ALGER– Le Ministre de la Justice, garde des Sceaux, Belkacem Zeghmati, a indiqué mardi à Alger que le projet de loi relatif à la prévention et à la lutte contre la discrimination et le discours de haine "entre dans le cadre des efforts de l'Etat pour asseoir la nouvelle Algérie sur des bases solides fondées sur la justice et l'équité". Présentant ledit projet de loi devant la commission spécialisée de l'Assemblée populaire nationale (APN), le ministre a précisé que le nouveau texte "revêt une grande importance pour notre pays qui s'emploie à asseoir la nouvelle Algérie sur des bases solides fondées sur la justice, l'égalité et l'équité pour l'ensemble des Algériens sans exception ni exclusion". M.Zeghmati a ajouté que le projet de loi visait à établir un cadre juridique "global" en matière de prévention contre ces phénomènes "étrangers à notre société et aux principes de l'islam", afin, a-t-il dit, de protéger la société contre ces fléaux qui "ont pris des proportions dangereuses ces dernières années, en ce qu'ils entravent les droits de l'homme et menacent aujourd'hui l'unité et la cohésion de notre société". Des fléaux dont la propagation a été favorisée par le développement sans précédent des moyens de communications, a-t-il estimé. Le ministre a affirmé, à ce propos, que les dispositions du projet de loi "ne visent pas à restreindre la liberté d'expression qui est, au demeurant, l'un des éléments fondamentaux de notre société, mais tiennent compte du fait que cette liberté d'expression doit contribuer positivement à la prévention contre la discrimination et le discours de haine et promouvoir la culture des droits de l'homme et de l'acceptation de l'autre dans une société englobant tous ses enfants sans exclusion ni exclusive". Les dispositions générales de ce projet de loi prévoient une régulation de son champ d'application, à travers la définition des concepts de la haine, de la discrimination, des formes d'expression et d'appartenance géographique. De même qu'elles prennent en considération les mécanismes internationaux adoptés par l'Algérie. De ce fait, est considérée comme acte discriminatoire, toute distinction fondée sur le sexe, la race, l'origine nationale ou ethnique, la langue, l'appartenance géographique, le handicap ou l'état de santé. Aussi, sont considérées comme étant des actes haineux, toutes formes d'expression qui propagent, encouragent ou justifient la discrimination ainsi que celles qui expriment la raillerie, le mépris, l'humiliation, la haine ou la violence. Le projet prévoit la mise en place d'une stratégie nationale de prévention contre la discrimination et le discours de haine visant à moraliser la vie publique, diffuser la culture de tolérance et de dialogue, en impliquant la société civile et le secteur privé dans son élaboration et sa mise en œuvre. Ses dispositions prévoient la prise de mesures nécessaires pour prévenir contre ces phénomènes, à travers l'élaboration de programmes d'enseignement et de formation pour sensibiliser et diffuser la culture des droits de l'homme. Le projet de loi prévoit également la création, auprès du Président de la République, d'un Observatoire national de prévention contre la discrimination et le discours de haine, un organisme national qui jouit de la personnalité morale et de l'autonomie morale et matérielle et qui est chargé de "déceler toute forme de discrimination et tout discours haineux, les analyser et proposer les mesures et procédures nécessaires à leur prévention. Le projet définit la composante de cet Observatoire qui comprendra des compétences nationales, désignées par le président de la République, de représentants du Conseil national des droits de l'homme, du Conseil supérieur de la langue arabe, du Haut Commissariat à l'amazighité, de l'Organe national de la protection et de la promotion de l'enfance et du Conseil national des personnes handicapées, outre les associations activant dans le domaine. L'Observatoire soumet un rapport annuel au Président de la République, portant essentiellement sur la stratégie nationale de prévention et des recommandations pour renforcer et promouvoir les mécanismes nationaux de prévention en vigueur. Le projet de loi consacre aux victimes de discrimination et de discours haineux, des dispositions qui leur garantissent une prise en charge psychologique et sociale et leur facilite le recours à la justice. De même qu'il prévoit plusieurs dispositions procédurales qui s'adaptent à la nature des crimes de discrimination et au discours de haine. Dans ce cadre le projet de loi cite les juridictions compétentes, chargées des crimes stipulés dans cette loi et commis à l'étranger, que la victime soit algérienne ou étrangère établie en Algérie. Et la juridiction compétente est définie sur la base du lieu de résidence de la victime ou du domicile élu pour faciliter les procédures. Le projet propose également de permettre aux juridictions compétentes d'émettre des réquisitions aux prestataires de services ou autres personnes pour obtenir des informations stockées en utilisant les moyens des technologies de la communication et de l'information, taire des données relatives aux contenus ou au flux, retirer ou stocker des contenus, si ces derniers s'avéraient s'inscrire dans le cadre des crimes prévues par ladite loi. Outre la faite d'autoriser le parquet à mettre en mouvement l'action publique les dispositions du projet de loi permettent aux officiers de la police judiciaire de mettre en place un mécanisme juridique pour dénoncer ces crimes via internet et leur permettre de recourir aux moyens d'enquête spéciaux, notamment le hack d'un système informatique donné. Le projet de loi criminalise et sanctionne plusieurs actes notamment la discrimination et le discours haineux, l'incitation à commettre ces actes et la création, la direction ou la supervision d'un site ou d'un compte électronique pour diffuser des informations faisant la propagation d'un quelconque programme d'idées ou d'information, de dessins ou de photos incitant à la discrimination ou à la haine. Le projet définit les conditions de recours à un durcissement de la peine, notamment si la victime est un enfant ou si l'auteur exploite l'état de la victime résultant d'une maladie ou d'un handicap. Le durcissement de la peine est également appliqué lorsqu'il s'agit d'un crime commis à travers l'utilisation des technologies de l'information et de la communication ou l'appel, voire l'incitation à la violence. Ledit projet de loi a consacré un volet à la coopération judiciaire internationale, lequel tient compte de la nature de ces crimes parfois trans-continentaux, dont le traitement exige une coopération internationale. Le projet prévoit, en outre, le rejet de toute demande de coopération judiciaire internationale, si elle est de nature à porter atteinte à la souveraineté nationale ou à l'ordre public, la satisfaction de la demande de coopération internationale devant remplir le critère de respect du caractère confidentiel des informations communiquées, lesquelles ne doivent être divulguées que dans le cadre de ce qui est mentionné dans la requête.