR du fait du non recouvrement des cotisations de ces travailleurs, observe-t-il, soulignant "la nécessité d'une réflexion autour de moyens d'assurer une couverture retraite universelle". Plus concrètement, le chercheur préconise le recours à d'autres réformes "complémentaires", citant deux types "particulièrement discutés dans la littérature sur l'économie des retraites". Il s'agit des réformes dites "paramétriques consistant à conserver la structure du système de retraite, tout en modifiant certains paramètres clés, tels que les taux de cotisation ou l'âge de départ à la retraite", explique-t-il. Le deuxième type de réforme étant le "non paramétrique", consistant à "modifier l'architecture globale du système de sécurité sociale, ou bien à le remplacer carrément par un nouveau système", poursuit-il. M. Merouani suggère, dans ce cadre, plusieurs pistes de solutions, dont celle consistant en "la modification" du principe de calcul de la pension de sorte à obliger les travailleurs à cotiser plus longtemps (plus de 35 ans) pour bénéficier d'un taux de remplacement maximum (80%). "Cette réforme a le même effet (allonger la durée de cotisation) que la suppression de la retraite sans condition d'âge, mais sans décourager les jeunes travailleurs de moins de 28 ans à cotiser pour leur retraite", argumente-t-il. L'autre proposition consiste à "allonger la période servant de base de calcul du salaire de référence de 5 à 7 voir à 10 ans, l'intérêt étant de réduire le déficit de la CNR tout en ne pénalisant pas tellement les travailleurs".