Stable, maîtrisée voire inquiétante, la situation épidémiologique à Constantine est telle que les spécialistes, nonobstant une combativité et une résilience à toute épreuve, sont de ce fait déroutés face à cette tempête sanitaire "drivée" par un agent pathogène émergent à géométrie variable, mais aussi par des agents propagateurs de la Covid-19 à l'origine de l'éruption de clusters. Des clusters ayant "foisonné" après le déconfinement de certaines wilayas et l'allégement du confinement partiel dans d'autres régions du pays ont conduit à une flambée des cas de contamination par la Covid-19, essentiellement due au non-respect, par une partie de la population, des mesures barrière et de la distanciation sociale dans les lieux publics et les institutions à forte fréquentation. Dans cette optique, la capitale de l'Est, à l'instar des grandes agglomérations du pays d'ailleurs, présente un tableau épidémiologique "inquiétant" depuis une semaine, selon Adil Daâs, directeur local de la santé, qui fait état d'une augmentation du nombre des consultations et hospitalisations au niveau des trois établissements de santé affectés à la prise en charge des malades de la Covid-19, cumulant un total de 264 lits. Il s'agit de "prévenir l'éclosion de nouveaux foyers épidémiques par le biais du tracing des personnes contaminées afin de les isoler et casser ainsi la chaîne de transmission du virus", a souligné le même responsable, précisant que depuis le début de l'épidémie, "4 000 personnes ont été tracées et suivies à Constantine", ville figée depuis plusieurs semaines dans le "top five" des wilayas les plus touchées. Lire aussi: Covid-19/Djerad: la loi sera appliquée avec fermeté contre quiconque incite au non-respect des mesures préventives Une mission majeure pour les équipes des six services d'épidémiologie et de médecine préventive (SEMEP) de la wilaya, renforcées par les médecins des UDS et de médecine du travail notamment qui, quotidiennement, conjuguent leurs efforts pour effectuer des enquêtes épidémiologiques approfondies au sein de la famille et dans l'entourage professionnel des malades contaminés, exhortant les citoyens au respect strict des mesures de prévention, dont le port obligatoire de la bavette dans les lieux publics. Une mise en place d'un plan de communication local en vue de sensibiliser les citoyens au respect des gestes barrières pour "casser la chaîne de transmission du virus" a également été préconisée en début de semaine par le Dr. Djamel Fourar, porte-parole du comité scientifique de suivi de l'évolution du coronavirus en Algérie. Identifier les situations "super propagatrices" Abondant dans le même sens, le Pr. Djamel Zoughailech, spécialiste en épidémiologie et médecine préventive au CHU de Constantine, considère que "l'action de traçage des contacts est l'une des principales interventions à mener pour briser les chaînes de contamination, une tâche relevant essentiellement de l'activité des SEMEP, comme cela est stipulé dans le plan national de riposte à la menace de la Covid-19". Et d'ajouter : "le tracing contact n'est pas aisé et la recherche de toutes les personnes ayant pu avoir un contact proche avec le malade confirmé positif doit s'accompagner de mesures de prise en charge et de protection de ses contacts et leur entourage en les confinant, soit chez eux soit de préférence dans des lieux dédiés à cela, avec un encadrement médical jusqu'à la confirmation de la non contagiosité de chaque contact". Selon le spécialiste, les équipes des SEMEP doivent identifier "les situations super propagatrices responsables des flambées épidémiques, comme les rassemblements occasionnels dans les lieux publics, les transports en commun, les établissements de soins, afin de briser la chaîne de transmission du virus en contrôlant en amont ces situations, dans les mois à venir, en vue de prévenir l'apparition d'une éventuelle deuxième vague sans devoir recourir au confinement général". Avec plus de 600 cas et 25 décès, dont 50% de cas répartis sur les différents secteurs urbains du chef-lieu, la wilaya de Constantine a enregistré au début de la semaine en cours un pic de contamination par la Covid-19. Lire aussi: Covid-19: durcissement du dispositif préventif, plus grande implication des collectivités locales De l'avis de certains praticiens de la santé approchés par l'APS, "la situation dans cette wilaya aurait pu être moins inquiétante si tout le monde s'était conformé aux règles de prévention sanitaire en respectant le port de la bavette dans les lieux publics et en évitant les bousculades et les regroupements familiaux". Médecin et membre active d'un groupe Facebook exclusivement dédié à la sensibilisation aux dangers de la Covid-19, Ahlem déplore le fait de voir depuis quelques jours défiler les cortèges nuptiaux et les badauds sans bavette qui déambulent sans but précis, refusant de croire que le coronavirus existe et qu'il a fait des milliers de victimes à travers le monde. "Les gens doivent absolument comprendre que ce virus existe, qu'il est très dangereux et contre lequel nous ne pouvons présentement rien faire pour l'éradiquer, à part respecter les gestes barrière et adapter notre mode de vie. En clair nous devons apprendre à vivre avec la Covid-19", a-t-elle posté ces dernières heures en direction des internautes. A noter que le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a relevé dimanche dernier, lors du Conseil des ministres, "les comportements de certains citoyens qui veulent faire croire aux autres que le Covid-19 n'est qu'un mythe à visées politiques", s'étonnant d'une telle "irresponsabilité alors que les morts sont déplorés, chaque jour, par milliers à travers le monde, à commencer par les pays les plus développés".