Deux semaines après le début de l'agression militaire menée contre la capitale libyenne Tripoli par les troupes de Khalifa Haftar, les appels internationaux à la fin des combats se multiplient, alors que le nombre de victimes ne cesse de s'alourdir atteignant au moins 174 morts et plus de 750 blessés. L'armée du Gouvernement d'union nationale (GNA), reconnu par la communauté internationale, oppose une résistance militaire repoussant les agresseurs en dehors de plusieurs zones attaquées par les troupes venant de l'est du pays (Benghazi) ayant usé des moyens de destruction contre les populations et les lieux d'habitation. Un projet de résolution sur la Libye, réclamant un cessez-le-feu et un accès humanitaire inconditionnel aux zones de combats près de Tripoli, est en débat au Conseil de sécurité de l'ONU. Initié par la Grande Bretagne, le projet de texte demande à toutes les parties en Libye de faire baisser la tension et de s'engager dans un cessez-le-feu et un processus avec les Nations unies pour obtenir un arrêt des hostilités complet. Considérant que l'offensive des troupes de Khalifa Haftar, une "menace à la stabilité de la Libye et à la recherche d'une solution politiques à la crise" dans le pays, la résolution a réclamé aux membres du Conseil d'user de leur influence auprès des deux parties pour aboutir à un cessez-le-feu. Elle demande aussi à toutes les parties de prendre des mesures pour un accès humanitaire inconditionnel aux populations affectées. Au moment où le Conseil de sécurité se réunissait, mardi soir, pour examiner le texte, Tripoli a été cible des groupes de Haftar, par plusieurs roquettes dont les explosions ont fait six morts, dont deux femmes et 11 autres blessés dans les quartiers d'Abou Slim et Al-Antissar, dans le sud de la capitale. Dans ce contexte, le secrétaire général des Nations Unies a appelé à une cessation immédiate des combats, a souligné le porte-parole de l'ONU, Stéphane Dujarric, faisant état de la vive préoccupation d'Antonio Guterres quant à cette situation. M.Salamé qui avait rencontré plusieurs représentants libyens appelant à la fin des hostilités et à la reprise du dialogue, a condamné cette "attaque aveugle" qui a endommagé des habitations civiles, des écoles et des infrastructures. Depuis le début de l'agression contre Tripoli, de nombreuses familles libyennes ont du fuir les zones touchées dans le sud de la capitale libyenne, en se dirigeant vers le centre de Tripoli et ses environs immédiats pour se protéger. Selon les services de l'ONU, plus de 18 000 déplacés ont été recensés en dehors de la capitale, notamment à Tadjoura, Al-Maya, Ain Zara et Tarhouna. Le représentant spécial du secrétaire général pour la Libye, Ghassan Salamé, qui a insisté sur le respect d'une trêve humanitaire, a dénoncé l'offensive menée par les troupes de Khalifa Haftar, soulignant que celle-ci "ressemblait davantage à un coup d'Etat qu'à une lutte antiterroriste". Pour sa part, le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) a annoncé la veille avoir évacué plus de 150 réfugiés, parmi lesquels des femmes et des enfants, du centre de détention Abou Sélim, dans le sud de la capitale libyenne, vers son Centre de rassemblement et de départ dans le centre-ville. == Inquiétude des pays de la région== Le chef du Gouvernement d'union nationale (GNA) libyen, Fayez al-Sarraj, qui s'est rendu dans la nuit de mardi à mercredi aux quartiers d'Abou Slim et Al-Antissar, touchés par des tirs de roquettes, a dénoncé "la sauvagerie et la barbarie" des troupes commandées par le Khalifa Haftar, qu'il a qualifié de "criminel de guerre". Dans une vidéo publiée par son service de presse, le chef du gouvernement s'est engagé à présenter demain tous les documents à la Cour pénale internationale (CPI) pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité". M.al-Sarraj a estimé qu'il était "de la responsabilité juridique et humanitaire du Conseil de sécurité de l'ONU et de la communauté internationale, de tenir ce criminel responsable de ses actes", tandis que les troupes de Khalifa Haftar ont nié être à l'origine de ces tirs meurtriers, rejetant la responsabilité sur "les milices terroristes qui contrôlent la capitale". Avec l'agravation de la crise, des craintes ont été également exprimées notamment par des pays voisins et l'Italie, alertant sur les conséquences de cette crise qui pourrait affecter lourdement toute la région. Le ministre des Affaires étrangères, Sabri Boukadoum et son homologue tunisien, Khémaies Jhinaoui ont mis en avant "le rejet de la solution militaire et appelé à l'arrêt immédiat des combats. Lors des entretiens tenus en marge des travaux de la 5e session du Forum Russie- Monde Arabe, les chefs de la diplomatie algérienne et tunisienne ont invité "les frères libyens à adopter le dialogue inclusif et la réconciliation nationale en tant que unique voie pour parvenir à la solution politique consensuelle et pacifique escomptée, suivant le processus parrainé par l'ONU, loin de toute ingérence dans les affaires internes de la Libye pour la préservation de sa souveraineté, de sa sécurité et de son intégrité territoriale". De son côté, le président du Conseil italien, Giuseppe Conte, a fait part de son inquiétude quant à l'intensification des combats en Libye soulignant que cela pourrait pousser des dizaines de milliers de migrants à tenter de rejoindre les côtes italiennes. "La solution au différend marquant les deux parties doit être politique, pacifique et durable sous l'égide de l'ONU", a insisté M. Conte qui s'exprimait à l'issue de sa rencontre avec le ministre des Affaires étrangères du Qatar en visite en Italie. Sur le terrain, les responsables des forces du Gouvernement d'union nationale (GNA) continuent à rassurer que la situation à Tripoli demeure "sous contrôle" malgré l'intenisité des hostilités menées par les troupes armées de Khalifa Haftar, alors que le pays se préparait à tenir une conférence nationale de réconciliation les 14 et 15 avril à la ville historique de Ghadamès.