Le Kirghizstan organise dimanche un référendum constitutionnel, jugé crucial par les autorités intérimaires qui peinent à rétablir l'ordre dans le pays où les violences se poursuivent depuis le soulèvement sanglant d'avril dernier qui a évincé le président Kourmanbek Bakiev et porté au pouvoir l'opposition. Environ 2,5 millions d'électeurs de ce pays d'Asie centrale de 5,3 millions d'habitants sont ainsi attendus aux urnes pour se prononcer sur la nouvelle Constitution, dont la principale mesure affaiblit considérablement le président au bénéfice du Parlement, afin d'éviter la concentration du pouvoir dans les mains d'une seule personne. En cas de validation des amendements à la loi fondamentale, un seul parti politique ne pourra plus détenir plus de 50 sièges au Parlement kirghiz qui en totalise 90, alors que le parti Ak-Jol du président déchu Bakiev était ultra-majoritaire dans l'assemblée précédente. A la veille de cette consultation, la présidente par intérim du Kirghizstan, Rosa Otounbaïeva, a appelé le peuple kirghiz à participer au référendum et à voter pour l'adoption d'une nouvelle Constitution. "En disant oui à la nouvelle Constitution, le peuple kirghiz se prononcera pour un changement fondamental du système politique du pays, pour la prééminence des droits des citoyens et pour un Etat responsable", a déclaré jeudi Mme Otounbaïeva dans un message à la nation. "Il faut rétablir l'ordre. Et c'est impossible sans adoption de la Constitution et la formation de structures d'Etat", a encore souligné Mme Otenbaïeva pour qui l'adoption de la nouvelle Constitution représentera "une victoire du peuple kirghiz sur l'autoritarisme". Le Kirghizstan est en proie depuis le soulèvement d'avril dernier qui avait fait 87 morts dans la capitale Bichkek, à une vague de violences inter-ethniques entre les Kirghiz et la minorité ouzbèke dans le sud du pays, fief de M. Bakiev, réfugié au Bélarus. Ces troubles ont fait 264 morts et des milliers de blessés, selon le bilan officiel. Mais les autorités de transition estiment que ces violences ont coûté la vie à environ 2.000 personnes. En outre, le gouvernement provisoire s'est dit résolu à prendre "toutes les mesures pour que la situation dans le sud du pays se stabilise le plus vite possible". A la suite des affrontements inter-ethniques, les autorités kirghizes ont décidé de reporter à octobre 2011 l'élection présidentielle prévue initialement d'ici à la fin de l'année et de confier la fonction suprême à la dirigeante du gouvernement provisoire, Rosa Otounbaïeva, qui sera légitimée si le oui l'emporte au référendum. En prévision de ce scrutin, le couvre-feu instauré dans le Sud dans la région d'Och après le début des violences inter-ethniques a été levé samedi tandis que des barrages de contrôles ont été maintenus dans la ville et la région et les contingents de forces de l'ordre ont été renforcés à certains endroits. A Och, deuxième ville du pays, de nombreux habitants affirmaient samedi qu'ils iraient voter pour la nouvelle Constitution en espérant que cela contribue à stabiliser le pays. "Moi je vais aller voter pour que la vie s'améliore et pour que ces événements (les violences meurtrières de la mi-juin) ne se reproduisent plus", a dit un habitant d'Och. Cependant, d'autres habitants de cette ville estiment que ce scrutin ne changera rien à la situation tout en redoutant à cette occasion de nouveaux troubles interethniques. Par ailleurs, le référendum suscite l'attention de la communauté internationale notamment des Etats-Unis qui disposent à l'aéroport de Bichkek, dans la banlieue de la capitale kirghize, d'une base militaire essentielle pour les opérations en Afghanistan. "Nous espérons un référendum équitable et transparent, qui représente un pas sur la voie de la gouvernance démocratique", a déclaré le porte-parole de la diplomatie américaine, Philip Crowley Pour sa part, l'Organisations des Nations unies (ONU) a appelé les autorités du Kirghizstan à œuvrer de façon à assurer le bon déroulement du référendum soulignant qu'elle va suivre de près ce processus.