Les descendants du Cheikh Bouziane, chef de la révolte des Zaâtacha survenue en 1849 contre la colonisation française et les habitants des Ziban dans la wilaya de Biskra, ont vivement salué samedi la restitution, par l'Etat, des crânes des résistants algériens, dont ceux des Zaâtacha, cheikh Bouziane et son conseiller Moussa Derkaoui notamment, conservés depuis plus de 170 ans au Musée d'histoire naturelle de Paris. A l'oasis des Zaâtacha, le lieu qui fut le théâtre de la révolte des habitants, menée par Cheikh Bouziane, dans la commune de Lichana, distante de 30 km au Sud-ouest de Biskra, la nouvelle de la restitution des crânes de quelques uns des leurs, annoncée par le Président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de la cérémonie de remise de grades et de médailles à des officiers de l'ANP, s'est répandue comme une trainée de poudre dans toute la région. Emu jusqu'aux larmes, le petit-fils du chef de la révolte des Zaâtcha, Mohamed Essaadi, a affirmé à l'APS, que le retour des crânes à leur terre natale, constitue une "véritable victoire qui devra permettre d'assainir le dossier des crânes de martyrs de la résistance algérienne, exposés au musée français". "L'oasis des Zaâtcha a été entièrement détruite en 1849 par l'armée française, et ses habitants ont été exterminés parce qu'ils refusaient toute forme d'occupation et sont un témoin d'un génocide dont le déchirement demeure vivace parmi les habitants des Ziban en particulier et les Algériens en général", a relevé le petit fils de Cheikh Bouziane. "Ma famille n'a jamais renoncé à la revendication de récupérer un jour, les restes de mes aïeux. Elle n'a jamais cessé de croire qu'un jour, les martyrs membres de ma famille et les autres, reviendront parmi les leurs", plus d'un siècle après leur décapitation et le transfert de leurs crânes en France, a-t-il souligné. "Le 5 juillet 2020, fête du 58e anniversaire de l'indépendance mais aussi date de l'inhumation dans la dignité des crânes de Cheikh Bouziane et d'autres résistants parmi les leurs, est une fierté pour nous", lance Mohamed Essadi, la voix serrée, envahi par une grande émotion. De son côté, le chercheur en histoire, Faouzi Masmoudi, a relevé qu'avec la restitution des crânes des résistants, la mémoire collective a ravivé "une profonde plaie, celle des massacres perpétrés contre les Algériens tout au long de la période coloniale, mêlée à des sentiments de joie et de fierté d'une Algérie, qui n'a, à aucun moment, oublié ses héros ou abandonné son droit de restituer leurs restes". Et d'ajouter: "Ces crânes sont également le témoignage du crime commis par l'occupation française, au cours duquel les valeurs humaines fondamentales ont été bafouées". Pour sa part, le vice-président de l'association locale Zaâtacha, Noureddine Abdelbaki a estimé que "l'histoire de l'Algérie, en particulier lors de la phase d'expansion française en Algérie, a connu des événements très douloureux et dont les détails terrifiants sont restés souvent méconnus par ces générations en raison du manque d'informations sur des événements historiques". Et de relever : "l'affaire des chefs de la résistance populaire décapités en représailles et dont les crânes ont été transférés, a mis à nu les pratiques sanglantes de l'armée française et a attisé le sentiment du patriotisme des jeunes, qui ont largement et fièrement répandu, sur les réseaux sociaux, la nouvelle de la restitution des crânes". Tahar Djemai, spécialiste dans l'histoire locale, a expliqué à l'APS, que la restitution des crânes des résistants est considérée comme "le retour des héros dans leur pays, l'Algérie, qui ne les a jamais abandonnés, malgré les tentatives, en vain, de la France pour altérer les repères de la résistance populaire et la dénaturer depuis la colonisation de l'Algérie en 1830". "Ces héros de la résistance populaire ont combattu l'armée française et défendu leur terre et se sont sacrifiés pour leur patrie" , a-t-il affirmé soulignant que les crânes récupérés par l'Etat sont "la preuve matérielle que ces résistants ont refusé de se soumettre et ont combattu l'ennemi jusqu'à leur dernier souffle. L'osais des Zaâtcaha, une résistance épique et un refus catégorique d'abdiquer Les évènements dont fut le théâtre l'oasis des Zaâtcha, avaient débuté le 16 juillet 1849 lorsque des forces coloniales françaises avaient tenté d'imposer leur contrôle à cette oasis rencontrant une farouche résistance de la population conduite par cheikh Bouziane.Plus de 1.500 obus d'artillerie furent tirés contre cette localité pour amener vainement la population à abdiquer, relèvent les historiens. Devant l'acharnement des résistants à défendre leur liberté et leur terre, les troupes du général français Herbillon n'avaient réussi à entrer dans cette oasis qu'après 52 jours de siège. La bataille s'acheva le 26 novembre 1849 par un tragique massacre collectif des habitants, la destruction de toutes les maisons et des milliers de palmiers-dattiers. L'armée française décapita le chef de la révolte, son fils et son conseiller. L'horrible acte est immortalisé dans une fresque, à l'oasis qui relate la révolte des Zaâtcha.Vendredi, le Président de la République avait présidé à l'aéroport international Houari-Boumediene, la cérémonie organisée à l'occasion de la restitution de vingt-quatre (24) restes mortuaires des valeureux martyrs des résistances populaires, rapatriés de France à bord d'un avion militaire sous escorte d'avions de chasse relevant des Forces Aériennes de l'Armée nationale populaire (ANP). Les dépouilles et crânes des valeureux martyrs ont été accueillis par les honneurs militaires et la récitation de la Fatiha en leur mémoire et seront inhumés, dans la dignité, dans leur terre natale, dimanche 5 juillet au niveau du carré des martyrs au cimetière d'Al Alia à l'occasion de la célébration de la fête de l'indépendance.